In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 30 avril 2023

Evelyn Hofer - Dublin (1966)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de la photographe germano-américaine Evelyn Hofer (1922-2009), figure marquante de la photographie documentaire du XXe siècle. Née à Marburg, en Allemagne, elle a grandi dans un contexte de bouleversements politiques qui ont profondément influencé sa vie et son art. Sa famille a fui le nazisme en 1933 pour s’installer à Genève, puis à Madrid. Mais l’arrivée de Franco au pouvoir a poussé sa famille à émigrer à nouveau, cette fois au Mexique au début des années 1940, où Evelyn a entamé sa carrière de photographe professionnelle. En 1946, elle s’installe à New York, où elle collabore avec Alexey Brodovitch de Harper’s Bazaar et fréquente des artistes comme Richard Lindner et Saul Steinberg.

E. Hofer - New York
Hofer est reconnue pour ses portraits et paysages urbains réalisés avec une chambre photographique 4x5 pouces, un choix technique qui reflète son exigence. Ses compositions sont ordonnées et précises, et ses portraits révèlent souvent des expressions ambivalentes, teintées de tristesse ou de solitude. Elle a également excellé dans des projets littéraires, associant ses photographies aux textes d’auteurs tels que V.S. Pritchett (Dublin: A Portrait) et Mary McCarthy (The Stones of Florence).
Caractérisé par une grande élégance formelle, le travail d'Evelyn Hofer transcende la simple documentation pour inviter à une réflexion visuelle sur l’architecture, les visages, et les histoires humaines, témoignant de son regard à la fois rigoureux et profondément sensible.

RF2

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dimanche 23 avril 2023

William Sanderson - Untitled
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre américain d'origine lettone William Sanderson (1905-1990). Né à Dubbeln, près de Riga, il a eu une vie marquée par les bouleversements de son époque, de la Russie tsariste à l'Amérique de la Grande Dépression. Immigré aux États-Unis en 1923, il a étudié à la National Academy of Design à New York, avant de travailler comme illustrateur pour des magazines prestigieux tels que The New Yorker et New Masses.
I believe the artist is first of all a human being with the ability to see and depict the hope, aspirations and the despair of other human beings.”
William Sanderson, qui affirmait que « la responsabilité de l’artiste envers la société » restait au cœur de sa démarche, portait un regard lucide sur les préjugés ethniques et raciaux qu’il considérait comme un thème central de son engagement artistique ; il les a illustrés dans les années 50 avec des oeuvres comme Noon HourWhites Only et Brief Encounter, où il met en scène des réalités sociales marquées par la ségrégation. Ses œuvres des années 1950 critiquaient également l’aliénation et les tensions de la vie urbaine, comme en témoigne Beginning of the End. Plus tard, avec des peintures comme Tierra y Libertad et La Pulquería, qui empruntent au style réaliste socialiste de Diego Rivera, il aborde la quête identitaire des jeunes Chicanos.
W.S. - Ten bare trees

Au-delà de ses multiples influences, de la tradition européenne au modernisme américain, et de la coexistence harmonieuse d'éléments figuratifs et abstraits dans ses toiles, William Sanderson conservait une foi inébranlable dans le caractère intemporel et universel de l'art, ainsi que dans le réconfort spirituel qu'il procure.
Because I feel that art is fundamentally humanistic, that it has its roots in a concern with man – not with the machine, the computer nor the rocket – I believe that the artist can use his multiple abilities of communication to offer men spiritual release and infuse meaning into what is often a meaningless existence.”
JP1

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samedi 22 avril 2023

Ian Boulton - Moon Street, Stokes Croft. (2015)
Une image et des mots. Un cliché du photographe anglais Ian Boulton, et un poème de Benjamin Fondane, assassiné en 1944 dans une chambre à gaz d'Auschwitz.

"...Oui, j’ai été un homme comme les autres hommes,
nourri de pain, de rêve, de désespoir. Eh oui, j’ai aimé, j’ai pleuré, j’ai haï,
j’ai souffert, j’ai acheté des fleurs
et je n’ai pas toujours payé mon terme.
Le dimanche j’allais à la campagne
pêcher, sous l’œil de Dieu,
des poissons irréels,
je me baignais dans la rivière
qui chantait dans les joncs et je mangeais des frites le soir.
Après, après, je rentrais me coucher fatigué,
le cœur las et plein de solitude,
plein de pitié pour moi, plein de pitié pour l’homme,
cherchant, cherchant en vain sur un ventre de femme
cette paix impossible que nous avions perdue
naguère, dans un grand verger
où fleurissait au centre, l’arbre de la vie…"

dimanche 16 avril 2023

Heinrich Vogeler - Rêverie (1900)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre allemand Heinrich Vogeler (1872-1942), né à Brême et formé à l'Académie des beaux-arts de Düsseldorf.
D'abord influencé par les préraphaélites et l'Art Nouveau, il explore des thématiques spirituelles et mythologiques, qu'il transpose dans les paysages de son pays. Ses premières œuvres, comme "Contes d'hiver" (1897), réinterprètent des récits bibliques dans des scènes quotidiennes, où les figures sacrées apparaissent sous des traits populaires et contemporains.
Son art se caractérise par une grande attention au détail et une forte charge symbolique ; cela se retrouve notamment dans ses fresques et créations de mobilier pour la ferme de Barkenhoff qu'il aménage en colonie d'artistes dans le style Jugendstil.

H. Vogeler - Paysage
Cependant, après 1906, son engagement personnel et politique le pousse à modifier son approche artistique.
Sa découverte de la condition ouvrière, lors de ses voyages et lectures sur le socialisme, marque de plus en plus ses créations. Il se détourne de ses premières influences pour adopter une peinture plus réaliste et engagée, qui illustre les luttes sociales et les conditions de vie des travailleurs. Sa participation à des mouvements pacifistes pendant la Première Guerre mondiale et son rapprochement avec la révolution bolchevique vont profondément modifier sa pratique. Vogeler commence à peindre des fresques qui célèbrent la vie des ouvriers et des paysans, un engagement qu’il va poursuivre lors de ses voyages en Russie soviétique dans les années 1920. Il suffit pour mesurer l'ampleur de cette évolution de comparer des toiles profondément préraphaélites comme Le Printemps (1897) à son Docker à Hambourg de 1928 ou plus tard encore à son Stakhanoviste à Sotchi (1936). 
Son rôle dans le Parti communiste et son soutien à la révolution d'Octobre marquent une étape cruciale dans son parcours. Vogeler devient un fervent défenseur des idéaux socialistes ; il fonde même une communauté ouvrière à Barkenhoff, où il tente de mettre en pratique ses idéaux utopistes. Toutefois, ses divergences avec le Parti communiste d'Allemagne et ses expériences en URSS – notamment son rôle dans la construction du socialisme en Carélie et en Ouzbékistan – finissent par le marginaliser.
En dépit de son engagement politique et social, Vogeler doit faire face aux contradictions du régime soviétique et à la répression stalinienne, ce qui l'amène à douter de ses convictions initiales. Ses derniers travaux sont marqués par un réalisme austère, mettant en avant l'image de l'ouvrier dans une société en crise. Exilé en URSS pendant la Seconde Guerre mondiale, il meurt en 1942 dans des conditions difficiles, en laissant derrière lui une œuvre profondément marquée par les idéaux de son époque, mais aussi par les luttes et les espoirs qui l'ont animé tout au long de sa vie.
WM3

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Lectionnaire d'Henri III Une image et des mots. En ce surlendemain de Fête du travail... Ce que veut dire la parabole des ouvriers ...