In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 28 août 2022

P.S. Krøyer - Plage du sud de Skagen (1883)

Le vide-grenier du dimanche. En cette fin de saison estivale, deux oeuvres du peintre danois Peder Severin Krøyer (1851-1909), un des grands représentants de l'école de Skagen - cette communauté d’artistes qui, à la fin du XIXᵉ siècle, s’étaient installés dans ce village à l’extrême nord du Jutland pour y peindre la lumière et la mer.
Après de longs voyages en Europe et un séjour à Paris, où il étudie auprès de Léon Bonnat et découvre les impressionnistes, Krøyer revient chaque été à Skagen, de juin à octobre..
Peder Severin Krøyer
Soirée d'été sur la plage de Skagen
(1893)

Deux toiles qui nous invitent à une promenade paisible et lumineuse sur ses plages, où l’on sent la douceur de la brise marine et la clarté du soir.
Krøyer est le peintre de l’heure bleue, cette « demi-teinte crépusculaire » qu'évoquait dès 1884 le critique Louis de Fourcaud, émerveillé par la délicatesse de ses compositions, pleines de romantisme et de lyrisme contenu.

TN2

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samedi 27 août 2022

A. Kaminsky - Paris la nuit (1946)

Une image et des mots. Évidemment - puisque je le publie -, j'aime beaucoup ce cliché d'Adolfo Kaminsky, pris à Paris en 1946. Qui est cette femme et qui attend-elle ? Son souteneur, un micheton, peut-être l'être aimé ? Et justement, au dessus d'elle, l'affiche d'un film égyptien de Mohamed Karim, Vive l'amour (1938) ; on y discerne le nom de l'acteur vedette Abdel Wahab.
J'ai repensé pour l'accompagner à ces quelques mots de John Steinbeck, dans une lettre de 1958 à son fils Thom.

Il y a différents types d'amour. Le premier est égoïste, méchant, narcissique et n'est qu'un faire-valoir pour l'ego. C'est un amour laid et paralysant. L'autre est une libération de tout ce qu'il y a de bon en toi : gentillesse, considération et respect. Je ne parle pas seulement du respect social des bonnes manières, mais du profond respect, c'est-à-dire la reconnaissance d'une personne en tant qu'être unique et précieux. Le premier type d'amour peut te rendre malade, petit et faible tandis que le second peut révéler ta force, ton courage, ta bonté et même une sagesse que tu ignorais posséder.

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dimanche 21 août 2022

Milton Avery - Paris pigeons (1955)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre et aquarelliste américain Milton Avery (1885-1965) reconnu pour son style singulier, à la croisée du modernisme européen et d'une sensibilité proprement américaine. Bien qu’il soit souvent associé à l’expressionnisme et au modernisme, Avery n’a jamais revendiqué d’appartenance à un mouvement. Il a développé une voie personnelle qui influencera nombre d’artistes américains, dont Mark Rothko, qui disait de lui : "Quel était son répertoire ? Son salon, Central Park, sa femme Sally et sa fille March..., ses amis et ce qui traînait dans son studio; un monde domestique et ordinaire."
Milton Avery - Two poets (1963)

Ce qu’il peignait, c’était donc son entourage : sa famille, ses amis, des paysages ou des natures mortes, abordés avec une économie de détails qui frôle l’abstraction. Son usage des aplats de couleurs, hérité de Matisse, confère à ses toiles une intensité à la fois lumineuse et apaisée.
Longtemps sous-estimé, Milton Avery est aujourd’hui considéré comme un pionnier : il a su établir un lien essentiel entre la peinture américaine traditionnelle du début du XXᵉ siècle - encore marquée par le réalisme et le régionalisme - et l’expressionnisme abstrait qui s’imposera dans les années 1940. Il a ainsi contribué à faire émerger une modernité plus libre, ancrée dans le quotidien et attentive à la simplicité des choses.

dimanche 14 août 2022

Nina Leen - Ice (nd)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de la photographe américaine d'origine russe Nina Leen (1914-1995). Après avoir étudié la peinture en Europe, elle s’installe aux États-Unis à la fin des années 1930 et se passionne pour la photographie animalière avant de se tourner vers la mode et la vie quotidienne. En 1944, elle devient l’une des premières femmes à rejoindre l’équipe du magazine Life, où elle réalisera plus d’une cinquantaine de couvertures et des centaines de reportages.

N.L. - Young boy, NYC (1944)
Le titre complet de la seconde photographie est Young boy reading comics with a dog, NYC. Leen s’intéresse à la société américaine d’après-guerre - ses familles, ses adolescents, ses animaux domestiques - avec un regard à la fois bienveillant et lucide.
Deux de ses clichés ont été sélectionnés par Edward Steichen (voir mars 2010) pour figurer dans la légendaire exposition The Family of Man, qui rassemblait 503 photographies de 273 auteurs venus de 68 pays et célébrait l’universalité de l’expérience humaine.

dimanche 7 août 2022

Peter E. Brown - Bath
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre impressionniste britannique Peter Edward Mackenzie Brown (b.1967), connu sous le sobriquet de Pete the Street pour son refus du recours à la photographie et son habitude de peindre directement sur le motif, dans les rues, par tous les temps.

P. E.Brown - Untitled
"Working is like being at a party. I need to be at the centre of things. Consciously or subconsciously, what I experience finds its way onto the canvas".
Diplômé en beaux-arts de la Manchester Metropolitan University en 1990, il s’installe à Bath, où il vit et travaille encore aujourd’hui. Brown s’attache à représenter la vie quotidienne avec énergie et sincérité : marchés, passants, façades, pluie et lumière mêlées.
Son œuvre capture la vitalité ordinaire des villes anglaises, avec un sens aigu de la couleur et de la matière. Ce bel édifice, au fond, c'est la cathédrale de cette jolie ville, avec sur le côté l'entrée des thermes romains.

samedi 6 août 2022

Anonyme - Soldats allemands, WWI

Une image et des mots. Et c'est n'estimer rien qu'estimer tout le monde... Cette phrase du Misanthrope, placée par Molière dans la bouche d'Alceste, il me semble l'avoir trouvée en d'autres termes chez Sartre, qui dit quelque part - en substance -, qu'aimer tout le monde c'est n'aimer personne... Rousseau lui aussi disait à peu près la même chose, en affirmant dans l' Émile qu'on aime les Tartares pour se dispenser d'aimer notre voisin.

J'aurais pu, pour illustrer cette photographie de sentinelles allemandes pendant la Grande Guerre, choisir un extrait du très intéressant La société des voisins, paru en 2005 sous la direction de l'ethnologue Alain Morel et du sociologue Bernard Haumont... 
Mais de voisins, il en est aussi question dans le roman d'Ondjaki, Les Transparents, publié en 2015 :

Qu'est-ce que, après tout, un endroit rempli d'êtres humains si peu concernés les uns par les autres ? Qu'est-ce qu'un endroit plein de voitures conduites par des gens seuls cherchant à bousculer le temps et à maltraiter les autres pour arriver plus vite chez eux et n'y retrouver que leur propre solitude ? Qu'est-ce qu'un endroit plein d'effervescence et de festivités et d'enterrements regorgeant de nourriture, si on ne peut plus frapper à la porte de quelqu'un pour demander un verre d'eau ou la permission de se reposer un instant sous l'ombre fraîche d'un figuier ? Cette ville est un désert, pensa-t-il.

Peter Turnley Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Peter Turnley (b..1955). P.T. - La Tartine, Paris (2025)