In girum imus nocte et consumimur igni

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samedi 17 mars 2012

Terence Davies - Of time and the city (2008)
Une image et des mots. L'image est tirée du film Of time and the city, le documentaire qu'a consacré le réalisateur Terence Davies à sa ville, Liverpool.
Les mots sont extraits du petit essai publié par Pierre Bergounioux chez Fata Morgana, avec des illustrations de Joël Leick : Les restes du monde (2010).

La face du monde a été bouleversée, voilà deux siècles, par les initiatives conjointes d'entrepreneurs anglo-saxons protestants et d'intellectuels français radicaux. Les uns ont inventé l'économie en vue du profit, introduit le calcul des chances pacifiques de gain pécuniaire dans l'activité productive, les autres institué l'égalité formelle assortie à l'exploitation rationnelle du travail salarié. La révolution industrielle pouvait commencer.
[.....]
L'activité sacrilège qui a éventré la terre pour en extraire le combustible et les minerais, lancé vers les cieux les hauts fourneaux et les cheminées, oppose à la destruction, à l'oubli, la même ténacité qu'elle a mise à asservir l'étendue, la matière. Trente ans après le démantèlement de la sidérurgie, le paysage se souvient. Le souvenir occupe le terrain, se confond avec lui parce que, à la différence des champs, du frêle habitat paysans, des temps agraires, la révolution industrielle a mordu profondément dans la chair du monde, opposé à la nature une culture matérielle qui lui empruntait sa roideur, sa puissance, ses permanences, [.....] De là ces aires fantomatiques, ces édifices blêmes, lavés de leur suie et de leur crasse par les pluies, rendus au vide et au silence mais non au néant.
LF1

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dimanche 11 mars 2012

R.B. - Col. William F. Cody (1889)

Le vide-grenier du dimanche. Au lendemain de la célébration de la Journée internationale des droits des femmes, deux oeuvres de la peintre et sculptrice française Rosa Bonheur (1822-1899) dont le père, saint-simonien convaincu, était ami de Goya.
À 14 ans, elle fait la connaissance de Nathalie Micas, de deux ans sa cadette, qui deviendra sa compagne et le restera jusqu'à sa disparition 53 ans plus tard. En vertu d'une ordonnance de 1800, elle auront par dérogation une permission de travestissement les autorisant à porter le pantalon.
C'est son père, qui sera son seul professeur, qui lui fait découvrir le philosophe et théologien Félicité de La Mennais (qui soutient que les animaux ont une âme), et les romans champêtres de George Sand ; les animaux deviennent alors son sujet de prédilection.

R.B. - Labourage nivernais (1849)
À côté du portrait de Buffalo Bill, un des héros de mon enfance, j'ai choisi son magnifique Labourage nivernais, issu d'une commande d'État et qui, d'abord destiné au musée des Beaux-Arts de Lyon, est entré en raison de son immense succès au musée du Louvre ; il est aujourd'hui à Orsay.
En 1865, elle se voit remettre les insignes de chevalier dans l'ordre de la Légion d'honneur des mains de l'impératrice Eugénie qui déclare :" Je suis tout heureuse d'être la marraine de la première femme artiste qui reçoive cette haute distinction. J'ai voulu que le dernier acte de ma régence fût consacré à montrer qu'à mes yeux le génie n'a pas de sexe."

dimanche 4 mars 2012

Wallace Berman - 7 (1965)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'artiste plasticien américain Wallace Berman (1926-1976), icone du mouvement Beat californien.
Né à Staten Island, New York, il effectue la majeure partie de sa carrière en Californie, où il développe un style unique combinant objets trouvés, collage, et éléments photographiques.
L'art de Berman explorait souvent des thèmes de spiritualité, de contre-culture, et de dissidence politique, et son travail était fortement influencé par le mysticisme et son engagement auprès des poètes et musiciens de la Beat Generation des années 50 et 60.

W.B. - See you soon (1965)
Il était d'ailleurs l'éditeur et le directeur de Semina, un magazine influent qui publiait le travail d'écrivains et d'artistes de la Beat Generation.
The creative act is a way of reclaiming our humanity, of asserting our freedom, of expressing our deeper truths.
Son oeuvre la plus célèbre est sa série de collages Verifax, qu'il a créée en superposant des images photographiques et des objets trouvés, puis en photocopiant l'assemblage. Il a également produit une série de peintures "Sans titre" qui combinaient des coups de pinceau expressionnistes abstraits avec des éléments de collage.

samedi 3 mars 2012

Hans Holbein le Jeune - Les Ambassadeurs (1533)

Une image et des mots. Vanitas vanitatum... Où l'on apprend que Patrick Poivre d'Arvor brigue un fauteuil à l'Académie Française.

Cet homme de télévision, qui pendant près de 30 ans nous a présenté l'actualité du monde avec des minauderies de mirliflore érotomane, accusé de truquages dans son métier de journaliste (la fausse interview de Castro, le faux garde-du-corps de Saddam Hussein, ICI), accusé de plagiat dans son métier d'écrivain (sa biographie d'Hemingway, ICI), condamné en appel à une peine de prison avec sursis pour recel d'abus de bien sociaux (affaire Botton, ICI) a tout de même été fait chevalier de la Légion d'Honneur, élevé au grade de commandeur dans l'ordre des Arts et des Lettres, et est également officier de l'ordre national du Mérite.
Cet homme donc, qui mieux que quiconque sait ses faiblesses et sa vanité - cet hommage d'un imbécile aux qualités d'un âne très intime, disait Ambrose Bierce -, n'estime visiblement pas être indigne de tous ces honneurs puisqu'il en brigue un surcroît, en venant aujourd'hui, sans aucune honte, prétendre mériter l'immortalité.... Formidable !

Lire, au sujet de ce tableau de Hans Holbein que j'ai choisi pour illustrer ce billet - et à propos de sa fameuse anamorphose -, ce qu'en dit Roger Caillois dans son ouvrage Au coeur du fantastique (1965). Lacan aussi l'avait commenté, mais bon...., Lacan.

dimanche 26 février 2012

Isaak Brodsky - Dnieprostroi (1932)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du russe Isaak Brodsky (1883-1939), éminent représentant de ce courant vertueux que l'on appelle le réalisme socialiste soviétique.
Je ne vois pas, au contraire de Lénine, l'art comme une simple petite vis dans la belle mécanique de la révolution, et donc je ne suis pas particulièrement friand des peintures héroïco-martiales de l'art de propagande...
Mais ici, point d allégorie à la mâchoire carrée, point de contre-plongée sur de sculpturaux prolétaires qui brandissent des clés à molette. Au contraire c'est une vue en plongée que nous propose Brodsky, sur le chantier du Dieprostroi qui était alors le plus grand barrage du monde, ... Et l'on n'y voit pas la métaphore attendue d'une multitude de bâtisseurs industrieux au pied de colossales murailles, juste une poignée d'ouvriers raisonnablement affairés; l'un même est assis, et un autre à ses côtés - jambes nonchalamment écartées - a les mains sur les hanches..
Le parti-pris du peintre, donc, me plaît assez, et sa réalisation, sur le plan strictement esthétique, davantage encore... : l'emploi des couleurs, l'équilibre de leurs belles nuances sur la toile, avec cette géométrie d'ombre et de lumière, et ces belles diagonales, le câble d'une grue dont on ne voit que l'ombre... J'aime beaucoup ce tableau.

I. B - Parole IV, Lénine à Putilov (1929)
Le second, tout aussi conventionnel dans son sujet et moins original dans sa composition, me plaît aussi ...
Le titre complet de ce tableau est "Parole IV. Lénine lors d'un rassemblement des travailleurs de l'usine de Putilov en mai 1917." Lénine, donc, de retour d'exil, qui exhorte le peuple à renverser le gouvernement provisoire mis en place après l'abdication du tsar Nicolas II.
J'admire ici la virtuosité du peintre dans le rendu des vestes fatiguées, les avant-bras maculés, ces dizaines et dizaines de postures et d'attitudes formidablement vivantes, cette façon particulière qu'a chacun des trois fumeurs de tenir sa cigarette... Il n'y a qu'une femme dans cette foule, et - de profil - un sosie de Lénine. Où est Charlie ?

dimanche 19 février 2012

John Topham - Mary Anne Smith (c.1930)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du photographe documentaire anglais John Topham (1908-1992), photographe "de la vie ordinaire de gens ordinaires, et des petites choses de la vie telles qu'elles sont réellement".

J.T. - Un ouvrier sur une cheminée
Dartford
(1938)
Mary Anne Smith exerçait dans l'est de Londres le métier de "knocker up", un office né avec l'Angleterre industrielle et qui consistait le matin à taper au carreau de l'ouvrier pour le sortir du lit.
La plupart des "knocker-uppers" employaient un longue perche qui leur permettait d'atteindre les fenêtres de l'étage (voir la publication du 4 dernier).
Mary Anne, elle, se servait d'une sarbacane à petits pois ; ils sont dans sa poche.

JP4 ICI