In girum imus nocte et consumimur igni

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samedi 25 janvier 2014

Albrecht Dürer - Vue du val d'Arco (1495)
Une image et des mots. Une aquarelle d'Albrecht Dürer (1471-1528), plume et encre brune avec des rehauts de bruns et des reprises à l'encre noire; elle est conservée au Louvre.
Pour aller avec, j'ai pensé à ces quelques lignes du beau livre du géographe Élisée Reclus, précurseur libertaire de l'écologie : Histoire d'une montagne (1875), rédigé six ans après son Histoire d'un ruisseau.

Quant à l'homme, il est invisible ; mais on le devine. Comme des nids à demi cachés dans le branchage, j'aperçois des cabanes, des hameaux, des villages épars dans les vallons et sur le penchant des monts verdoyants. 
Là-bas, sous la fumée, sous une couche d'air vicié par d'innombrables respirations, quelque chose de blanchâtre indique une grande cité. Les maisons, les palais, les hautes tours, les coupoles, se fondent en une même couleur rouilleuse et sale, contrastant avec les teintes plus franches des campagnes environnantes : on dirait une sorte de moisissure. On songe alors avec tristesse à tout ce qui se fait de perfide et de mauvais dans cette fourmilière, à tous les vices qui fermentent sous cette pustule presque invisible ; mais, vu de la cime, l'immense panorama des campagnes est beau dans son ensemble, avec les villes, les villages et les maisons isolées qui paillettent ça et là l'étendue. Sous la lumière qui les baigne, les taches se fondent avec ce qui les entoure en un tout harmonieux ; l'air déroule sur la plaine entière son manteau de pâle azur.