In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 17 octobre 2021

H. Silvester - Untitled (1950s)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe et militant écologiste allemand Hans W. Silvester (b.1938). Sa carrière débute à l’adolescence lorsque ses parents lui offrent son premier appareil photo. Dès la fin de ses études à l’école de Fribourg, en 1955, il se lance dans le reportage photographique, parcourant l’Europe et immortalisant notamment la Camargue, un travail qui lui vaut un succès immédiat avec son livre Camargue publié en 1960, accompagné d’un texte de Jean Giono. Dès lors, il va consacrer son art à documenter les pratiques et les traits culturels des populations qu'il rencontre, de la pétanque provençale aux peintures corporelles des peuples de la vallée de l’Omo, dont il mettra en valeur la créativité et leur lien étroit avec la nature.

H.S. - Sur la route, Tsiganes et Gitans
Et c'est pour la nature qu'à partir des années 1980, Hans Silvester s'engage pleinement dans une démarche militante en faveur de l'environnement. Il fait le tour pour les photographier de tous les parcs naturels d’Europe, et dénonce les conséquences dévastatrices de la déforestation en Amazonie. Parmi ses travaux les plus marquants figure un reportage sur la rivière Calavon, dans les Alpes de Haute-Provence, publié sous le titre La rivière assassinée, et une exploration des problématiques liées à l’exploitation forestière en Amérique du Nord.
Le regard que Hans Silvester porte aujourd'hui sur le monde est un appel à la préservation et au respect du monde naturel et humain.

GA1
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dimanche 10 octobre 2021

F. McCubbin - The letter (1884)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre australien Frederick McCubbin (1855-1917), un des cofondateurs de la Heidelberg School (voir sept. 2016), que l'on désigne aussi sous le nom d'impressionnisme australien. 
Le courrier, missive officielle ou billet doux, est un motif récurrent dans l'histoire de la peinture. Forcément illisible pour le spectateur (ou le "regardeur" comme disait Marcel Duchamp), la lettre consacre l'intime ; elle est un élément empli de mystère dont le sens, le contenu, restent à deviner dans l'attitude de celui ou celle qui en prend connaissance, dans l'expression de son visage, ou dans le contexte de sa lecture.... 

F. McCubbin - Down on his luck (1889)
De celle qui donne son titre à ce tableau, puisqu'elle est décachetée - ou relue - à la faveur d'une promenade solitaire, on a envie d'imaginer qu'elle porte un message intime, et qui s'adresse au coeur de cette élégante jeune femme.
Quant au second tableau, il nous donne à voir un swagman, un de ces travailleurs saisonniers itinérants qui sillonnaient l'Australie dans les grandes périodes de dépression économique - comme aux États-Unis le faisaient les hobos chantés par Woody Guthrie -, leurs maigres possessions enroulées dans ce qui leur servait de couche (le swag, ou bedroll) pour dormir à la belle étoile.

TW4

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dimanche 3 octobre 2021

A.S. Reese - Chuck in the tunnel

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de la photojournaliste américaine Andrea Star Reese (b.1952), déjà publiée ici en décembre 2017. Ils sont extraits de la série documentaire The Urban Cave, qu'elle a réalisée de 2007 à 2014 sur les sans-abri qui vivent dans les souterrains ferroviaires sous les rues de Harlem ; ce travail a fait l'objet d'un livre publié en 2015. 

A.S.R. - One of Lisa's eleven children


Basée entre New York, Seattle et Jakarta, Andrea Star Reese s'intéresse à des thèmes sociaux majeurs souvent liés à des communautés marginalisées ou invisibilisées.
Une autre de ses séries marquantes, "Disorder", se concentre sur les conditions de vie de personnes atteintes de troubles mentaux en Indonésie, en mettant en lumière des pratiques abusives comme le "pasung" (confinement forcé). Ce projet a contribué à une enquête de Human Rights Watch et à des réformes significatives en Indonésie.
À travers la photographie, Andrea Star Reese cherche à nous sensibiliser à des enjeux complexes, affirmant obstinément son engagement à documenter les injustices sociales tout en rendant hommage à la résilience humaine.
"Ce qui dérange la société, écrivait Lydia Perréal dans J'ai 20 ans et je couche dehors, c'est que nous sommes ses victimes. En nous elle voit ses mauvaises notes, ses erreurs accumulées, son égoïsme, ses poubelles qu'elle ne sait pas où vider, les preuves vivantes de son échec."
NS2

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samedi 2 octobre 2021

Maarten van Heemskerck - Geometry (16e)
Une image et des mots. 
En contemplant cette oeuvre du maître hollandais Maarten van Heemskerck (1498-1574), qui nous donne à voir deux hommes prenant la mesure du monde, pourrait nous venir l'image plus prosaïque de deux maquignons qui évaluent d'un bestiau ce qu'il pourra leur rapporter.

Les mots pour l'accompagner sont extraits de l'ouvrage de Riccardo Petrella, Le bien commun - Éloge de la solidarité, traduit et publié en France en 1996.

Selon les Nouvelles Tables de la Loi, le monde est composé d'une série de marchés à conquérir. Le monde n'est pas composé de sociétés, de populations ayant une histoire, une culture, des besoins, des projets. Avant la société, c'est le marché qui compte. [....]
Alors que l'on cherche à éduquer nos sociétés à privilégier un développement durable (sustainable development) sur le plan environnemental et social, l'économie, elle, obéissant à la culture de la conquête, affirme qu'il n'y a pas de durabilité possible : ce qui compte, c'est gagner maintenant.
[....] Le nouveau monde mondialisé est surtout considéré comme un ensemble d'espaces de nouveaux gisements de richesses à exploiter. Le "village global" est ressenti et vécu surtout en tant que nouveau terrain d'affrontement entre les meilleurs candidats au pouvoir mondial. [....] Une nouvelle génération de conquérants est née. (En son sein), les financiers (et les industriels qui poursuivent davantage une stratégie financière) constituent une catégorie à part. Dans leur cas, en général, la culture de la conquête se transforme en une logique de prédation...
[....] La prédation ne crée pas de richesse. Elle ne fait que la prendre là où elle est. Elle a pris l'ampleur qu'on lui connaît suite à la vague de libéralisation des mouvements de capitaux qui a déferlé sur le monde dans les années 80 ; à l'abandon des mécanismes de contrôle public sur les capitaux ; à l'existence de 37 paradis fiscaux dans plusieurs régions du monde, et au maintien du secret bancaire.
[....] La culture d'un peuple est devenue également un marché comme les autres, et donc un marché à conquérir ...