In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 30 décembre 2018

A. Adams - Half Dome (1940)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés d'Ansel Adams (1902-1984) qui a déjà, en avril 2010, fait l'objet d'une publication dans laquelle j'évoquais le cliché ci-dessous. Pour l'anecdote, trois mois plus tard, le 27 juillet, une série de soixante-cinq plaques photographiques achetées pour 45 dollars dans une brocante californienne lui sont attribuées et estimées à plus de 200 millions (source AFP 28 juillet 2010).
Dans l’histoire de la conservation aux États-Unis, peu de figures ont consacré autant d’énergie qu’Ansel Adams à la défense des paysages naturels et à la diffusion de l’idée de « wilderness », de nature sauvage.

A.A. - Clearing winter storm (1937)
Pour lui, la nature incarnait une expérience spirituelle, presque mystique, qui dépassait la simple contemplation.
Ses photographies ont éveillé chez ses contemporains à la fois émerveillement et conscience de la fragilité des derniers territoires vierges. En associant rigueur esthétique et militantisme, Adams a démontré que la photographie pouvait être à la fois une forme d’expression artistique majeure et un instrument décisif pour la protection de l’environnement. Cet impact, à la fois émotionnel et intellectuel, demeure aujourd’hui l’une des dimensions les plus marquantes de son œuvre et de son héritage.

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dimanche 23 décembre 2018

H. Sohlberg - Street in Roros (1902)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre et aquarelliste norvégien Harald Sohlberg (1860-1935). Formé à l'École des arts et métiers de Christiania (aujourd'hui Oslo), puis à l'Académie royale des beaux-arts de Stockholm, il occupe une place importante dans l'art norvégien du début du XXème siècle.

H.S. - Winter night in Rondane
(1914)
Son oeuvre, qui s'inscrit dans le courant néoromantique, est marquée par ses représentations presque métaphoriques de la nature, d'une poésie souvent empreinte de symbolisme.
Son tableau Nuit d'hiver à Rondane  en est un exemple : décliné en plusieurs versions avec des techniques différentes - la plus célèbre est celle-ci, peinte en 1914 et conservée à la Nasjonalgalleriet d'Oslo - il montre comment Sohlberg sait mêler précision naturaliste et atmosphère onirique. Chaque nuance crée une sensation de silence et de mystère ; elle révèle l’âme des paysages norvégiens avec cette profondeur poétique qui toujours traverse son œuvre.
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dimanche 16 décembre 2018

Isaac Cordal - Cement eclipses, NY (2015)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'artiste espagnol Isaac Cordal (b.1974), présenté ici au mois d'octobre dernier.
D'abord formé à l'Université des beaux-arts de Pontevedra, en Galice d'où il est originaire, il a ensuite étudié au College of Arts de Camberwell, à Londres.

I.C. - Cement eclipses, NY (2015)
Depuis 2013, il installe ses minuscules personnages en béton dans les rues des grandes métropoles pour dénoncer leur inhumanité : ICI. Son travail, à la fois poétique et critique, met en lumière la condition humaine dans les sociétés contemporaines, confrontée à l’isolement, à la surveillance, au stress et à la passivité. Ces micro-mises en scène, photographiées par l’artiste, offrent un regard ironique et lucide sur l’urbanité et les dérives de notre société ; elles font du paysage quotidien un véritable terrain de réflexion sur nos habitudes et nos responsabilités collectives.
Les deux clichés présentés ici ont été réalisés à New York en 2015 et font partie du projet Cement Eclipses, qui a contribué à sa renommée... In the concrete jungle of life, I sculpt moments of reflection to remind us of our collective journey, challenging the monotony of our urban existence.

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samedi 15 décembre 2018

Louis Soutter - Le Noël du réprouvé (1937)

Une image et des mots. L'image c'est cette encre du suisse Louis Soutter (1871-1942), et les mots pour l'accompagner sont de Fontenelle (1657-1757) :

"Tous les hommes se ressemblent si fort qu'il n'y a point de peuples dont les sottises ne doivent nous faire trembler".

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dimanche 9 décembre 2018

Miroslav Tichý - Untitled

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du tchèque Miroslav Tichý (1926-2011), artiste hors normes et figure singulière de la photographie marginale du XXᵉ siècle. Originaire de la Moravie du Sud et formé à l'Académie des beaux-arts de Prague, il se consacre d’abord à la peinture avant de se tourner, dans les années 1970, vers la photographie.
Les peintures étaient peintes, les dessins dessinés. Qu’avais-je à faire ? Je cherchais un autre moyen. Avec la photographie, j’ai trouvé quelque chose de nouveau, un nouveau monde.

M. Tichý - Untitled
Ses clichés, flous, tremblés, imparfaits, ont longtemps suscité débats et polémiques, notamment autour de la frontière entre voyeurisme et geste artistique. Mais au-delà de cette démarche, ce qui frappe, c’est l’effet étrange, intime et mystérieux de ses images, qui ouvrent une vision poétique et inédite de la banalité quotidienne... Et c'est la raison pour laquelle je choisis de faire figurer Miroslav Tichý dans ce blog.

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dimanche 2 décembre 2018

Anders Andersen-Lunby
Coucher de soleil en hiver (1882)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre paysagiste danois Anders Andersen-Lundby (1841-1923). Originaire du village de Lundby, près d’Aalborg, il se forme en autodidacte, en observant la nature et en copiant les maîtres exposés à Copenhague. Contrairement à nombre de ses contemporains, il ne suit pas l’enseignement académique de l’Académie royale des beaux-arts, mais s’intègre très tôt aux cercles paysagistes danois. En 1876, il s’installe à Munich, alors centre artistique majeur qui attirait de nombreux peintres d’Europe du Nord. Son style reste marqué par la tradition naturaliste héritée de l’école danoise de paysage (Eckersberg, P.C. Skovgaard, Johan Thomas Lundbye), tout en s’inscrivant dans le réalisme poétique cultivé par la colonie artistique munichoise, sensible aux atmosphères hivernales et aux scènes rurales.
A. A-L. - Forêt en hiver (1890s)

À une époque où la restitution fidèle et sensible des paysages constituait l’idéal des artistes scandinaves, Andersen-Lundby s’est distingué par ses scènes d’hiver. Par leur simplicité lyrique et leur délicatesse atmosphérique, elles comptent parmi les plus belles évocations de la nature nordique et lui valent une place de choix dans l’histoire de la peinture danoise.
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samedi 1 décembre 2018

Edward S. Curtis - Eclipse dance (c.1910)
Une image et des mots. Une photo d'indiens Kwakiutl exécutant la danse de l'éclipse (c.1910), prise par l'ethnologue américain Edward Sheriff Curtis (1868-1952). Les mots sont de Walt Whitman, extraits de "Leaves of grass" (Feuilles d'herbes).

You air that serves me with breath to speak !
You objects that call from diffusion my meanings and give them shape !
You light that wraps me and all things in delicate equable showers !
You paths worn in the irregular hollows by the roadsides !
I believe you are latent with unseen existences, you are so dear to me.

***

Toi, air qui me fournis le souffle pour que je parle !
Vous, objets, qui empêchez mes pensées de se disperser et qui leur donnez forme !
Toi, lumière, qui m’enveloppes, moi et toutes choses, dans ton flot délicat et égal pour tous !
Vous, sentiers tracés par les pas dans les creux irréguliers au bord des routes !
Je crois que vous êtes secrètement chargés d’existences invisibles, vous m’êtes si chers.

PG7
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dimanche 25 novembre 2018

W.E. Smith - Pride Street, Pittsburgh
(1955)

Le vide-grenier du dimanche. Deux autres clichés du photographe américain W. Eugene Smith, déjà présenté en janvier 2010, maître incontesté de l’essai photographique. Après avoir quitté Life en 1954, il poursuit son travail au sein de l’agence Magnum puis de manière indépendante, élaborant ces grands récits visuels qui feront école. Qu’il s’agisse du médecin de campagne dans le Colorado (1948), des habitants d’un village espagnol (1951), du monumental projet Pittsburgh (1955-58) ou de son ultime combat aux côtés des victimes de la pollution au mercure à Minamata (années 1970), Smith a toujours cherché à donner une forme narrative et profondément humaine à ses images.

W.E.S. - Dream Street, Pittsburgh
(1955)
Perfectionniste à l’extrême, parfois jusqu’à l’obsession, il travaillait ses planches contact comme un écrivain travaille son manuscrit, convaincu que la photographie devait transmettre la vérité d’une expérience vécue. Ses séries comptent parmi les sommets du photojournalisme du XXᵉ siècle : un témoignage autant qu’une œuvre d’art, où l’engagement et la poésie visuelle se rejoignent. A photo is a small voice, at best, but sometimes - just sometimes -, one photograph or a group of them can lure our senses into awareness. Much depends upon the viewer; in some, photographs can summon enough emotion to be a catalyst to thought.

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dimanche 18 novembre 2018

A.G. - London flower girl (1892)
Le vide-grenier du dimanche. Deux nouvelles oeuvres du peintre et aquarelliste anglais Albert Goodwin (1845-1932), déjà présenté ici en août 2009. Son travail témoigne pleinement de l’influence de J.M.W. Turner – on pense à des toiles comme The Shrimper, où la silhouette du pêcheur se fond presque dans l’eau, Venice, ou encore Westminster Sunset, que j’avais évoquée lors de la première publication – et des sept membres de la Confrérie préraphaélite, dont il s’inspire pour la finesse du détail et la luminosité.
A.G. - Winchelsea, East Sussex (n.d)

Pour cette seconde sélection, j’ai choisi deux toiles bien différentes, et pas seulement pour des raisons esthétiques, même si leur beauté m’a évidemment séduite. La première me fait penser à My Fair Lady de George Cukor (1964), adaptation de la pièce de George Bernard Shaw. Le film raconte l’histoire d’Eliza Doolittle, petite marchande de fleurs à Covent Garden, jouée par Audrey Hepburn, dont les robes ont été conçues par Cecil Beaton – et l’on retrouve dans cette aquarelle de Goodwin la même grâce délicate, cette capacité à saisir un moment fugace avec élégance et légèreté.
Le second tableau me rappelle The Compleat Angler du bon Izaak Walton, que j'ai la chance de posséder dans une très jolie édition et dans lequel il est dit cette chose merveilleuse que " les rivières et leurs hôtes sont là pour que les sages les contemplent et que les fous les ignorent."
Goodwin, par sa maîtrise de l’aquarelle, nous offre ce même cadeau : un instant suspendu, une nature à la fois minutieusement observée et poétiquement restituée, qui invite à la contemplation et à la rêverie.
JM1
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samedi 17 novembre 2018

Frank Hurley, WW1 western front (1918)
Une image et des mots.
Lavendange. - Et ils ont déménagé pourquoi, les dieux?
Hermès. - Les Grecs leur ont tapé sur les nerfs; alors ici, à leur place à eux, ils ont installé la Guerre, en vous abandonnant à elle, pour qu'elle vous traite... c'est bien simple; à sa discrétion. Et eux, ils ont déménagé aussi haut qu'ils ont pu, pour ne plus vous voir batailler, et être hors de portée de vos jérémiades.
Lavendange. - Et pourquoi est-ce qu'ils nous ont fait ce coup-là, dis-moi?
Hermès. - Parce que vous avez préféré la guerre, en tant d'occasions où ils essayaient de vous réconcilier.
Aristophane, La Paix.
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dimanche 11 novembre 2018

Otto Dix - Les joueurs de skat (1920)
Le vide-grenier du dimanche. En ce 100ème anniversaire de l'armistice de la Grande Guerre, deux oeuvres du peintre expressionniste allemand Otto Dix (1891-1969), figure majeure de la Nouvelle Objectivité, et qualifié d’« artiste dégénéré » par les nazis.
Formé à l’École des Arts et Métiers de Dresde puis à l’Académie des Beaux-Arts de la même ville, Dix s’imprègne des maîtres classiques et de l’expressionnisme avant d’adopter un réalisme incisif. Son expérience comme soldat pendant la Première Guerre mondiale marque profondément son regard : il traduit dans ses tableaux et dans ses gravures la violence, la souffrance et l’absurdité du conflit, mais aussi les fractures sociales et morales de la République de Weimar.

O.D. - Flandres (c.1935)
Ses portraits, scènes de cabaret, paysages urbains et compositions macabres témoignent d’une observation acérée de l’homme et de la société. Alliant rigueur technique et provocation, il dénonce la décadence, la misère et la superficialité des élites, dans un engagement artistique sans concession.
Sans doute on n’admire pas ses toiles pour leur « beauté », mais pour l’empreinte indélébile des horreurs qu’elles portent.
Le premier tableau montre des « gueules cassées » : des anciens combattants amputés dont les visages sont partiellement reconstruits par des prothèses métalliques. Le second, Flandres, s’inspire à la fois du roman Le Feu d’Henri Barbusse - qui décrit des soldats réveillés parmi les noyés dans les tranchées inondées - et du retable d’Issenheim de Grünewald, peint au XVIᵉ siècle.
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dimanche 4 novembre 2018

Mark Broyer - série What's the fog

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe et artiste visuel allemand Mark Broyer (b.1979).
D'abord investi dans des projets musicaux qui vont s'avérer infructueux, et après l'abandon desquels il découvrira avec enthousiasme l'exposition America by car consacrée à Lee Friedlander (voir oct. 2008) c'est avec la photographie qu'il va trouver un nouveau moyen d'expression. "Fais n'importe quoi, mais tires-en de la joie", disait Henry Miller.

M.B. - série After hours (2017)
Ses photos, souvent prises à Hambourg, Berlin ou dans des métropoles d’Asie, sont presque vides de personnages ou peuplées de silhouettes anonymes. Mark Broyer combine ensuite la photographie traditionnelle avec des éléments numériques et expérimentaux - des procédés qu'il met aussi volontiers en oeuvre dans ses activités parallèles de photographie commerciale - , et il se dégage de ses images une poésie du vide et une mélancolie cinématographique qui peut évoquer parfois l’esthétique de Wong Kar-wai ou d’Edward Hopper.

ZU2

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samedi 3 novembre 2018

E. van de Velde - Baleine échouée (c.1617)
Une image et des mots. Le titre complet de ce tableau du peintre et aquafortiste néerlandais Esaias van de Velde (1587-1630) est "Baleine échouée sur la plage de Scheveningen". Je soupçonne Paul Gadenne d'avoir eu connaissance de cette oeuvre, lui qui a écrit - entre autres nouvelles et romans -, "Baleine" et "La plage de Scheveningen".

Cette baleine nous paraissait être la dernière ; comme chaque homme dont la vie s'éteint semble être le dernier homme. Sa vue nous projetait hors du temps, hors de cette terre absurde qui dans le fracas des explosions semblait courir vers sa dernière aventure.
Nous avions cru ne voir qu'une bête ensablée ; nous contemplions une planète morte.
Paul Gadenne, Baleine (1949).
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dimanche 28 octobre 2018

Marek Piasecki - Sans titre (1961)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe polonais Marek Piasecki (b.1935).Né à Varsovie, il grandit dans le traumatisme de la guerre avant de s’installer à Cracovie après l’insurrection de 1944. Très tôt attiré par le dessin et la peinture, il découvre la photographie en autodidacte, et s’y consacre pleinement après une arrestation politique qui interrompt ses études.

M.P. - Sans titre (1960)

Dans la Pologne des années 1950 marquée par le réalisme socialiste, Piasecki suit sa propre voie. Proche du poète Miron Białoszewski et membre du Second Groupe de Cracovie à partir de 1958, il expose régulièrement et pratique à la fois un documentaire inspiré par le néoréalisme italien - ce « noir réalisme » des rues grises de l’après-guerre - et une recherche expérimentale radicale : des photogrammes qu’il appelait héliographies, « peintures chimiques » mêlant lumière et chimie. Il crée aussi des assemblages en boîtes, souvent emplies de poupées disloquées, métaphores troublantes de l’oppression et de la vulnérabilité du corps humain, héritées de ses souvenirs de guerre. Ces univers miniatures, qu’il photographie lui-même, traduisent cette « esthétique du confinement » analysée par Margaret Iversen : la volonté de préserver ce qui menace de disparaître. Installé en Suède en 1967, il poursuit ce travail singulier, entre poésie du réel et univers miniatures.
Dans son ouvage Foto-constellations - Autour de Marek Piasecki, le philosophe Pawel Moscicki écrit ceci : "Marek Pisecki a embrassé la photographie de manière obsessionnelle et sans aucune orthodoxie professionnelle, comme s'il voulait voir un mystère plus profond sous ses apparences.." Redécouvert tardivement, il fait aujourd’hui partie des collections du MoMA et des musées nationaux de Varsovie et de Cracovie.

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dimanche 21 octobre 2018

Charles Bell - The ultimate gumball (1981)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre hyperréaliste américain Charles Bell (1935-1995). Né à Tulsa, il s’installe à New York en 1967 après un passage par San Francisco, où il se forme auprès de Donald Timothy Flores. Il disait aussi avoir été influencé par le Pop-art et par Vermeer.

C.B. - Tropical nights (1991)
Loin des paysages urbains et des automobiles des hyperréalistes de la Côte Ouest, le New Yorkais Charles Bell s'est fait une spécialité des natures mortes : machines à billes, billards électriques, poupées, Bell magnifie ces sujets ordinaires dans des compositions d’une qualité quasi photographique, en jouant sur la lumière, les reflets et les textures avec une virtuosité technique exceptionnelle. Présenté dans des institutions telles que le Metropolitan Museum, le Guggenheim et le Smithsonian American Art Museum, le travail de Charles Bell a influencé plusieurs générations d’artistes.
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samedi 20 octobre 2018

Isaac Cordal - Cement eclipse (2013)

Une image et des mots. Une oeuvre d'Isaac Cordal, sur qui je reviendrai très bientôt.
Les mots sont de Céline, extraits de Voyage au bout de la nuit (1932).

J'avais pas le culot de leur dire pendant le jour, quand j'étais en face d'eux, mais d'où j'étais je ne risquais rien, je leur ai crié "Au secours ! Au secours !", rien que pour voir si ça leur ferait quelque chose. Rien que ça leur faisait. Ils poussaient la vie et la nuit et le jour devant eux les hommes.
Elle leur cache tout la vie aux hommes. Dans le bruit d'eux-mêmes ils n'entendent rien. Ils s'en foutent. Et plus la ville est grande et plus elle est haute et plus ils s'en foutent. Je vous le dis moi. J'ai essayé. C'est pas la peine.

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dimanche 14 octobre 2018

Raphael Soyer - Café scene (1940)

Le vide-grenier du dimanche. Deux œuvres du peintre, dessinateur et graveur américain d’origine russe Raphael Soyer (1899-1987), connu pour son regard humaniste sur la vie urbaine new-yorkaise. Né à Borisoglebsk en Russie, il émigre avec sa famille en 1912 et s’installe dans le Bronx. Formé à la Cooper Union, à la National Academy of Design puis à l’Art Students League, il étudie auprès de Guy Pène du Bois et Boardman Robinson, adoptant une sensibilité proche de l’Ashcan School, tournée vers la représentation de la vie moderne et des classes populaires.
"If art is to survive, it must describe and express people."
R.S. - Annunciation (1980)




Tout au long de sa carrière, Soyer peint les hommes et les femmes dans des cadres quotidiens – rues, métros, ateliers ou appartements modestes. Portraits, nus et scènes de genre traduisent une profonde empathie pour ses modèles. Membre de la Fourteenth Street School, il expose dans les grands musées américains et enseigne à la Art Students League et à la New School for Social Research.
Rattaché à la American Scene, Soyer incarne le versant social-réaliste du mouvement, centré sur les réalités urbaines. Mais à la différence du Régionalisme tourné vers l’Amérique rurale, son réalisme demeure intimiste et psychologique : il donne une dignité aux anonymes de New York et capte la mélancolie comme la résilience de la vie moderne.
On peut admirer le premier tableau au Brookklyn Museum, à New York. Le second, au titre biblique, est conservé au Smithsonian American Art Museum de Washington. Quarante ans les séparent.

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dimanche 7 octobre 2018

Phil Bergerson - NY (2001)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du canadien Phil Bergerson (b.1947), déjà présenté ici en décembre 2013.
Formé à la gravure avant de se tourner vers la photographie dans les années 1970, Bergerson s’est imposé comme un arpenteur patient des États-Unis, où il a multiplié les voyages pendant plus de trois décennies. Dans ses séries rassemblées notamment dans Shards of America ou American Artifacts, il compose un portrait fragmentaire de la société américaine à travers ses signes : vitrines défraîchies, murs griffonnés, pancartes délavées, objets oubliés. 

P.B. - Untitled (2010)
Comme Walker Evans ou Robert Frank avant lui, Bergerson construit une vision indirecte de l’Amérique, où l’absence d’hommes et de femmes est contrebalancée par la présence insistante des traces qu’ils laissent sur les panneaux décrépis, les graffitis malhabiles et les enseignes vieillottes. Il y a dans cette approche un mélange d’ironie et de tendresse, un regard critique mais jamais cynique, qui révèle à la fois la vitalité et la fragilité d’un rêve américain fissuré. Ce rêve, on en cherche parfois le reflet dans les vitrines les plus modestes, ou bien, comme ici, dans un trompe-l’œil qui recouvre de ciel céruléen des façades aveugles. Mais après tout, comme le rappelait Picasso, « l’art est un mensonge qui dit la vérité ». Chaque photographie de Bergerson, en apparence modeste, devient ainsi un fragment d’une vaste chronique visuelle de la condition humaine.

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samedi 6 octobre 2018

Jules Bastien-Lepage - Saison d'octobre (1878)
Une image et des mots. Je reviens cette semaine à la peinture de la vie paysanne; c'est un sujet qui me plaît beaucoup.. Je ne crois pas avoir déjà publié ici de tableau de Jules Bastien-Lepage, et donc voici Saison d'octobre (1878).
Pour l'accompagner, les mots sont de Jacinta Ortiz Mesa, "la Tilli", une paysanne andalouse qui a publié à plus de 70 ans deux petits recueils de poésie (non traduits en français).
Comme elle ne sait ni lire ni écrire, elle a dicté ses poèmes à une enseignante de son village.
Juste des mots simples et sincères qui auraient peut-être ému un autre andalou amoureux de la terre, Garcia Lorca, ou inspiré une chanson à Victor Jara....

Yo no me quiero acordar ni la memoria me alcanza, para tanta calamidad, como yo pasé en mi infancia. Cuando tenía seis años me ponen a trabajar, guardando cerdos y cabras y pavos para empatar.
Si conocen lo que digo, los cerdos se despistaban, las cabras comían los olivos y los pavos que no andaban.
¡Ni con la ayuda de Dios, señores, yo los juntaba!
Con muchísimo trabajo y muy poca libertad yo llegué a los quince años ¡no lo quiero ni pensar!
Cuando a los quince llegué ya los niños me gustaban, pero era yo tan fea que nadie me decía nada.
¡Por fin! ya llegó ese día, que uno me dijo te quiero yo le dije: y yo a ti contesté pronto y ligero.
Era el hombre de mi vida, el que se sentó a mi lado, que yo, viva como viva, a ese nunca lo he olvidado.
Pero poquito duró eso bueno de mi vida, el diablo se atravesó y volví a pasar fatiga.
Se perdió un ángel en el cielo que por eso Dios bajó y cuando lo vio tan bueno al cielo se lo llevó.
Menores de once años me quedaron cinco niños, un montón de trabajo y ni una pizca de cariño.
Era un cuadro gigante lo que en mi casa quedó, había que seguir pa' alante y tenía que hacerlo yo,
De día yo trabajaba y por la noche cosía, pues lo que a mí me pasaba era que poco dormía.
Yo muy poquito dormía, muy poquito descansaba, pero con todo ese esfuerzo y con la ayuda de Dios nunca nos faltó de nada.
Lo malo que les he hecho es hacerles trabajar , pa que fuesen de provecho y apretaran a estudiar.
Ya se me hicieron mayores y ahí está el resultado, todos son trabajadores y todos se han colocado:
uno se hizo tractorista, y el otro fue camionero, la chica rompió por contable, y otro se me hizo banquero, y la más grande de todos plancha para el mundo entero. Me ha llegado la vejez y ahora tengo esa alegría, los veo a todos trabajar que era lo que yo quería. ¡Qué bonito es vivir! cuando la vida es buena. ¡Qué bonito es vivir! si la vives sin pena, ¡Qué bonito es vivir! la salud es lo primero
¡Qué bonito es vivir! Se lo digo al mundo entero.

Ganjifa moghol Le vide-grenier du dimanche. Deux Ganjifas , ces cartes d’un jeu ancien, originaire de Perse, qui a pris toute sa richesse en...