In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 15 décembre 2024

Y. Ozeri - Ambient dinner (2024)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre hyperréaliste israélien Yigal Ozeri (b.1958), qui réside et travaille à New York où il a cofondé en 2014 Mana Contemporary, un centre artistique multidisciplinaire situé plus précisément à Jersey City. D'abord séduit par l'abstraction, Ozeri s'est tourné vers le réalisme au début des années 2000, et son travail d'abord centré sur le portrait de jeunes femmes à l'allure romantique - inspiré par les préraphaélites du XIXᵉ siècle comme Dante Gabriel Rossetti et John Everett Millais -, a rapidement suscité une vive admiration.
Un de ces portraits me fascine : Untitled; Shely 2017. Ici, Yigal Ozeri touche à la perfection. Le scintillement de la lumière sur la surface de l'eau, les nuances entre les pierres immergées, floutées par la transparence mouvante de l’eau, et celles qui émergent, plus nettes, presque sèches, le contraste entre la texture mate et la brillance humide de la botte à demi immergée, les plis et les transparences de la tunique plaquée contre la peau.
Tout est palpable, vivant, et fait de cette oeuvre bien plus qu'une "simple" prouesse technique.

Y.O. - Miss America (2022)
Mais ce n'est pas ce que j'ai choisi de publier aujourd'hui ;
je préfère mettre en avant deux de ses tableaux tirés de sa série consacrée aux diners, ces icônes de la culture populaire américaine. Ces œuvres, au-delà de leur perfection formelle, me racontent une histoire : elles évoquent avec nostalgie des instants du quotidien, des lieux emplis d'histoires qui dialoguent avec notre imaginaire.
Ce sont des tableaux qui, par leur force narrative et leur sensibilité, m’invitent à une véritable expérience sensible.
En 1997, Yogal Ozeri a collaboré avec le poète israélien Ronny Someck sur The Razor that Cut the Metaphoric Face of Poetry, un projet combinant gravures et poésie, montrant ainsi son intérêt pour les dialogues artistiques interdisciplinaires.

dimanche 8 décembre 2024

Andy Levin - New York (1978)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Andy Levin (b.1950).
Photographe contributeur de Life Magazine dans les années 80, alors qu'il résidait à New York, son travail est paru dans de très nombreuses autres publications, du National Geographic à Fortune en passant par Paris Match, le Village Voice, Forbes, Jazz News, etc..., etc...

Andy Levin - Chowpatty, India (nd)
"My mission is to capture the vitality of the human experience and to present it on paper in a visually compelling manner. As a photographer I work with daily life, ritual, and celebration within which I look for moments of insight or higher meanings."
En 2004 il s'installe en Nouvelle Orleans où il va documenter, un an plus tard, la catastrophe causée par le cyclone Katrina; les clichés du typhon et de ses conséquences font aujourd'hui partie de la collection permanente du New Orleans Museum of Art.

samedi 7 décembre 2024

Hokusai - La grande vague de Kanagawa (1830)

Une image et des mots. La célébrissime "grande vague de Kanagawa" de Hokusai - la première de ses Trente-six vues du Mont Fuji -, et quelques lignes de Malcolm Lowry extraites de son premier roman, Ultramarine (1933). 

Le bateau s'élevait lentement, porté par les lentes lames bleues, une tonne d'écume déferla sous le vent, et toute la joie du ciel, cette autre mer, resplendit au-dessus du pont pour les soutiers comme pour les matelots, tandis qu'une petite barque de pêche japonais luisait, blanche, contre la côte sombre. Ah ! qu'il était merveilleux, malgré tout, d'exister !

dimanche 1 décembre 2024

René Burri - Hôtel Paix, Shanghaï (1989)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe suisse René Burri (1933-2014), après celui que j'avais publié en octobre 2014.
Formé de 1949 à 1953 à l'École des Arts Appliqués de Zurich, il y apprend la composition, la couleur et le design sous la direction de figures marquantes comme Hans Finsler, Johannes Itten et Alfred Willimann, qui influenceront durablement sa vision artistique.
Il devient en 1959 membre de l'Agence Magnum, et à ce titre il parcourt le monde : le Japon, la Chine, l'Europe, et les deux Amériques. Il photographie le Moyen-Orient, la Guerre des Six Jours et celle du Vietnam. En 1963, c'est lui qui réalise de Che Guevara le fameux portrait au cigare qui fera le tour du monde.

René Burri - Argentine (1958)
Mais, avec son Leica qu’il appelait son « troisième œil », il s'impose comme un photographe sensible et engagé, au-delà du simple photoreporter. Son travail, qu'il célèbre des instants ordinaires ou témoigne d'évènements majeurs, est toujours marqué par une élégance formelle et une géométrie soigneusement pensée. Avec une perspective profondément personnelle, imprégnée d’humanité, Burri ne se contente pas de documenter le réel ; il cherche à en révéler les nuances, les subtilités, la touche imperceptible qui peut donner à une image son caractère intemporel. Avant de fixer un moment, j’ai besoin de comprendre ce qui se passe, ce que je veux exprimer. C’est la présence du photographe qui détermine une bonne image. J'aime énormément celles que je vous présente aujourd'hui.

dimanche 24 novembre 2024

Mark Rothko - Subway (1939)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre américain d'origine lettone Mark Rothko (1903-1970), considéré comme l'un des artistes phares de l'expressionnisme abstrait et de l'art moderne, même s'il refusait d'entrer dans une catégorie qui " l'aliénait."
Son style, qualifié par la critique de peinture de champs colorés (Color Field Painting), se distingue par une simplicité apparente, mais cache une grande complexité émotionnelle et spirituelle. Rothko voyait ses œuvres comme des espaces méditatifs, dans lesquels il s'attachait à dépasser les thèmes traditionnels pour explorer des sujets à portée universelle et spirituelle. 

M. Rothko - Subway (1937)
Convaincu que l’art moderne devait transcender les simples scènes urbaines ou naturelles, il s’est inspiré des crises existentielles de son époque, notamment celles exacerbées par la guerre mondiale. Influencé par Nietzsche, Freud et Jung, il considérait les mythes comme des outils intemporels capables de réveiller des énergies inconscientes et de répondre au vide spirituel de l’homme moderne. Pour Rothko, l’art devait réconcilier l’individu avec une expérience collective, en réinventant des formes mythologiques capables de combler l’absence des dieux et des monstres, désormais perçus comme des superstitions dépassées. Cette quête de sens s’exprime dans ses vastes champs de couleur, qui traduisent une "figure humaine solitaire" dans un moment de complète immobilité, un écho à son aspiration à capter l’essence tragique et universelle de l’expérience humaine.
Mark Rothko voyait dans la création artistique une responsabilité morale : celle de fournir une réponse au désarroi spirituel de son temps, en réintroduisant une transcendance libérée des canons traditionnels. Il s'est suicidé en 1970.

samedi 23 novembre 2024

Markus Hartel - Sans titre
Une image et des mots. 
Aborder le sujet des idées, c'est rapidement traiter de leur échange et de leur partage.. Échangez votre pomme avec quelqu'un, disait à peu près le dramaturge irlandais George Bernard Shaw, et vous n'aurez toujours qu'une pomme ; échangez votre idée, et vous aurez chacun deux idées..
C'est aussi traiter de leur confrontation, et inévitablement en venir au sujet de la tolérance.

Moins les gens ont d'idée à exprimer, plus ils parlent fort, écrivait François Mauriac dans Le pays sans chemin (1951).

L'image est du photographe allemand Markus Hartel, et les mots qu'elle m'inspire sont de Pierre Bayle, précurseur de Locke et de Voltaire, extraits de son Commentaire philosophique II (1636)

Il n'y a pas, dit-on, de plus dangereuse peste dans un État que la multiplicité de religions, parce que cela met en dissension les voisins avec les voisins, les pères avec les enfants, les maris avec les femmes, le Prince avec ses sujets. Je réponds que bien loin que cela fasse contre moi, c'est une très forte preuve pour la tolérance ; car si la multiplicité des religions nuit à un État, c'est uniquement parce que l'une ne veut pas tolérer l'autre [.....], c'est là l'origine du mal.

dimanche 17 novembre 2024

C.P. - Valenciennes (1883)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Camille Pissaro (1830-1903), figure fondatrice de l’impressionnisme, volontiers considéré comme le "père spirituel" du mouvement. Né aux Antilles danoises (aujourd'hui les Îles Vierges américaines), Pissarro s'installe à Paris et suit en 1856 des cours particuliers à l'École des Beaux-Arts, puis s'inscrit en 1861 comme copiste au musée du Louvre. Il explore de multiples influences : il rencontre Camille Corot, avec qui il étudie, et découvre Eugène Delacroix, Gustave Courbet, Dominique Ingres et Charles-François Daubigny. Séduit par les thèmes de la vie rurale chez Jean-François Millet, par le rejet du pathos et du pittoresque de Courbet, ainsi que par la poésie des toiles de Corot, il s'oriente vers une peinture de plein air, ancrée dans la réalité et la lumière.

C.P. - La Seine à Rouen (1888)
Entre 1859 et 1861, il fréquente des académies libres, dont celle du "père Suisse", un lieu important pour les avant-gardes artistiques. C'est là qu'il se lie avec Claude Monet, Ludovic Piette, Armand Guillaumin et Paul Cézanne, qu'il encourage et inspire. Travaillant également dans l'atelier d'Anton Melbye, Pissarro peint en plein air à Montmorency, affinant son approche de la lumière et des paysages. Théoricien de l'anarchie, il fréquente les peintres de la Nouvelle-Athènes et s'associe au mouvement libertaire, imprégnant sa vision artistique d'un humanisme profondément égalitaire. Tout au long de sa carrière, ses œuvres témoignent de son amour pour la ruralité, les paysages en mutation, et la vie quotidienne, qu'il sublime dans des compositions lumineuses.

Étudiantes afghanes en 1978 Le vide-grenier du dimanche. Au lendemain de la Journée internationale des femmes, voici quatre clichés d...