In girum imus nocte et consumimur igni

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mardi 1 juillet 2025

R.C. - Tierra guajira (1999)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe cubain Raúl Cañibano.

R. Cañibano

dimanche 29 juin 2025

A.D. - Communication breakdown
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre américain Alex Devereux (b.1974).

A. Devereux - Blue swallow

samedi 28 juin 2025

C.Ebbets - Lunch atop a skyscraper (1932)

Une image et des mots. Pour aller avec ce cliché célébrissime, attribué à Charles Ebbets, voici quelques mots de Roger Caillois, un extrait de L'incertitude qui vient des rêves (1956).

J'ai cédé à un souci personnel constant, presque exclusif, invincible [.....]. Je veux parler d'un attrait ininterrompu pour les forces d'instinct, de vertige, du goût d'en définir la nature, d'en démonter autant que possible la sorcellerie, d'en apprécier exactement les pouvoirs ; de la décision, enfin, de maintenir sur eux, contre eux, la primauté de l'intelligence, de la volonté, parce que, de ces facultés seules naît pour l'homme une chance de liberté et de création.

dimanche 22 juin 2025

Nick Hedges - Liverpool (1969)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe anglais Nick Hedges, qui vient de nous quitter.

Nick Hedges

dimanche 15 juin 2025

Jay Senetchko - Phone (2011)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Jay Senetchko.

J. Senetchko - The migrants (2013)

dimanche 8 juin 2025

Joel Sternfeld - McLean, Virginia (1978)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe Joel Sternfeld, évoqué en juillet 2023 dans la publication consacrée à Niall McDiarmid.

J.S. - Potato harvest
Aroostook County
(1982)

samedi 7 juin 2025

Ménologe de Basile II
Une image et des mots. On connaît la formule de Simonide : « La peinture est une poésie muette ». Mais ce n’est pas pour autant que toutes les oeuvres peintes exsudent le silence au point de le rendre presque tangible, comme chez Hopper ou chez Vermeer.
Ce n’est pas le cas par exemple (ni sans doute l'intention) de cette image issue du Ménologe de Basile II - un célébrissime synaxaire byzantin du Xe siècle conservé au Vatican - qui représente Saint Jean le Silenciaire, et où il nous semble entendre autour de celui qui a fait vœu de se taire tous les bruits de la nature et la clameur des éléments.
Les mots qui suivent et que j'ai choisis pour accompagner cette image sont de Maurice Maeterlinck, extraits du "Trésor des humbles" (1896). « Il est des individus qui n’ont pas de silence, et qui tuent le silence autour d’eux, et ce sont les seuls êtres qui passent vraiment inaperçus » car « nous ne pouvons nous faire une idée exacte de celui qui ne s’est jamais tu.
On dirait que son âme n’a pas eu de visage ». Et Thoreau quant à lui écrivait dans son journal, en janvier 1841 : "Je suppose que nous n'avons pas besoin d'inspiration pour parler, mais juste pour rester silencieux".

dimanche 1 juin 2025

Sebastião Salgado - Amazonas

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de Sebastião Salgado (1944–2025), qui vient de nous quitter.
Trois publications lui avaient déjà été consacrées sur ce blog (en juin 2009, août 2013 et juillet 2016), mais je ne pouvais pas ne pas lui en consacrer une nouvelle ; d’autant que les deux premières étaient des IM, et que la dernière ne le présentait pas vraiment.

S.S. - Amazonas, palo de agua




Salgado, qui aimait à dire que « chaque image est le fruit d’une rencontre, d’un respect », est un photographe important pour moi. Pour la beauté de ses images, bien sûr. Pour ses qualités humaines, aussi. Mais surtout parce qu’il a consacré une part essentielle de son travail à une région qui m’est chère : celle que je montre ici.
D’abord formé à l’économie, à l’université de São Paulo puis à la Sorbonne, il se tourne vers la photographie au début des années 1970. Il commence comme photojournaliste chez Sygma, Gamma, puis Magnum, avant de développer de grands projets documentaires qui imposent une écriture immédiatement identifiable : noir et blanc profond, composition rigoureuse, lumière sculpturale ; au point que certains ont pu lui reprocher une esthétique trop « belle » pour les réalités qu’elle montre. Lui revendiquait une photographie engagée, tournée vers la dignité. Workers (1993), Exodes (2000), puis Genesis (2013) sont devenus des repères majeurs du documentaire contemporain. C’est par ce dernier que je me suis, tardivement, vraiment intéressé à son travail, à travers le magnifique ouvrage qui m’a été offert lors de sa publication.

dimanche 25 mai 2025

Kiyoshi Saitō - Party (1963)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres, des estampes, de Kiyoshi Saitō (1907–1997), figure majeure du mouvement sōsaku hanga, un courant japonais du XXe siècle qui prônait une approche intégrale où l'artiste conçoit, grave et imprime lui-même ses œuvres. Autodidacte, Saitō développe un style sobre, épuré. Ses premières gravures semblent presque sculptées dans le bois : un réalisme en relief, discret, où l’on sent encore le froid des ruelles d’Aizu, sa région natale. C’est avec la série Hiver à Aizu, commencée en 1938, qu’il connaît ses premiers succès : maisons enneigées, silhouettes emmitouflées, lumière mate, sans effets ni fioritures.  

K.S. - Sato Horyu-Ji Nara (1962)

Puis, son style s’épure encore, se géométrise, et entre peu à peu dans une fusion très personnelle entre tradition japonaise et modernité occidentale.
Il disait que ses maîtres s’appelaient Gauguin, Matisse, Picasso, et ça se voit : les formes se simplifient, les volumes se perdent dans l’aplat, et les architectures comme les feuillages deviennent des motifs plus que des objets. Saitō intègre aussi les veinures du bois comme partie prenante de la composition : on appelle mokume-zuri ces impressions où la matière même du support entre dans l’image. « Je travaille à créer une peinture sans pinceau, en utilisant uniquement la surface plane de la plaque », disait-il.

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samedi 24 mai 2025

Joel Meyerowitz - Lane's truck stop
St. Louis, Missouri
(1978)
Une image et des mots. "La raison est nécessaire parce que les bonnes intentions de la pensée ne sont pas suffisantes. Le désir de la vérité ne débouche pas sur l’établissement d’une vérité ; il faut le contrôle permanent de l’esprit critique", nous dit le philosophe Michel Adam dans son Essai sur la bêtise (1975).

Pour accompagner cette photographie de Joel Meyerowitz,, voici quelques lignes de Bernanos, extraites de Les grands cimetières sous la lune (1938).
"C’est vrai que la colère des imbéciles remplit le monde. Vous pouvez rire si vous voulez, elle n’épargnera rien, ni personne, elle est incapable de pardon. Évidemment les doctrinaires de droite ou de gauche, dont c’est le métier, continueront de classer les imbéciles, en dénombreront les espèces et les genres, définiront chaque groupe selon les passions, les intérêts des individus qui le composent, leur idéologie particulière.
Pour de tels gens cela n’est qu’un jeu. Mais ces classifications répondent si peu à la réalité que l’usage en réduit impitoyablement le nombre. Il est clair que la multiplication des partis flatte d’abord la vanité des imbéciles."

dimanche 18 mai 2025

J. Ternoff - One and one
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Janet Terhoff.

J.T. - Verrazano Bridge


dimanche 11 mai 2025

Ben Enwonwu - Anyanwu (1954)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'artiste nigérian Ben Enwonwu (1917-1994), figure tutélaire de l'art moderne africain. Il a su incarner, avec cette seule silhouette d'Anyanwu, l'ambition d'une modernité africaine, et à ce titre il fut longtemps présenté comme "l'artiste nigérian par excellence", reconnu à la fois par l'académie coloniale et par l'avant-garde post-coloniale.
Formé au Nigeria auprès de son père, sculpteur igbo, puis à Londres à la Slade School of Fine Art, il est l’un des premiers artistes africains à s’imposer au plan international sans renier ce qu’il est : ni un “native artist” folklorisé, ni un suiveur du canon occidental. Ben Enwonwu ne s'excuse ni de ses racines ni de ses ambitions, et emprunte à l’un et à l’autre pour mieux inventer.

Ben Enwonwu - Atlas
De retour au Nigeria dans les années 1950, il devient conseiller artistique pour le gouvernement fédéral. C’est à ce titre qu’il réalise en 1954 l’une de ses œuvres majeures : Anyanwu (“L’Éveil”), une sculpture installée devant le Musée national de Lagos : une figure féminine dressée, les bras légèrement écartés comme pour s'élever, à la fois symbole de la maternité, de l’énergie vitale et de l’indépendance.
"Mon but était de symboliser notre nation montante. J’ai essayé de combiner les matériaux, l’artisanat et la tradition, pour exprimer une conception basée sur la féminité – la femme, la mère et nourricière de l’homme. Dans notre nation montante, je vois les forces incarnées dans la féminité ; le début, et ensuite, le développement et l’épanouissement en stature la plus complète d’une nation – un peuple ! Cette sculpture est spirituelle dans sa conception, rythmique dans son mouvement et tridimensionnelle dans son cadre architectural – ces qualités sont caractéristiques des sculptures de mes ancêtres".
Sa manière est immédiatement identifiable : silhouettes élancées, goût du mouvement, formes inspirées des danses rituelles ou des mascarades Igbo. Chez Anyanwu, cette élongation n’est pas une simple stylisation, elle exprime une aspiration : la forme tendue vers le haut traduit une tension politique, existentielle, collective. Avec cette allégorie féminine de la nation, Ben Enwonwu a donné corps à tout un peuple en devenir.

dimanche 4 mai 2025

Jean Béraud - Un Figaro de rêve
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre français Jean Béraud (1849-1935), célèbre pour ses scènes de la vie parisienne sous la Belle Époque. Né à Saint-Pétersbourg, il s'installe à Paris après la mort de son père et étudie à l'École des Beaux-Arts sous la direction de Léon Bonnat.

J.B. - Au café, dit L'absinthe (1909)

Dans un style qui oscille entre réalisme et impressionnisme, il restitue avec une spontanéité et une minutie quasi-documentaires l’essence du Paris de la fin du XIXe siècle, à la manière d'un photographe de rue aujourd’hui : ses rues animées, ses cafés et ses buveurs d'absinthe, ses théâtres et ses élégantes figures mondaines..., les compositions de Béraud foisonnent de mouvement, de regards échangés, de petites anecdotes visuelles qui donnent l’impression d’un moment volé sur le vif. En ce sens, il pourrait sans doute être vu comme un précurseur du regard photographique appliqué à la peinture.
On compare souvent son travail à celui de Degas ou du flamboyant Giovanni Boldini, mais Béraud a encore quelque chose en plus : une touche narrative et un brin d’ironie qui rendent ses scènes plus vivantes, presque cinématographiques. Là où Degas capte l’instant et Boldini magnifie l’élégance, Béraud raconte des histoires, avec ce regard un peu amusé sur le Paris de son époque qui le rend si singulier.

samedi 3 mai 2025

Lectionnaire d'Henri III
Une image et des mots. En ce surlendemain de Fête du travail...
Ce que veut dire la parabole des ouvriers de la 11ème heure (Matthieu, 20), magnifiquement illustrée ici dans le lectionnaire d'Henri III (1017-1056), c'est que pour le Christ la récompense n'est pas proportionnelle à l'effort fourni, ("les derniers seront premiers, les premiers seront derniers").

Mais cette image peut aussi se lire comme une simple illustration narrative (et laïque) du travail et de sa rémunération. La scène du haut est une scène de travail, avec des ouvriers qui taillent la vigne et qui la sarclent; la scène du bas est celle du travail accompli et de la rémunération.
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dimanche 27 avril 2025

Roger Shall - Le Normandie (1935)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe français Roger Schall (1904-1995), déjà présenté le 11 mai 2008 avec Le balayeur de la rue Visconti et Le marché au timbres de l'avenue Matignon.
Voici donc deux nouvelles images de Roger Schall, prises la même année et que je n’ai pu m’empêcher de rapprocher : d’un côté, le Normandie, paquebot emblématique de l’entre-deux-guerres, dont Schall photographia le voyage inaugural aux côtés de Blaise Cendrars (voir ma première publication) ; de l’autre, une vue du Normandy, restaurant parisien désormais disparu.

R. Schall - Le Normandy (1935)



Deux lieux de passage, deux mises en scène du luxe à la française - flottant pour l’un, bien ancré rive droite pour l’autre -, mais aussi deux façons de raconter une époque par ses façades, ses volumes, ses reflets. Deux lieux très différents, mais une même manière de faire apparaître ce qui se joue derrière les apparences. Ce que j’aime chez Roger Schall, c’est ça : cette capacité à capter l’élégance sans la figer, à enregistrer une présence humaine même là où elle semble absente. Le photographe de mode qu'il a été laisse parfois entrevoir, à la marge, un témoin plus discret, attentif aux traces, à ce que les lieux racontent à voix basse.

samedi 26 avril 2025

Ute de Naumbourg
Une image et des mots. À la question « Pourquoi l’homme est-il fasciné par la beauté ? », Aristote aurait répondu :
« C’est la question d’un aveugle ! ».
Voici un détail d’un chef-d’œuvre du gothique allemand, que l'on peut admirer dans la cathédrale de Naumbourg : la statue de Uta von Ballenstedt, margravine de Misnie, un État médiéval du Saint-Empire romain germanique. Elle aurait inspiré, chez Disney, le dessin de la marâtre de Blanche-Neige.
Pour l’accompagner, j’ai choisi un sonnet de Baudelaire, extrait des Fleurs du Mal (1857)

Je suis belle, ô mortels ! comme un rêve de pierre,
Et mon sein, où chacun s'est meurtri tour à tour,
Est fait pour inspirer au poète un amour
Eternel et muet ainsi que la matière.

Je trône dans l'azur comme un sphinx incompris;
J'unis un coeur de neige à la blancheur des cygnes;
Je hais le mouvement qui déplace les lignes,
Et jamais je ne pleure et jamais je ne ris.

Les poètes, devant mes grandes attitudes,
Que j'ai l'air d'emprunter aux plus fiers monuments,
Consumeront leurs jours en d'austères études;

Car j'ai, pour fasciner ces dociles amants,
De purs miroirs qui font toutes choses plus belles :
Mes yeux, mes larges yeux aux clartés éternelles!

dimanche 20 avril 2025

W. Plewinski - Suzy, London (1968)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du photographe polonais Wojciech Plewinski (b.1928). 
Figure majeure de la génération des photographes d'après-guerre, il est à rapprocher des grands photographes humanistes français comme Boubat et Doisneau.

W.P. - Witowice dolne (1976)

Explorant les thèmes de l'identité et de la culture, Plewinski photographie avec un grand souci de sincérité et d'authenticité des visages, des silhouettes, de petites histoires humaines qui dépassent par leur signification la vie du seul être photographié. Témoignage poétique de l'âme humaine, la photographie humaniste est un art de la rencontre, disait Martine Franck.

dimanche 13 avril 2025

C.D. F. - Femme à la fenêtre (1822)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'allemand Caspar David Friedrich (1774-1840).
Né sur les rives de la Baltique, alors sous domination suédoise, il grandit dans un environnement empreint de piété luthérienne, et est marqué dès l’enfance par plusieurs deuils familiaux. Ces pertes précoces, combinées à une profonde intériorité, vont nourrir une œuvre où la solitude, le silence et la quête spirituelle occupent une place centrale.
Formé à l’Académie de Copenhague, il s’imprègne du néoclassicisme et va s'imposer dès le début du XIXe siècle comme l’un des principaux représentants du romantisme allemand ; il ne s’agit plus de représenter la nature de manière fidèle, mais d’en faire le miroir d’un état d’âme : " le peintre ne doit pas peindre seulement ce qu'il voit en face de lui, mais aussi ce qu'il voit en lui.". Cet homme, disait de lui le sculpteur David d'Angers, a découvert le tragique du paysage.

C.D. F. - Le soir (1821)
Et les paysages de Caspar Friedrich - étendues enneigées, montagnes brumeuses, ruines gothiques ou silhouettes solitaires face à la mer -, ne sont pas de simples décors.
Ils sont une confrontation entre l’homme, souvent de dos (le fameux "Rückenfigur"), et l’infini. 
Peu soucieux des modes, Friedrich reste à l’écart des cercles officiels et son style, jugé trop sombre ou passéiste au fil du siècle, va tomber progressivement dans l’oubli après sa mort en 1840. Il faudra attendre la fin du XIXe siècle, puis le XXe, pour qu’il soit redécouvert par les symbolistes, les expressionnistes, et plus tard les surréalistes.
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dimanche 6 avril 2025

K. Struss - Woman and branch (1912)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Karl Struss (1886-1981). Natif de New York, il se forme d’abord à la photographie au sein de la Columbia University, tout en travaillant dans l’atelier familial de fabrication de chapeaux. Très tôt, il se passionne pour la lumière, les textures, les effets atmosphériques. Il est parmi les premiers aux États-Unis à expérimenter les procédés autochromes, une technique de photographie couleur encore balbutiante à l’époque.
Ses premières œuvres, influencées par le pictorialisme, se caractérisent par une esthétique douce, presque impressionniste, à mi-chemin entre la peinture et la photo.
En 1910, ses images sont exposées par Alfred Stieglitz (voir nov. 2011) au sein de la célèbre galerie 291, aux côtés d’Edward Steichen (voir mars 2010) et Clarence White (qu'il faudra que je présente aussi), un signe de reconnaissance précoce et rare pour un si jeune photographe.

K.S. - Brooklyn Bridge, NY (1913)

Mais Struss ne s’arrête pas là. Fasciné par les possibilités narratives de l’image en mouvement, il se tourne vers le cinéma et s’installe à Hollywood en 1919. Il devient rapidement un directeur de la photographie recherché, qui va collaborer avec les plus grands réalisateurs de l’époque.
Sa carrière décolle véritablement avec "L'Aurore" (1927), chef-d'œuvre de F.W. Murnau - un de mes films préférés -, pour lequel il reçoit l’un des tout premiers Oscars de la meilleure photographie. Ce film est magnifique et reste une référence absolue pour son usage novateur de la lumière, des superpositions et des mouvements de caméra.
Par la suite, et tout au long de sa carrière, Struss va collaborer avec des réalisateurs majeurs comme Cecil B. DeMille ou Charlie Chaplin (L'Émigrant, Le Dictateur). Son approche, marquée par son passé de photographe - composition soignée, clairs-obscurs subtils -, va participer à l’élaboration du style visuel du cinéma hollywoodien classique.
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samedi 5 avril 2025

O.S. - Nature morte (2015)
Une image et des mots. " L’escargot est naturellement héroïque, disait Alexandre Vialatte, car il ne recule jamais. » Pourtant, pour accompagner ce détail d’une nature morte d’Olga Smirnova (Nature morte aux raisins et à l’escargot, 2015), j’ai préféré une figure bien moins flatteuse : celle imaginée par Hans-Christian Andersen dans son conte Le rosier et l’escargot.

Le jardin était entouré de noisetiers. Au milieu, fleurissait un rosier, et sous lui vivait un escargot.
— Attendez que mon temps arrive ! disait l’escargot. Je ferai des choses bien plus grandioses que de fleurir, ou donner des noisettes, ou donner du lait comme les vaches et les moutons.
— Quand les ferez-vous ? demanda le rosier.
— Je prends mon temps. Attendre est plus excitant.
[…]
Un an plus tard, l’escargot était toujours là. Le rosier, lui, avait produit des fleurs fraîches, emportées par le vent ou cueillies.
— Rien n’a changé, dit l’escargot. Toujours des roses. Vous n’évoluez pas.
— Je ne peux pas faire autrement. Je sens une force de la terre et du ciel. Alors je fleuris. C’est ma vie.
— Vous avez eu la vie facile, dit l’escargot. Moi, j’ai une pensée plus profonde. Le monde ne m’intéresse pas, je me suffis.
— Mais nous ne devrions pas donner le meilleur de nous-mêmes ? Moi, je donne mes roses. Et vous, que donnez-vous ?
— Je crache sur le monde ! Je n’ai besoin que de moi.
Et l’escargot rentra dans sa coquille et la referma.
— C’est triste, dit le rosier. J’ai vu une femme garder une rose dans son missel, une autre fut portée par une jeune fille. Un enfant en a embrassé une. Cela m’a rendu heureux. Voilà ma vie.
[…]
Les années passèrent. L’escargot et le rosier devinrent poussière. Mais de nouveaux rosiers fleurirent. Et de nouveaux escargots grandirent à leurs pieds.
Ils rentraient dans leur coquille… car le monde ne les concernait pas. Allons-nous relire cette histoire une nouvelle fois ? Elle ne sera pas différente.

Dans ce conte, Andersen oppose deux figures : l’escargot, replié sur lui-même, convaincu de sa supériorité et trop « profond » pour agir, et le rosier, modeste mais généreux, qui offre ses fleurs sans rien attendre. L’escargot devient la métaphore d’un individualisme stérile, qui refuse de se mêler au monde au nom d’un idéal jamais réalisé. À l’inverse, le rosier incarne la fécondité de ceux qui, sans se poser en donneurs de leçons, apportent de la beauté et de la joie au monde - parfois à leur insu. Le conte dénonce avec légèreté l’illusion d’un dépassement de soi - ou même tout simplement d'une importance de soi -, qui, à force de mépriser les choses simples, finit par ne rien produire.

dimanche 30 mars 2025

M.W. - Something died here (1947)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de Minor White, déjà présenté le 11 août 2013. 

M.W. - Cabbage Hill, Oregon (1941)
Votre essence propre, en vous depuis la naissance, est votre qualité intérieure.  Cela est ce que vous savez de vous-même.
Quand vous vous approchez de quelque chose pour le photographier, soyez d'abord profondément calme avec vous-même, jusqu'à ce que l'objet affirme votre propre présence.
Lecteur de Gurdjieff, féru d'astrologie et de bouddhisme zen, Minor White inscrit son travail dans une quête à la fois esthétique et spirituelle que l'on pourrait rapprocher de ce qu'explorait Alfred Stieglitz avec Equivalents, son étonnante série d'études de nuages entreprise pendant près de dix ans à partir de 1922.

R.C. - Tierra guajira (1999) Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe cubain Raúl Cañibano. R. Cañibano