In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
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dimanche 25 décembre 2016

Miron Zownir - NYC (1986)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe allemand Miron Zownir (b.1953), qui depuis les années 70 documente en noir et blanc un monde en déréliction, celui de la zone, des toxicomanes, des désaxés, le monde violent et désespéré de tous les inadaptés - perdants magnifiques ou non -, le "peuple de l'abîme" qui survit au marges ignorées de nos sociétés.
Pour parler de son travail, il cite une phrase de Kafka rapportée par Max Brod dans sa postface de la première édition du Château.

M. Zownir - Los Angeles (1986)
Quand on a le courage de regarder les choses continûment, sans fermer les yeux pour ainsi dire, on en voit beaucoup ; mais qu'on se relâche, qu'on ferme une seule fois les paupières, et tout se perd aussitôt dans le noir.

Ce qu'il photographie, dans les cloaques de Londres, de Berlin, de Moscou, ou des grandes métropoles américaines, ressemble à l'enfer. 
Joyeux Noël !

AV2
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samedi 24 décembre 2016

James Flaxman - The desecration of Adam (2015)
Une image et des mots. L'oeuvre est une toile de l'artiste australien James Flaxman (b.1978)
L'existence de toute chose dérive de la beauté de Dieu, disait Thomas d'Aquin. Voici pour accompagner cette oeuvre quelques mots extraits de l'Ancien Testament.

Bénissez le Seigneur pour toutes ses oeuvres. Magnifiez son nom, publiez ses louanges, par vos chants, sur vos cithares, et vous direz à sa louange : Qu'elles sont magnifiques, toutes les oeuvres du Seigneur ! [....] Les oeuvres du Seigneur sont toutes bonnes, belles, Il donne sa faveur à qui en a besoin, à l'heure propice. Il ne faut pas dire "Ceci est moins bon que cela !". Car tout en son temps sera reconnu beau et bon. Ecclésiastique 39, 15-16. 33-34.

JS1

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dimanche 18 décembre 2016

Adolf Dehn - Central Park in winter (1965)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'artiste - aquarelliste et lithographe - américain Adolf Dehn (1895-1968). Il s'est en fait longtemps consacré exclusivement à l'art graphique avant de s'adonner à l'aquarelle.
Il commence ses études artistiques en 1917 à la Minneapolis School of Art, où il rencontre l'illustratrice Wanda Gág qui partagera sa vie pendant plusieurs années et avec qui il s'inscrira ensuite à l' Art Students League de New York.

Adolf Dehn - Red birds (1959)
Appelé en 1918 à servir sous les drapeaux pour la Première Guerre mondiale, il se déclare objecteur de conscience et se lie, en 1920 et 1921, à la gauche newyorkaise.
Life in Paris is simply glorious. En 1921 il part pour L'Europe, à Paris et à Vienne, où il tissera des liens avec nombre d'intellectuels - certains comme lui expatriés -, comme Gertrude Stein, Edward E. Cummings, Josephine Baker, Leo Stein, Kurt Weill...
Il retourne en 1929 dans une Amérique frappée par la Grande Dépression et traverse quelques années difficiles, mettant même son art au service de la WPA pour assurer l'ordinaire. Ce n'est qu'à partir de 1936 qu'il commence à assoir une carrière, nationale et internationale, qui le mènera à être considéré comme un des grands maîtres américains de la lithographie et, plus largement, comme une figure majeure du courant régionaliste et du réalisme social au même titre que Grant Wood ou Thomas Hart Benton, lesquels feront tous deux l'objet de futures publications.

dimanche 11 décembre 2016

W. Bishof - Anjali Hora, Bombay (1951)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe suisse Werner Bishof (1916-1954), déjà présenté ici en juin 2009.
Werner Bishof a réalisé plusieurs très beaux portraits d'Anjali Hora, ici âgée de 23 ans. 

W.B. - État d'Hidalgo, Mexique (1954)

Anjali était une danseuse de Bharat Natyam, une danse tamoule qui est une des plus anciennes danses traditionnelles en Inde. Vivant dans la pauvreté, elle s'occupait de sa mère aveugle matin et soir avant de s'adonner à sa discipline.
Becoming famous and popular is not very important but to preserve the art in its true and chaste form is most essential...

SR1
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dimanche 4 décembre 2016

André Lhote - Portrait de dame (1927)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du graveur, illustrateur et peintre bordelais André Lhote (1885-1962), formé à l'école des Beaux-Arts de la capitale girondine. Il est l'auteur des peintures murales de la Faculté de Médecine de Bordeaux.
À partir de 1912, Lhote se rallie au mouvement cubiste, sans toutefois le suivre jusque dans l'abstraction. 

A.L. - Toits de Bordeaux sous la neige
(1909)

Souhaitant inscrire la modernité dans la continuité de la tradition plutôt que de l'en détacher, le choix de ses sujets et ses compositions reste lié au classicisme. 
On ne voit bien que lorsqu'on est ébloui.

MP1
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samedi 3 décembre 2016

Les aveugles et l'éléphant

Une image et des mots. Où il sera encore question d'éléphant...  (cf. chronique du 22/10)
Cette gravure anonyme et non datée est une illustration de la fable indienne des aveugles et de l'éléphant : six aveugles devaient décrire l'aspect de l'animal en le touchant en différentes parties de son corps.
La parabole est limpide : elle nous enseigne simplement que chaque homme a tendance à prendre pour une vérité absolue la perception forcément limitée et subjective qu'il a de la réalité.
Pour accompagner cette image, voici ce que le grand Vialatte, pour qui "l'éléphant est considérable", nous dit du pachyderme. Ce texte fait partie d'une compilation publiée en 2002 par l'éditeur Arlea dans un beau Bestiaire illustré par Honoré.

L'éléphant date de la plus haute antiquité. Du moins sous forme de mammouth. Il pataugeait alors dans les glaciers d'Auvergne. Ou de Sibérie, pareil à un prophète biblique.
Depuis, le mammouth a perdu ses poils. Il vit tout nu dans les forêts équatoriales ou à Paris (au zoo de Vincennes, et dans le Ve arrondissement). Il est indispensable à l'homme : physiquement, moralement et de toutes les façons. Comment vivrait sans lui l'éléphantologiste ? Comment l'homme saurait-il, sans lui, qu'il n'a pas de trompe? (et sans le chameau, qu'il n'a pas de bosses?) Telle est l'utilité des monstres. Ils indiquent à l'homme ses limites, ils lui permettent de se définir, de connaître son contour et son ombre chinoise. Sans eux l'homme serait flou : une vapeur, une fumée, un gaz toxique.
L'éléphant se compose en gros d'une trompe, qui lui sert à se doucher, d'ivoire, dont on fait des statuettes, et de quatre pieds, dont on tire des porte-parapluie. Dieu l'a fait gris, dit Bernardin de Saint-Pierre, pour qu'on ne le confonde pas avec la fraise des bois.

dimanche 27 novembre 2016

Léon Bonvin - Chrysanthèmes (1863)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre et aquarelliste français Léon Bonvin (1834-1866), demi-frère de François.
Il est repéré par le peintre et critique d'art Frédéric Henriet, qui entre un jour par hasard dans le petit cabaret dont Bonvin a hérité de son père et dans lequel il vivote avec sa femme. Dans ses souvenirs, qu'il publie en 1891, le critique relate la découverte de ses fusains et de ses aquarelles.

Léon Bonvin - La ferme (1865)

Je ne me lassais pas de feuilleter le carton ; c'était tantôt un arbre découpé avec la précision d'une silhouette sur un ciel d'un bleu profond ; tantôt un chardon étudié avec la précision d'un botaniste ; tantôt une tendre fleurette émergeant, toute fraîche et odorante, de son lit de mousses et de graminées ; tantôt quelques objets de ménage empruntés au vulgaire mobilier du cabaret ; toujours des choses vues, longtemps regardées, prises dans l'étroit rayon de sa vie de tous les jours ; tout cela avait l'intimité d'une confidence ; on y sentait l'effort solitaire, concentré, d'une âme contemplative
On le retrouve pendu à une branche, un matin de février 1866 ; il avait 32 ans.

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dimanche 20 novembre 2016

Don McCullin - Finsbury Park, London (1961)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de l'anglais Don McCullin (b.1935).
Photography is the truth if it's being handled by a truthful person. The real truth of life is on the streets. Photograph the daily lives of people, and how they exist, and how they fight for space and time and pleasure.

DMC - Early morning, West Hartlepool
(1963)




Considéré comme l'un des plus grands photographes de guerre, il s'est aussi attaché à documenter la classe ouvrière, celle du nord de l'Angleterre, de West Hartlepool et de Bradford, ou encore les sans-abri de l'Est de Londres, la ville où il a grandi.
Ses réflexions sur son propre travail, sur sa pratique, révèlent la profondeur et la complexité des sentiments qui ont pu tirailler ce témoin de la souffrance humaine - le torturer même - dans l'exercice de son art.
I have been manipulated and I have in turn manipulated others, by recording their response to suffering and misery. So there is guilt in every direction: guilt because I don't practice religion, guilt because I was able to walk away, while this man was dying by starvation or being murdered by another man with a gun. And I am tired of guilt, tired of saying to myself: "I didn't kill that man on the photograph, I didn't starve that child". That's why I want to photograph landscapes and flowers. I am sentencing myself to peace.
Mais c'est lui aussi, qui raconte qu'un jour il a rencontré en Afrique une femme qui lui confie avoir voulu devenir médecin après avoir vu un de ses clichés; et il conclut cette anecdote en disant : "Voilà, c'est tout ce que je demande. Juste un médecin en Afrique."

samedi 19 novembre 2016

M.R. Hamilton - Tranchées aux coquelicots (1919)

Une image et des mots. Il y a cent ans jour pour jour s'achevait la sanglante bataille de la Somme, une des plus meurtrières de l'Histoire : plus d'un million de morts pour un gain d'une dizaine de kilomètres sans même que le front allemand ne soit percé.
L'image, c'est un tableau de la canadienne Mary Riter Hamilton (1867-1954), Trenches on the Somme with poppies.
Les mots, écrits un an auparavant, sont de Romain Rolland, extraits de Au dessus de la mêlée.

À ce jeu puéril et sanglant, où les partenaires changent de place tous les siècles, n'y aura-t-il jamais de fin, jusqu'à l'épuisement total de l'humanité ?
Ces guerres, je le sais, les chefs d'États qui en sont les auteurs criminels n'osent en accepter la responsabilité : chacun s'efforce sournoisement d'en rejeter la charge sur l'adversaire. Et les peuples qui suivent, dociles, se résignent en disant qu'une puissance plus grande que les hommes a tout conduit. On entend, une fois de plus, le refrain séculaire : " Fatalité de la guerre, plus forte que toute volonté ", - le vieux refrain des troupeaux, qui font de leur faiblesse un dieu, et qui l'adorent. Les hommes ont inventé le destin, afin de lui attribuer les désordres de l'univers, qu'ils ont pour devoir de gouverner. Point de fatalité ! La fatalité, c'est ce que nous voulons. Et c'est aussi, plus souvent, ce que nous ne voulons pas assez.  Qu'en ce moment, chacun de nous fasse son mea culpa ! Cette élite intellectuelle, ces Églises, ces partis ouvriers, n'ont pas voulu la guerre... Soit !... Qu'ont-ils fait pour l'empêcher ? Que font-ils pour l'atténuer ? Ils attisent l'incendie. Chacun y porte son fagot.

dimanche 13 novembre 2016

A.M. - Paysage du midi (1919)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'italien Amedeo Modigliani (1884-1920), figure majeure de la bohème montmartroise et de ce que faute de mieux on appelle l' École de Paris.
Peu studieux, Modigliani abandonne ses études à l'âge de 14 ans pour intégrer l'école des beaux-Arts de Livourne ; il y suit l'enseignement du peintre paysagiste Guglielmo Micheli, formé à l'école des Macchiaioli qui prônent la peinture sur le motif et s'opposent à l'académisme. Il découvre les grands courants artistiques, l'art toscan, la peinture de la Renaissance, et le préraphaélisme. Il passe ensuite un an à Florence en 1902, où il s'inscrit à l'École du nu de l'Académie des Beaux-Arts, dirigée par Giovanni Fattori, figure de proue des Macchiaioli.

A.M. - La route toscane (1898)
L'année suivante il fait de même à l'École du nu de l'Académie des Beaux-arts de Venise, où il reste trois ans. Déjà fasciné par les toscans du Trecento, il découvre les vénitiens qui leur succèdent, Le Tintoret, Titien, Véronèse..., mais aussi les impressionnistes, Cézanne, Toulouse-Lautrec, la période bleue de Picasso, Klimt, et les estampes d'Utamaro...
Modigliani arrive à Paris en 1906, où il mènera une vie de bohème marquée par la précarité et l'abus de drogue et d'alcool. Il peint presque uniquement des portraits et des nus, et sa production ne compte que quatre paysages : c'est cette part mineure de son oeuvre que je choisis de présenter aujourd'hui avec deux de ces tableaux.
À Montmartre et Montparnasse, il côtoie tous les artistes et écrivains de la bohème parisienne, ceux de la Ruche et ceux du Bateau-Lavoir, de Cendrars à Fernand Léger en passant par Radiguet et Foujita, mais ses amis les plus proches sont Utrillo et Soutine.
Rongé par l'alcool et la tuberculose, Modigliani meurt pauvre au seuil de la célébrité en 1920, à l'âge de 36 ans. Sa jeune compagne Jeanne Hébuterne, âgée de 22 ans seulement, mère de son enfant et enceinte du deuxième, se suicide deux jours après en se jetant par la fenêtre de l'appartement de ses parents qui l'avaient recueillie.

samedi 12 novembre 2016

photo Joël Saget/AFP

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Vu Paul Simon, au Royal Albert Hall de Londres, le 7 novembre avec mon fils. Et bien sûr, avant le concert, on s'est arrêtés pour manger un morceau au Garfunkel's de South Kensington. Obligé, non ? Après le concert on a discuté un bon moment aux abords du RAH avec Vincent Nguini, puis avec Mark Stewart que l'on a raccompagné à pied à son hôtel, en papotant tous les trois dans la rue quasi déserte. Souvenirs...

dimanche 6 novembre 2016

D. M. - Poster, Nakano (1990)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe japonais Daido Moriyama (b.1938). 
Il s'intéresse d'abord à la peinture, et ce n'est qu'en 1959, à l'âge de 21 ans, qu'il se tourne vers la photographie. En 1960 il devient à Osaka l'assistant de Takeji Iwamiya, étudie la photo de rue avec Seiryu Inoue, et devient l'année suivante l'assistant de Eiko Hosoe à Tokyo ; celui-ci est - avec Kikuji Kawada et Akira Sato -, l'un des co-fondateurs du collectif VIVO que Moriyama va donc rejoindre juste avant sa dissolution.
C'est une série sur la ville de Yokosuka, réalisée en 1965, qui va véritablement lancer sa carrière.

D. M. - Hunter serie (1972)
My photos are often out of focus, rough, streaky, warped, etc... For me, capturing what I feel with my body is more important than the technicalities of photography.

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samedi 5 novembre 2016

Une image et des mots. L'image, c'est cette couverture d'un épisode des aventures du Club des 5, de la très prolifique Enid Blyton. Ce groupe d'amis pré-adolescents à la morale exemplaire a accompagné toute mon enfance...
Et voici que j'apprends que depuis 2004 (ou 2006 je ne sais plus), l'oeuvre d'Enid Blyton - une oeuvre que des années 30 aux années 50 la BBC refuse de diffuser pour cause de "pauvreté littéraire" -  voit ses rééditions régulièrement "retravaillées" afin d'en expurger tout ce qui pour le jeune lecteur d'aujourd'hui pourrait paraître un peu trop compliqué. Exit par exemple le passé simple, au profit du passé composé... Mais aussi les phrases sont raccourcies, leur vocabulaire et leur syntaxe simplifiés.
Ainsi, ce qui il y a quelques décennies était  considéré, pour son indigence stylistique, comme de la mauvaise littérature enfantine, est aujourd'hui jugé d'une lecture trop difficile. Ça laisse rêveur...

Pour aller avec cette illustration, une célébration de l'amitié par Walt Whitman, extraite de Leaves of grass (1855)

In paths untrodden,
in the growths by margins of pond-waters,
[.....]
clear to me now standards not yet publish'd,
clear to me that my soul,
that the soul of the man I speak for rejoices in comrades...

[.....]
I proceed for all who are or have been young men,
to tell the secrets of my nights and days,
to celebrate the need of comrades.

***

Dans des sentiers  non frayés,
parmi les plantes qui poussent au bord des eaux stagnantes,
[.....]
claires sont pour moi aujourd'hui des valeurs non encore proclamées,
il est clair pour moi que mon âme,
que l'âme de l'homme au nom de qui je parle trouve sa joie en des camarades.
[.....]
J'entreprends, à l'intention de tous ceux qui sont
ou ont été de jeunes hommes,
de dire le secret de mes nuits et de mes jours,
de célébrer le besoin de camarades.

dimanche 30 octobre 2016

B. Buffet - Bouquet de marguerites (1957)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre et graveur expressionniste Bernard Buffet (1928-1999), que Maurice Druon appelait "le peintre tragique de la condition humaine".
Je ne peux pas dire que je suis amateur de ses clowns tristes et de ses paysages dépressifs ; affaire de goût. Mais j'aime assez certains tableaux, comme la plupart de ses marines, ou encore quelques vues de Paris, et bien sûr ceux que je choisis de présenter ici aujourd'hui.

B. B. - Saule pleureur sur la rivière (1961)
En 1943, à l'âge de 15 ans, il réussit le concours d'entrée à l'École des Beaux-Arts de Paris, où il intègre l'atelier d'Eugène Narbonne.
Il a à peine vingt ans quand il est au faîte de sa célébrité. "Ce garçon fait à vingt ans ce que je voudrais faire à mon âge" déclara un jour André Derain.
Céline, lorsqu'il fut question en 1952 d'une édition de grand luxe du Voyage au bout de la nuit, souhaitait que les illustrations lui fussent confiées. Malheureusement, le projet n'aboutit pas.

dimanche 23 octobre 2016

Jules Aarons - Paris (1950s)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Jules Aarons (1921-2008), natif du Bronx, à New York, dont il a abondamment documenté la vie populaire.
Diplômé de l'Université de Boston en 1949, il part en 1954 à Paris pour y compléter ses études et obtenir un Doctorat en Physique.

J. Aarons - Lounging, Brooklyn (1950s)






Spécialiste internationalement reconnu dans le domaine de la propagation des ondes radio, il s'adonne également à la photographie et son travail fait aujourd'hui partie des collections permanentes de grandes institutions comme la Bibliothèque Nationale de Paris, le Musée des Beaux Arts de Boston et le MoMA de New York.

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samedi 22 octobre 2016

Rembrandt - Adam et Eve au Paradis (1638)
Une image et des mots. La représentation du bien et du mal dans cette gravure de Rembrandt peut paraître surprenante : aux côtés d'Adam et Eve, dans les moments qui précèdent leur chute, il y a un dragon - image emphatique du serpent -, mais c'est un éléphant qui vient symboliser l'innocence et la chasteté. Il y a une explication.
Le "modèle" de Rembrandt, qui n'est jamais sorti de son pays, s'appelait Hansken. Cette éléphante d'Asie avait été introduite aux Pays-Bas où elle est devenue une attraction extrêmement populaire. Représentée au moins trois fois dans l'oeuvre de Rembrandt, elle a voyagé à pied en Europe du Danemark à l'Italie, et fut le premier éléphant d'Asie a être étudié par la science occidentale.

Les mots sont extraits du Tour du monde d'un sceptique, d'Aldous Huxley (1926).

Quand il (l'éléphant) émergea de l'enceinte du palais - j'évoque cet incident trivial et par trop banal parce qu'il suscita en moi des réflexions mélancoliques sur le cosmos - notre mastodonte s'arrêta et, avec sa gravité ordinaire, se soulagea monstrueusement. L'opération terminée, il avait à peine repris sa marche, qu'une vieille femme qui était restée plantée, dans l'expectative, à la porte d'une masure au milieu des ruines, et nous nous demandions pourquoi, se précipita d'un bond sur le tas d'excréments fumants. Il y avait là, je suppose, de quoi alimenter son feu pour la cuisine de toute une semaine. [.....]
Notre tremblement de terre reprit ses embardées. Je songeai aux douzaines de millions d'êtres humains pour lesquels le passage d'un éléphant diarrhéique semble un don de Dieu, un prodigieux coup de fortune. Cette idée me déprima. Pourquoi sommes-nous ici dix-huit cents millions d'hommes et de femmes, sur cette planète remarquable et peut-être unique? À quelle fin? Est-ce pour aller à la recherche du fumier - bouse de vache, crottin de cheval, excréments énormes et princiers des éléphants? C'est évidemment cela, pour bon nombre d'entre nous du moins. C'était là, pensai-je, une raison qui semblait mal appropriée à notre présence ici-bas, nous, âmes immortelles, cousins germains des anges, les propres frères de Bouddha, de Mozart, et de Sir Isaac Newton.

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dimanche 16 octobre 2016

A. Castro - Rien n'intéresse l'homme ... (2015)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'italien Alberto Castro (b.1973), photographe conceptuel.
Après des études en architecture à l'Université de Leeds puis à l'Université Polytechnique de Barcelone, il s'initie à la photographie en autodidacte pour aller, dit-il, à la recherche de la poésie qui nous entoure, en se concentrant sur le passage du temps et plus précisément sur le sens de l'éphémère et les transformations continues dont la vie de l'homme est parsemée.

A. C. - Numéro 4 (2014)






C'est cette idée que véhicule la série à laquelle appartient le premier cliché : Rien n'intéresse l'homme plus que l'homme.
L'homme d'aujourd'hui ingurgite des images et des informations en quantité massive, dont la plupart s'estompent et deviennent invisibles immédiatement après leur transmission, entraînant avec elles l'homme et son intérêt pour l'homme.
Je sais bien que dans l'art conceptuel l'idée est censée prévaloir sur la forme, mais c'est le plaisir esthétique - cette notion bourgeoise dont Adorno ne voulait pas entendre parler -, qui a dicté mon choix dans cette publication. Pour les mêmes raisons, j'aime beaucoup sa série intitulée Il suono del silenzio (une référence à la chanson de Simon & Garfunkel), réalisée en 2011 à Lucques, en Toscane.
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dimanche 9 octobre 2016

Tristram Hillier - The fisherman's chapel (1938)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'anglais Tristram Paul Hillier (1905-1983), membre du groupe d'artistes modernistes Unit One actif de 1933 à 1935 et mené par l'artiste protéiforme Paul Nash.
Formé à la Slade School of Fine Arts de Londres, il suit aussi les cours du soir de la Westminster School of Art. Puis il part à Paris, où il vivra jusqu'en 1940, pour y suivre à l'Académie Colarossi l'enseignement d'André Lhote, qui fera l'objet d'une prochaine publication.

T. H. - Flooded meadow (1949)

Dans la capitale il fait la connaissance de plusieurs membres du mouvement surréaliste, dont Giorgio de Chirico et Max Ernst qui vont particulièrement l'influencer.
Le monde surréaliste dans lequel nous invite la peinture de Tristram Hillier n'est étrange que d'une manière imperceptible, liée à une perspective inattendue, ou à la présence légèrement incongrue d'un objet abandonné - souvent à forte charge symbolique...
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dimanche 2 octobre 2016

F. Stein - Hole in the fence (1946)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe allemand Alfred Stein (1909-1967). Fils de rabbin né à Dresde, il y rejoint à l'âge de 16 ans les Jeunesses Socialistes. Sa thèse de doctorat en Droit, qu'il soutient à l'Université de Leipzig, est rejetée par les nazis, et en 1933 il se réfugie avec sa jeune épouse à Paris.
Ce sont ses clichés de la capitale française dans les années 30, où il documente les grèves et le Front Populaire, qui lui apporteront la renommée.

Fred Stein - NYC (1946)
Quand la guerre éclate, en 1939, il est interné dans un camp de la région parisienne mais parvient à s'en échapper. Parvenu à Marseille, il embarque sur un paquebot à destination de New York où il poursuit son oeuvre photographique, d'abord comme photographe de rue exalté par le cosmopolitisme de Big Apple, puis comme portraitiste d'intellectuels de qui il s'imposait de connaître l'oeuvre.
"Lorsque je croise quelqu'un, j'ai envie de connaître son histoire."

samedi 1 octobre 2016

Maynard Dixon - Forgotten man (1934)
Une image et des mots. L'image, ce tableau du californien Maynard Dixon. Les mots sont extraits d'un des livres qui, tous genres confondus, m'ont le plus profondément et durablement marqué, - si cette remarque présente quelque intérêt.

"[.....] Est-ce que tout ne tournait pas remarquablement mal ? Et de tous les côtés ! Un article en trois parties allait échouer pour le simple motif que je n'avais pas dans ma poche un bout de crayon de dix öre ! Et si je redescendais rue des Saules pour me faire rendre mon crayon ? Il me resterait encore le temps d'achever un bon morceau avant que le Parc fût rempli de promeneurs. Et puis tant de choses dépendaient de ce Traité de la connaissance philosophique, peut-être le bonheur de plusieurs hommes, on ne sait jamais."  Knut Hamsun, La faim (1890).
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dimanche 25 septembre 2016

A.S. - Above us (1890)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre australien Arthur Streeton (1867-1943). À la suite de Frederick McCubbin et de Tom Roberts (voir publication du 26 juin) - qui dit de sa peinture qu'elle est "emplie d'air et de lumière" -, il est une figure majeure de l' École impressionniste d'Heidelberg, un courant apparu à la fin du 19e siècle en réaction à la tradition picturale de l'époque victorienne.
Influencé par Turner, Streeton n'a fait que peu d'études artistiques, à l'exception des cours du soir qu'il a suivis de 1882 à 1887 à la National Gallery School, une institution privée fondée 15 ans auparavant et qui était alors la plus importante école d'art en Australie. Il y suit l'enseignement du peintre paysagiste suisse Louis Buvelot, dont l'apport à la peinture tient surtout à sa contribution à l'art australien en tant que mentor de certains membres de l'école de Heidelberg.

A.S. - Golden summer, Eaglemont
(1889)
Sa carrière prit son essor, cependant, après sa rencontre avec Tom Roberts ; avec lui, et avec Frederick McCubbin, il va peindre sur le motif les grands espaces australiens, leur chaleur et leur lumière... I sit here in the upper circle surrounded by copper and gold, and smile with joy under my fly net as all the light, glory, and quivering brightness passes slowly and freely before my eyes. Nothing happier than this. I shout and laugh at my immense wealth, all free and without responsibility. Who could steal this from me? No one.

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samedi 24 septembre 2016

Clarence Benjamin (1945)
Une image et des mots. Une photo prise par le Major Clarence Benjamin, au mois d'avril 1945, alors que les Alliés viennent d'intercepter un train de déportés en route vers les camps, et d'en libérer les occupants.

Pour aller avec, voici un extrait de Ouvrier et soldat, le récit autobiographique de Léon Bronchart (1896-1986) dont ce sera demain le 30ème anniversaire de la disparition.

Léon Bronchart
Le 31 octobre 1942, il est cheminot à Montauban.

"Quand, en attendant ma mise en tête, j'assiste à l'évolution d'une rame que l'on ajoute au train que je dois emmener.
Sur les marchepieds, des éléments de la Police d'État gardent les portières. J'effectue ma mise en tête et je m'enquiers auprès du sous-chef de gare de la raison d'un tel service d'ordre et de sécurité.
Il m'apprend que ce sont des internés politiques que l'on transfère d'Eysse à Saint-Pol-des-Jeaux. Aussitôt, ma détermination est prise, je refuse d'emmener le train.
Chef de gare, chef de dépôt, sous-chef de dépôt, inspecteur viennent au pied de la machine discuter avec moi : malgré les conseils, les objurgations, les sommations, les menaces, j'ai continué à refuser; quand j'en ai eu assez, j'ai coupé moi-même la machine, et avancé auprès du mat. Rentré au dépôt, je me suis rendu au bureau du chef de dépôt, au sous-chef j'ai dit: "Si vous voulez, faites venir un médecin pour qu'il puisse constater que je ne suis ni fou ni ivre".


Léon Bronchart a reçu en 1994 le titre de Juste parmi les nations. Il est le seul cheminot a avoir refusé de conduire un train de prisonniers.