In girum imus nocte et consumimur igni

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samedi 22 octobre 2016

Rembrandt - Adam et Eve au Paradis (1638)
Une image et des mots. La représentation du bien et du mal dans cette gravure de Rembrandt peut paraître surprenante : aux côtés d'Adam et Eve, dans les moments qui précèdent leur chute, il y a un dragon - image emphatique du serpent -, mais c'est un éléphant qui vient symboliser l'innocence et la chasteté. Il y a une explication.
Le "modèle" de Rembrandt, qui n'est jamais sorti de son pays, s'appelait Hansken. Cette éléphante d'Asie avait été introduite aux Pays-Bas où elle est devenue une attraction extrêmement populaire. Représentée au moins trois fois dans l'oeuvre de Rembrandt, elle a voyagé à pied en Europe du Danemark à l'Italie, et fut le premier éléphant d'Asie a être étudié par la science occidentale.

Les mots sont extraits du Tour du monde d'un sceptique, d'Aldous Huxley (1926).

Quand il (l'éléphant) émergea de l'enceinte du palais - j'évoque cet incident trivial et par trop banal parce qu'il suscita en moi des réflexions mélancoliques sur le cosmos - notre mastodonte s'arrêta et, avec sa gravité ordinaire, se soulagea monstrueusement. L'opération terminée, il avait à peine repris sa marche, qu'une vieille femme qui était restée plantée, dans l'expectative, à la porte d'une masure au milieu des ruines, et nous nous demandions pourquoi, se précipita d'un bond sur le tas d'excréments fumants. Il y avait là, je suppose, de quoi alimenter son feu pour la cuisine de toute une semaine. [.....]
Notre tremblement de terre reprit ses embardées. Je songeai aux douzaines de millions d'êtres humains pour lesquels le passage d'un éléphant diarrhéique semble un don de Dieu, un prodigieux coup de fortune. Cette idée me déprima. Pourquoi sommes-nous ici dix-huit cents millions d'hommes et de femmes, sur cette planète remarquable et peut-être unique? À quelle fin? Est-ce pour aller à la recherche du fumier - bouse de vache, crottin de cheval, excréments énormes et princiers des éléphants? C'est évidemment cela, pour bon nombre d'entre nous du moins. C'était là, pensai-je, une raison qui semblait mal appropriée à notre présence ici-bas, nous, âmes immortelles, cousins germains des anges, les propres frères de Bouddha, de Mozart, et de Sir Isaac Newton.

dimanche 16 octobre 2016

A. Castro - Rien n'intéresse l'homme ... (2015)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du photographe conceptuel italien Alberto Castro (b.1973).
Après des études en architecture à l'Université de Leeds puis à l'Université Polytechnique de Barcelone, il s'initie à la photographie en autodidacte pour aller, dit-il, à la recherche de la poésie qui nous entoure, en se concentrant sur le passage du temps et plus précisément sur le sens de l'éphémère et les transformations continues dont la vie de l'homme est parsemée.
A. C. - Numéro 4 (2014)

C'est cette idée qu'il souhaite véhiculer avec sa série Rien n'intéresse l'homme plus que l'homme, à laquelle appartient le premier cliché.
L'homme d'aujourd'hui ingurgite des images et des informations en quantité massive, dont la plupart s'estompent et deviennent invisibles immédiatement après leur transmission, entraînant avec elles l'homme et son intérêt pour l'homme.
Je sais bien que dans l'art conceptuel l'idée est censée prévaloir sur la forme, mais ici c'est seulement le plaisir esthétique - cette notion bourgeoise dont Adorno ne voulait pas entendre parler -, qui a dicté mon choix pour cette publication. Pour les mêmes raisons, j'aime beaucoup sa série intitulée Il suono del silenzio (une référence à la chanson de Simon & Garfunkel), réalisée en 2011 à Lucques, en Toscane.
PG6
ICI

dimanche 9 octobre 2016

T. Hillier - The fisherman's chapel (1938)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'anglais Tristram Paul Hillier (1905-1983), membre du groupe d'artistes modernistes Unit One actif de 1933 à 1935 et mené par le protéiforme Paul Nash. Formé à la Slade School of Fine Arts de Londres et aux cours du soir de la Westminster School of Art, il part ensuite à Paris, où il vivra jusqu'en 1940.

T. H. - Flooded meadow (1949)
Il y suit à l'Académie Colarossi l'enseignement d'André Lhote - qui fera bientôt l'objet d'une publication - et s’imprègne des cercles surréalistes ; Giorgio de Chirico et Max Ernst vont particulièrement l'influencer.
Mais le monde surréaliste dans lequel nous invite la peinture de Tristram Hillier n'est troublant que d'une manière imperceptible, liée à une perspective inattendue, ou à la présence légèrement incongrue d'un objet abandonné – souvent chargé de symboles. De cette tension subtile naît un sentiment singulier de calme et de solitude, comme si le peintre nous conviait à la contemplation silencieuse d’un univers à la fois familier et mystérieux.

dimanche 2 octobre 2016

F. Stein - Hole in the fence (1946)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe allemand Alfred Stein (1909-1967).
Fils de rabbin né à Dresde, il y rejoint à l'âge de 16 ans les Jeunesses Socialistes. Sa thèse de doctorat en Droit, qu'il soutient à l'Université de Leipzig, est rejetée par les nazis en raison de ses origines juives et de son activisme politique, et en 1933 il se réfugie avec sa jeune épouse à Paris.
Là, il transforme sa passion pour la photographie en profession, et ce sont ses clichés de la capitale française dans les années 30 - où il documente les grèves et le Front Populaire - qui lui apporteront la renommée.
Fred Stein - NYC (1946)

Quand la guerre éclate, en 1939, il est interné dans un camp de la région parisienne mais parvient à s'en échapper. 
Parvenu à Marseille, il embarque sur un paquebot à destination de New York où il poursuit son oeuvre photographique, d'abord comme photographe de rue exalté par le cosmopolitisme de Big Apple, puis comme portraitiste d'intellectuels - Albert Einstein, Thomas Mann, Hannah Arendt... -, de qui il s'imposait de connaître l'oeuvre.
"Lorsque je croise quelqu'un, j'ai envie de connaître son histoire."

samedi 1 octobre 2016

Maynard Dixon - Forgotten man (1934)
Une image et des mots. L'image, ce tableau du californien Maynard Dixon. Les mots sont extraits d'un des livres qui, tous genres confondus, m'ont le plus profondément et durablement marqué, - si cette remarque présente quelque intérêt.

"[.....] Est-ce que tout ne tournait pas remarquablement mal ? Et de tous les côtés ! Un article en trois parties allait échouer pour le simple motif que je n'avais pas dans ma poche un bout de crayon de dix öre ! Et si je redescendais rue des Saules pour me faire rendre mon crayon ? Il me resterait encore le temps d'achever un bon morceau avant que le Parc fût rempli de promeneurs. Et puis tant de choses dépendaient de ce Traité de la connaissance philosophique, peut-être le bonheur de plusieurs hommes, on ne sait jamais."  Knut Hamsun, La faim (1890).
RN1

ICI

F. Bacon - Study of a figure in a landscape (1952) Une image et des mots. L'image, c'est une étude de Francis Bacon, déjà présenté ...