In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
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dimanche 25 décembre 2022

Anton Pieck
Le vide-grenier du dimanche. Deux œuvres du peintre et illustrateur néerlandais Anton Pieck (1895–1987).
Son univers, imaginaire et familier à la fois, est fait d'images aux couleurs douces, d'aimables scènes d'une vie quotidienne idéalisée. Inspirées de l'Europe ancienne, elles semblent venues d’un autre temps - ruelles pavées, vitrines d'autrefois, marchés enneigés, artisans penchés sur leur ouvrage. C'est un monde de lenteur et de paix où - comme l'aurait dit Bachelard -, "une lueur d'éternité descend sur la beauté du monde".
 
A.Pieck - Gebakkraam
Formé au dessin académique, Pieck commence comme professeur d’art avant de se consacrer à l’illustration. 
Il met d'abord son trait précis au service des classiques - Gulliver, les frères Grimm -, et dès les années 1920 il développe un style immédiatement reconnaissable : minutieux, chaleureux, doucement mélancolique, mais bien ancré dans l'histoire populaire.
Ce sont les images merveilleuses - dont on goûte chaque détail - des beaux livres de contes pour enfants qui se feuillettent avec eux devant la flambée. Mais quelle heure est-il à l’horloge du grand beffroi ? Et qui, en France, éditera enfin l’œuvre féerique d’Anton Pieck ?

TC1
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samedi 24 décembre 2022

VC Ferry - New York (2013)
Une image et des mots. Un cliché du photographe new-yorkais VC Ferry, déjà présenté ici en octobre dernier. Les mots pour l'accompagner sont un poème de Bukowski, The laughing heart.

your life is your life
don't let it be clubbed in dank submission.
be on the watch.
there are ways out.
there is light somewhere.
it may not be much light but
it beats the darkness.
be on the watch.
the gods will offer you chances.
know them,
take them.
you can't beat death but
you can beat death in life, sometimes,
and the more often you learn to do it,
the more light there will be.
your life is your life.
know it while you have it.
You are marvelous
the gods wait to delight 
in you.
HB3

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dimanche 18 décembre 2022

LS Lowry - The old house, Grove Street, Salford
(1948)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Laurence Stephen Lowry (1887-1976), déjà présenté en mai 2020, et qui fut à la Manchester School of Art l'élève du peintre impressionniste français Adolphe Valette.

LS.L.- The football match (1949)








"I'm fed up with painting" disait-il en 1966, à l'âge de 79 ans
"J'en ai marre de peindre"... 
Et plus loin.. " J'aurais dû m'arrêter en 1948 mais on ne m'a pas laissé.. On me demandait plus de tableaux.. Je n'ai jamais recherché ce qu'on appelle le succès, il n'y a pas d'argent avec la peinture, le percepteur prend tout ". C'est assez ironique, quand on sait que The football match a été adjugé pour £5,6 millions en 2011.

MS1
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dimanche 11 décembre 2022

Fred Stein - Embrace, Paris (1934)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain d'origine allemande Fred Stein (1909-1967), déjà présenté ici en octobre 2016. Reconnu pour ses portraits saisissants de nombreuses personnalités intellectuelles et artistiques du XXe siècle comme Albert Einstein, Hannah Arendt, Marc Chagall, ou Marlene Dietrich, il parvenait avec son sens aigu de l'observation et de l'empathie à capturer l’essence de ses sujets, en montrant à la fois leur humanité et leur stature intellectuelle.

F.S. - Manhattan Skyline (1946)
Mais voici ici une autre facette de son art : deux photographies poétiques de Paris et de New York. Fred Stein, qui a dû fuir l’Allemagne nazie en raison de ses origines juives et de son engagement politique, est aujourd'hui considéré comme un pionnier de la photographie de rue et un maître du portrait en noir et blanc.
FL2

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dimanche 4 décembre 2022

O. Ring - Canal Frederiksholms, Copenhague
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre danois Ole Ring (1902-1972), troisième enfant de Laurits Andersen Ring que j'ai présenté ici en juin 2017. Principalement connu pour ses paysages ruraux et ses scènes de village qui restituent la sérénité et l’authenticité de la campagne danoise, il fait partie d'une tradition de peintres scandinaves qui privilégient les scènes naturalistes et la beauté des paysages locaux, en s'attachant à retranscrire l'atmosphère et les changements subtils de lumière caractéristiques des saisons nordiques.

O. Ring - Sakskøbing (1963)
Bien que moins célèbre que son père, Ole Ring est toutefois très apprécié pour la délicatesse de son travail et sa contribution à la peinture de paysage danoise. Son œuvre offre un regard profondément ancré dans le patrimoine rural du Danemark, et il reste une figure respectée dans l’art scandinave du XXe siècle pour son talent à immortaliser le charme simple et l’authenticité de la vie campagnarde.

samedi 3 décembre 2022

Simone Weil (1922)
Une image et des mots. Je feuillette La condition ouvrière, de Simone Weil, ce petit ouvrage publié en 1951 où elle relate sa vie de manoeuvre chez Alsthom, puis aux Forges de Basse-Indre et enfin chez Renault. Je relis les lignes poignantes qu'elle y consacre à la grève des ouvrières métallos de juin 1936, et les anecdotes qu'elle y évoque... 
Une bonne camarade, affectueuse, qu'on interroge sur sa famille.
"Vous avez des gosses ?
- Non, heureusement.. C'est-à-dire j'en avais un, mais il est mort."
Elle parle d'un mari malade, qu'elle a eu huit ans à sa charge. "Il est mort, heureusement...". C'est beau les sentiments. Mais la vie est trop dure...

Alors j'ai pensé à cette photo d'elle, que j'aime beaucoup ; c'est encore une écolière, elle n'a pas encore écrit La pesanteur et la grâce. Elle a été prise en Belgique, à Knotte le Zoute, et à côté d'elle (je l'ai recadrée), il y a son frère André, futur grand mathématicien co-fondateur du groupe Bourbaki.
Et pour aller avec, voici quelques lignes de Patti Smith, en pèlerinage au petit cimetière d'Ashford, dans le Kent, où elle cherche la tombe de Simone Weil pour s'y recueillir..

J'ai senti sa main qui me guidait. Sur ma droite se trouvait un secteur boisé qui semblait m'appeler. Soudain je me suis arrêtée. Je sentais l'odeur de la terre. Il y avait des alouettes et des moineaux, un trait de lumière est apparu, puis à disparu. J'ai tourné la tête sans pose exaltée et l'ai trouvée, dans toute sa grâce modeste. J'ai déplié le soufflet de mon appareil, réglé l'objectif puis pris quelques photos. Tandis que je m'agenouillais pour placer le petit bouquet de lavande sous son nom, des mots se sont formés, cabriolant comme une comptine. Je me suis sentie inexorablement en paix. La pluie s'est dissipée. Mes chaussures étaient tachées de boue. Il y avait une absence de lumière, mais pas d'amour.
Patti Smith, Dévotion (2018).

dimanche 27 novembre 2022

Eyvind Earle - Path in the snow

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre, et poète, américain Eyvind Earle (1916-2000), déjà présenté ici en mai 2020.

E. Earle - Untitled

For 70 years, I've painted paintings, and I'm constantly and everlastingly overwhelmed at the stupendous infinity of Nature. Wherever I turn and look, there I see creation. Art is creating... Art is the search for truth. Et encore : Beauty is the thing we are all searching for...Whatever beauty is, I feel it, and as long as I can I shall try to find more and more beauty, and to put it down so others can see what I have seen.

samedi 26 novembre 2022

Anonyme
Une image et des mots. Une belle photographie, dont je ne connais pas l'origine, et qui nous invite à céder à la tentation d'un irrésistible croque-monsieur. Pour l'accompagner, quelques lignes d'Alexandre Vialatte, issues de l'une de ses chroniques réunies dans le recueil Antiquité du grand chosier (1984).

La femme remonte à la plus haute antiquité. Phorcypeute l'Énumérateur la cite déjà dans ses ouvrages.
Le vicomte Amable de Vieuval fait mention d'elle avec vivacité et Casanova ne la raconte qu'avec la plus grande affection. Elle a su provoquer le lyrisme d'Hermogène le guttural et de Chyme l'Environnaire. Horace la vante et Pétrarque l'exalte, le docteur Gaucher l'étudie.
C'est l'effet de sa grande importance, car elle joue un rôle capital dans la suite des générations et le déroulement même de l'Histoire.

PG9

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dimanche 20 novembre 2022

K.H. - Trois femmes à la fenêtre (1939)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Karl Hofer (1878-1955), l'un des représentants majeurs de l'expressionnisme et de l'art figuratif en Allemagne au début du XXe siècle. Son style introspectif et expressif, souvent dramatique, rend compte des bouleversements sociaux et des tensions psychologiques de son époque.
Né à Fribourg-en-Brisgau, Hofer étudie à l’Académie des beaux-arts de Munich, puis à Karlsruhe. Très tôt, il s’intéresse aux recherches européennes de son temps : le fauvisme, le cubisme, le symbolisme, et l’œuvre d’Edvard Munch, qui marquera durablement sa sensibilité.
K.H. - Sans emploi (1932)

Bien qu’il ne soit pas directement affilié au groupe Die Brücke, son travail s’inscrit dans la mouvance expressionniste. Il donne à la figure humaine une intensité psychologique rare, en jouant de couleurs profondes et de formes tendues qui traduisent la fragilité de l’individu face à son monde.
Ses portraits et scènes de la vie quotidienne dégagent un sentiment de solitude et de gravité, comme s’il cherchait à saisir ce qu’il reste d’humain dans les temps troublés.
Sous le régime nazi, son œuvre est qualifiée de « dégénérée ». Il est écarté de ses fonctions, plusieurs de ses toiles sont détruites. Après la guerre, il reprend l’enseignement à l’Académie des beaux-arts de Berlin, où il devient une figure morale et artistique importante. 
Dans toute son œuvre, Karl Hofer interroge la condition humaine avec pudeur et intensité. Il n’explique rien, il montre : des visages clos, des corps repliés, des silences lourds.
Et c’est sans doute cette retenue, mêlée d’inquiétude, qui rend encore aujourd’hui sa peinture si proche de ceux qu’occupent les complexités de l’âme.

dimanche 13 novembre 2022

Y. Ogawa - Untitled (1998)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe japonais Yasuhiro Ogawa (b.1968).
Né à Kanagawa, il découvre la photographie à la fin de son adolescence, inspiré par les récits de voyage et la solitude des routes. Parmi ses séries les plus connues, Shimagatari (Island Tales) et The Dreaming évoquent avec une grande douceur la fragilité du monde contemporain, entre silence et mouvement, réalisme et rêverie.
Y. Ogawa - Untitled (1994)

Dans une œuvre profondément marquée par l’errance et la mémoire, ses images, souvent en noir et blanc, mêlent de façon poétique le journal intime au carnet de route ; elles nous donnent à voir des moments qui, bien que fugaces, révèlent une véritable histoire. Mais, au-delà d'une simple démarche documentaire, elles me semblent offrir une lecture plus universelle et intemporelle de la condition humaine. Comment retenir ce qui s'efface ? Laissons l'émotion nous gagner devant ce petit chemin de pierre : elle est pure, écrivait Paul Gadenne dans son petit "Guide du voyageur" (1953).

dimanche 6 novembre 2022

Ben Shahn - Untitled
Le vide-grenier du dimanche. Deux œuvres de l’artiste américain d’origine lituanienne Ben Shahn (1898-1969). Après l’exil de son père en Sibérie pour raisons politiques, la famille émigre en 1906 aux États-Unis et s’installe à Brooklyn. Shahn y apprend la lithographie avant de suivre des études de biologie à l’Université de New York, puis d’art au City College et à la National Academy of Design. Dans les années 1920, après un voyage en Afrique du Nord et en Europe où il découvre Matisse, Dufy ou Picasso, il s’éloigne pourtant de l’avant-garde : il cherche une peinture réaliste, capable d’exprimer ses préoccupations sociales et morales.

B.S. - Scott's run (1937)
Le cycle des 23 gouaches consacrées au procès des anarchistes Sacco et Vanzetti (1931-32) le fait connaître : un art engagé, humain, qui place la justice et la dignité au cœur de sa démarche.
En 1935, Walker Evans le recommande à Roy Stryker, alors à la tête du département information de la Farm Security Administration. Comme Dorothea Lange (voir mars 2013), Gordon Parks (voir sept.2012), Jack Delano (voir mai 2012 et oct.2019), Walker Evans (voir juil.2012), Carl Mydans (voir avril 2013), John Vachon (voir mars 2016) Arthur Rothstein (voir avril 2019), Ben Shahn va dès lors documenter la vie rurale du Sud ; ce travail que j'aime beaucoup - photographique cette fois -, fera l'objet d'une future publication.

samedi 5 novembre 2022

A. Schwarzschild - La chute d'Icare (1920)
Une image et des mots. Un tableau d'Alfred Schwarzschild (1874-1948) "La chute d'Icare", et quelque lignes de Nietzsche, extraites de Ecce homo, son dernier ouvrage avant la démence, écrit en 1888 et publié vingt ans plus tard.
[...] j'ai besoin de solitude, je veux dire de guérison, de retour à moi, du souffle d'un air pur qui circule librement... Tout mon Zarathoustra n'est qu'un dithyrambe en l'honneur de la solitude, ou, si l'on m'a compris, en l'honneur de la pureté... Heureusement, pas en l'honneur de la pure niaiserie ! — Qui sait voir les couleurs l'appellera adamantine... Le dégoût de l'homme, de la «canaille», fut toujours mon plus grand péril...

dimanche 30 octobre 2022

A.Chaskielberg - Flaming path (2014)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de l'argentin Alejandro Chaskielberg (b.1977) que j'ai découvert en 2016 avec sa série Laberinto dans les pages du magazine Burn, édité par David Alan Harvey pour y présenter de jeunes photographes émergents. Formé d’abord au photojournalisme, Chaskielberg s’est très vite éloigné du réalisme pur pour construire un univers visuel à la frontière du documentaire et de la fiction. Travaillant souvent la nuit, il compose des images baignées d’une lumière étrange, entre rêve et réalité.
A.C. - Sinapsis (2014)

La photographie Sinapsis, issue de sa série Laberinto,
a été réalisée dans le labyrinthe créé en Patagonie par Claudio Levi et Doris Romera.
L’artiste raconte avoir été inspiré, pour cette scène, par les atmosphères nocturnes du film de Peter Greenaway Drowning by Numbers (1988).
Chez Chaskielberg, la lumière, les poses, la couleur forment un langage à part. Tout paraît réel, mais quelque chose déroute ; une façon, sans discours ni effets, de laisser affleurer la part fictionnelle du monde.
AB1

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dimanche 23 octobre 2022

B.W.L. - Shere church, Surrey (1902)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Benjamin William Leader (1831-1923), peintre paysagiste britannique qui a consacré toute son oeuvre à célébrer la beauté de la campagne anglaise. Né à Worcester, Leader s’est formé d’abord auprès de son père, ami de John Constable (voir oct.2013 et sept.2019), puis à la Royal Academy de Londres, où il s'est rapidement fait une réputation pour son talent à représenter la nature. Son style, qui mêle influences préraphaélites et approche naturaliste, se distingue par des détails minutieux et un travail subtil de la lumière.
B.W.L. - An English river in autumn
(1877)

Leader ne se contente pas de représenter le paysage : il en restitue la quiétude, la lenteur et la beauté fragile.
L'une de ses œuvres les plus célèbres, February Fill Dyke (1881), dépeint un paysage enneigé inondé par des rigoles et des ruisseaux, symbole de la transition hivernale.
Toutes évoquent la tranquillité et la beauté intemporelle de la campagne ; elles sont aujourd'hui présentes dans de nombreuses collections, et peuvent être admirées notamment à la Tate Britain et à la Worcester City Art Gallery.

samedi 22 octobre 2022

C.H. Geilfus - Repairing hearts (1900)
Une image et des mots. "May all broken hearts be healed!", une image de l'illustrateur allemand Charles Heinz Geilfus (1856-1914), de sa série Repairing hearts.
Et pour aller avec, une des plus belles phrases de l'oeuvre d'Albert Camus, un moment de lumière après l’exil, la solitude et la douleur : c'est un extrait du texte Retour à Tipasa, dans L'Été (1952)

Au milieu de l’hiver, j’apprenais enfin qu’il y avait en moi un été invincible.
LC7

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dimanche 16 octobre 2022

A.de C. - Jeune femme à la quenouille
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre baroque flamand Adam de Coster (1586-1643). Surnommé "le peintre de la nuit" pour son goût pour les scènes ténébristes, il est une figure majeure de ceux que l'on appelle les caravagistes d'Anvers, un groupe de peintres baroques parmi lesquels figuraient Theodore Rombouts, à qui je consacrerai sans doute une publication.
A. de C. - Saint François et Frère Léon
(1626)

Bien que sa vie soit peu documentée, on sait que Adam de Coster a été actif surtout à Anvers où il a été en 1607 admis comme maître dans la Guilde de Saint-Luc. Ensuite, c'est à l'occasion de voyages et de séjours en Italie qu'il aurait découvert le travail du Caravage.
De Coster s’est imposé comme l’un des grands maîtres du clair-obscur flamand, jouant des contrastes de lumière pour modeler les visages et les gestes dans des atmosphères feutrées, souvent religieuses ou allégoriques. Paradoxalement, il n’avait ni atelier ni élèves connus, signait rarement ses œuvres, et nombre d’entre elles furent attribuées à d’autres - une discrétion qui explique sans doute pourquoi son nom est longtemps resté dans l’ombre qu’il aimait tant peindre.

dimanche 9 octobre 2022

V.C. Ferry - Girl reading (2014)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain V.C. Ferry, de qui je ne sais pas grand-chose sinon qu'il est basé à New York et semble spécialisé dans la photographie de rue et documentaire. Le peu que je connais de son travail est visible ICI ou sur sa page Facebook.

V.C. Ferry - The immigrant (2015)
Je préfère faire l'expérience du monde d'une façon qui me connecte à la beauté de chaque jour. Lorsque je photographie, j'essaie de ne faire qu'un avec l'image, et le sentiment qu'elle véhicule. J'accorde de l'importance au fait de saisir le familier qu'il nous est permis de voir, mais que l'on ne voit jamais réellement. J'ai l'espoir de créer une oeuvre qui transmette un sentiment de paix et attire le spectateur dans le moment présent.

dimanche 2 octobre 2022

A.K. - The renowned orders of the night (1997)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres d'Anselm Kiefer, déjà présenté en décembre 2009.
Anselm Kiefer n'esquive rien, écrit Laurent Wolf dans Le Temps du 15 janvier 2006.
Il fait face à l'incroyable effondrement de l'espérance culturelle allemande qui, de la philosophie des Lumières, de la poésie romantique, de la musique, de la peinture, de Bach ou Beethoven, Kant, Goethe, Novalis et Friedrich au triomphe d'Hitler pose le problème de la raison et de l'héritage.
A.K. - Lot's wife (1989)

Avec ses peintures, sculptures et installations monumentales, Kiefer explore l’histoire, la mémoire et la culture allemandes. Ses paysages d’arbres calcinés, recouverts de cendre – « ce reste sans reste », disait Derrida – traduisent une méditation sur la ruine et la survivance. Son emploi de matériaux bruts ou symboliques – plomb, cendre, paille, verre, terre, végétaux – confère à ses toiles une densité presque sculpturale. Souvent associé au néo-expressionnisme, Kiefer dépasse les étiquettes : son œuvre, traversée par la mythologie, la philosophie, la théologie et la poésie, interroge les zones sombres de l’histoire et les fondements de la création.
Par cette approche à la fois physique, spirituelle et intellectuelle, il a redéfini ce que peut être la peinture : un lieu de mémoire et de questionnement, où le geste artistique se confond avec le travail de deuil et de vérité. Son travail est un point de référence essentiel pour comprendre l’art contemporain et l'histoire humaine dans ses aspects les plus sombres.

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samedi 1 octobre 2022

Ali Asadi - Iran (2013)
Une image et des mots. Voici un cliché de l'iranien Ali Asadi, où l'on devine sous son voile le visage douloureux d'une femme, à l'occasion sans doute d' Achoura. C'est chez les chiites le jour qui commémore la mort de l'iman Hussein, petit-fils du prophète Mahomet.
Pour aller avec, quelques lignes de la grande Colette extraites des Vrilles de la vigne (1908) :

Je veux faire ce que je veux. Je veux jouer la pantomime, même la comédie. Je veux danser nue, si le maillot me gêne et humilie ma plastique. Je veux me retirer dans une île, s'il me plaît, ou fréquenter des dames qui vivent de leurs charmes, pourvu qu'elles soient gaies, fantasques, voire mélancoliques et sages, comme sont beaucoup de femmes de joie. Je veux écrire des livres tristes et chastes, où il n'y aura que des paysages, des fleurs, du chagrin, de la fierté, et la candeur des animaux charmants qui s'effraient de l'homme... Je veux sourire à tous les visages aimables, et m'écarter des gens laids... Je veux chérir qui m'aime, et lui donner tout ce qui est à moi dans le monde : mon corps rebelle au partage, mon coeur si doux et ma liberté !

dimanche 25 septembre 2022

C.G. Carus - Femme au balcon (1824)

Le vide-grenier du dimanche. déjà publié ici en juillet 2015. Figure essentielle du romantisme allemand, Carus fut à la fois peintre, médecin, naturaliste et psychologue. Il n’a jamais dissocié ses recherches scientifiques de sa quête artistique : chez lui, l’observation du vivant et la contemplation du monde obéissent à un même élan, celui de saisir l’unité du physique et du spirituel.
Médecin de la cour de Saxe et professeur à l’Université de Leipzig, il s’est illustré par ses travaux en anatomie et en gynécologie, mais aussi comme pionnier de la psychologie de l’inconscient - un domaine où il influencera plus tard Carl Jung.
« La clé de la connaissance de la nature de l’âme est à chercher dans le règne de l’inconscient », écrit-il en 1846 dans Psyché, histoire du développement de l’âme humaine..

C.G.C. - Chênes en bord de mer (1835)
Proche de Caspar David Friedrich, Carus partage avec lui une vision mystique et contemplative de la nature. Ses paysages, parfois baignés d’une lumière crépusculaire, traduisent une fascination pour l’infini et pour l’invisible qui se manifeste dans les formes du monde.
« Quels sentiments s’emparent de toi lorsque, gravissant le sommet des montagnes, tu contemples la longue suite des collines et le cours des fleuves ? » écrivait-il. « Tu te recueilles dans le silence, tu te perds toi-même dans l’infinité de l’espace, tu sens la pureté envahir ton être, tu oublies ton moi. »
Carus voyait dans l’art, tout comme dans la science, un chemin vers les vérités cachées de l’univers ; ses toiles, moins célèbres que celles de Friedrich, n’en sont pas moins essentielles pour comprendre la profondeur spirituelle du paysage romantique.

samedi 24 septembre 2022

Sebastian B. - We'll leave the light on for you
Une image et des mots. Une photo de Sebastian B., et quelques lignes de Jacques Dupin, extraites de Gravir (1963).

Quand marcher devient impossible, c'est le pied qui éclate, non le chemin. On vous a trompés. La lumière est simple. Et les collines proches.
Si par mégarde cette nuit je heurte votre porte, n'ouvrez pas. N'ouvrez pas encore. Votre absence de visage est ma seule obscurité.

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dimanche 18 septembre 2022

L.D. - Chapelle de Rosslyn (1824)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre et photographe Louis Daguerre (1787-1851). Inventeur du daguerréotype, qu’il met au point en 1839 en prolongeant les recherches de Nicéphore Niépce, il est considéré comme l’un des grands pionniers de la photographie - cette « brève complicité entre la prévoyance et le hasard », comme l’écrivit John Stuart Mill.

L.D. - Bd du Temple, Paris (1838)
Le procédé qu’il met au point marque une véritable révolution : pour la première fois, une image pouvait être fixée durablement sur une plaque d’argent recouverte d’halogénure d’argent, après exposition à la lumière.
Peintre avant d’être inventeur, Daguerre avait déjà cherché, dans ses dioramas et ses décors de théâtre, à capter la magie de la lumière et l’illusion du réel.
Après la mort de Niépce, il tenta bien de revendiquer seul la paternité de l'invention, mais la vérité finit par être rétablie. Reste le nom de Daguerre, associé à cette découverte fondatrice qui fit entrer la lumière dans l’histoire.

AV8

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dimanche 11 septembre 2022

Don Hogan Charles - Untitled
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe afro-américain Don Hogan Charles (1938-2017), célèbre pour ses images fortes de la culture noire américaine, des luttes sociales et de la vie urbaine aux États-Unis dans les années 1960 et 1970.

Don Hogan Charles
A view of 100th St. and Park Avenue
Premier photographe noir embauché par le New York Times, il a saisi avec une précision presque cinématographique les visages, les gestes, les tensions d’une époque en mouvement.
Ses images, souvent marquées par un contraste subtil entre dignité et dureté, témoignent d’un regard lucide et empathique et demeurent aujourd’hui parmi les archives les plus éloquentes du combat pour les droits civiques : des photographies qui, au-delà de leur valeur documentaire, gardent intacte leur charge humaine et politique.

dimanche 4 septembre 2022

Montserrat Gudiol - Lovers (1970)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'artiste catalane espagnole Montserrat Gudiol (1933-2015), dont l’œuvre, toute de retenue et de sensibilité, explore les thèmes de la solitude, du silence et de l’intériorité humaine.
Née à Barcelone dans une famille de restaurateurs d'art, elle a très tôt été marquée par le contact avec les maîtres anciens. Autodidacte, elle a développé un style figuratif marqué par des formes épurées, des figures éthérées et une palette subtile de tons doux. Les œuvres de Gudiol représentent souvent des portraits de femmes et des figures isolées, fatiguées et pensives, et comme fondues dans les espaces oniriques et mystérieux d'arrière-plans indistincts.

M.G. - Sans titre (1970)
Loin des approches avant-gardistes de son époque, elle s'est orientée vers une esthétique plus intime et personnelle, évoquant la fragilité et l’émotion avec une grande délicatesse.
Première femme admise à l'Académie Royale Catalane des Beaux-Arts, elle fut aussi la première artiste à recevoir la Creu de Sant Jordi, une des plus hautes distinctions décernées en Catalogne.
Montserrat Gudiol laisse derrière elle un héritage artistique qui continue de toucher par la profondeur et la simplicité de son art.

Peter Turnley Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Peter Turnley (b..1955). P.T. - La Tartine, Paris (2025)