In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
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dimanche 7 novembre 2010

Albert Anker - Le charlatan (1879)
Le vide-grenier du dimanche.
Deux oeuvres du suisse Albert Anker (1831-1910), célébré dans son pays pour ses représentations de la vie rurale, pleines d'humanité et de sensibilité.
Né à Ins, dans le canton de Berne, Anker se passionne très tôt pour l’art. Après des études de théologie, il décide de se consacrer à la peinture et part se former à l'École des Beaux-Arts de Paris dans l'atelier de Charles Gleyre. Il adopte un style réaliste précis, influencé par les maîtres flamands et hollandais du XVIIe siècle, ainsi que par l’art académique français.
Albert Anker - Appliquée (1886)

Comme on le voit ici, Anker excelle dans la représentation du quotidien. Ses tableaux montrent des écoliers studieux, des grands-mères sur leur ouvrage, des paysans au travail ou des enfants qui jouent. Derrière l’apparente simplicité de ces scènes, il cherche à transmettre une forme de valeur universelle et intemporelle qui exalte le travail, l’éducation et la famille.
Son approche rappelle celle de Jean-François Millet ou de Jules Breton, mais avec une touche plus apaisée et intimiste.
"Toute profession est belle quand elle est accomplie avec sincérité et conscience", dira-t-il alors à son père. Le pieux Anker devait sans doute approuver Voltaire, qui dans Candide nous apprend que "le travail éloigne de nous ces trois grands maux que sont l'ennui, le vice, et le besoin".

samedi 6 novembre 2010

Alexey Titarenko - Metro Nevski
Une image et des mots. La photo a été prise en 1993 à l'entrée de métro Nevski, à Saint Pétersbourg, par le photographe américain d'origine russe Alexey Titarenko.
Les mots sont de Roberto Juarroz, extraits du recueil Quinzième poésie verticale.

Los nombres que nos pueblan la vida,
nos consuelan tal vez de algo que falta
en el centro sin nombre de todo,
Los nombres que nos pueblan la vida
como pequeños duendes
o mínimos fantasmas
nos guardan sin embargo del mayor accidente :
la caída de la nada en la nada.
¿No será que los nombres
que nos pueblan la vida
señalan, por encima de las cosas que nombran,
el lugar de otro centro ?


***

Les noms qui peuplent notre vie,
nous consolent peut-être de ce qui manque
au centre sans nom de toute chose.
Les noms qui peuplent notre vie
comme de petits démons
ou de minuscules fantômes
nous protègent pourtant du plus grand accident :
la chute du néant dans le néant.
N’est-ce pas que les noms
qui peuplent nos vies
désignent, par-delà les choses qu’ils nomment,
le lieu d’un autre centre ?

FF1
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dimanche 31 octobre 2010


Bibliothèque Holland House (A.U.1940)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés anonymes qui témoignent d'un événement survenu il y a exactement soixante ans, en octobre 1940, et où il sera question de livres et de décombres.

Après un bombardement, Londres
(A.U.1940)







Sur le premier, c'est la bibliothèque de Holland House
dans le beau quartier londonien de Kensington, après un bombardement le 22 octobre 1940.
Le second cliché montre un jeune garçon en train de lire dans une librairie londonienne détruite par un raid aérien, toujours durant le Blitz de 1940.
Il n'y a pas d'information sur l'identité du jeune lecteur, mais certaines sources affirment que le cliché original indiquait qu'il lisait un ouvrage sur l'histoire de Londres.
Qui a dit que la lecture avait pour vertu paradoxale de nous extraire du monde pour lui trouver un sens ?

dimanche 24 octobre 2010

Felice Casorati - L'attente (1919)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Felice Casorati (1883-1963) peintre, sculpteur et graveur italien dont l’œuvre oscille entre symbolisme, réalisme métaphysique et néoclassicisme.
Né à Novare, Casorati se forme d'abord à l'Université de Padoue, où il étudie le droit tout en se passionnant pour la peinture qu'il apprend en autodidacte, très influencé par le symbolisme de Gustav Klimt et le mouvement sécessionniste viennois.

F. Casorati
Brodeuse dans le grenier
(1935)
Dans les années 1920, il s’installe à Turin, où son atelier devient un foyer artistique fréquenté par de jeunes créateurs italiens. Son œuvre prend alors une orientation métaphysique, proche de Giorgio de Chirico et Carlo Carrà, caractérisée par des figures figées dans des espaces épurés et géométriques, baignés d’une lumière froide et irréelle.
Le monde de Casorati est un monde immobile et silencieux, avec des personnages souvent seuls, assis, parfois désoeuvrés et qui s'abandonnent à la rêverie, ou livrés à de tranquilles occupations. 
Bienheureux ceux qui s'assoient..., est-il dit dans la Bhagavad-Gîtâ.

FS2
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samedi 23 octobre 2010

Béla Tarr - Damnation (1987)

Une image et des mots. Un photogramme du film "Damnation", du réalisateur hongrois Béla Tarr (1987).
Et pour aller avec, la puissance furieuse d'un poème de Saint-Pol-Roux, Prière à l'Océan (1927)

Divinité de houles et de houles sur des gouffres et des gouffres, 
Irascible énergie à la voix de cornoc,
Monstre glauque, semblable à quelque énorme gueule de baudroie suivie d'une incommensurable queue de congre, 
Masse mouvante avec, pour âme, cette lame sourde jaillissant en lave d'un puits abyssal,
Époux de la Tempête aux griffes de noroît et cheveux de suroît,
Génie double qui souque ta victime entre vent-arrière et vent-debout,
Démon de verre cassant des vaisseaux comme on casse des noix,
Ogre aux dents de récif qui croque des tas d'hommes comme sur la terre nous croquons des pommes, 
Nappe d'orgie sur quoi les flottilles sont les friandises, les escadres les gigots,
Insondable estomac où se digèrent les naufrages dont les épaves rares sur les flots figurent les os, 
Diaphragme innombrable au muscle soulevé depuis les tréfonds inconnus jusqu'à l'éclair des nues,
Jungle liquide des sautes-de-vent accouplées aux brisants,
Harpagonie de trésors engloutis,
Joute des aventures d'or et des squales d'acier,
Cimetière dansant où les péris se heurtent, l'alliance au doigt,
Farouche pêle-mêle où tout se trouve - sauf un cœur,
Océan...

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