In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 30 novembre 2025

L.McC. - Navajo woman (1948)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain d’origine manxo‑britannique Leonard McCombe (1923‑2015). Né sur l’île de Man, il commence à photographier dès l’âge de 16 ans, accompagne l’avance alliée en Europe pendant la Seconde Guerre mondiale avec le magazine Picture Post, puis s’installe aux États‑Unis en 1945 où il rejoint Life Magazine à seulement 22 ans.
McCombe se spécialise dans le photo‑reportage : il documente des moments de guerre, des fragments de vie quotidienne, des figures de l’Amérique contemporaine. L’un de ses travaux les plus fameux, « Career Girl: Her Life and Problems » (1948), documente la vie d’une jeune diplômée à New York.
Son style se caractérise par une immédiateté combinée à une vraie sensibilité : il cherchait, disait-il « à ce que mon travail fasse réfléchir plutôt qu’amuser ».

L.McC. - Texas cowboy (1949)
Les deux clichés que j'ai choisis aujourd'hui illustrent à la fois son regard attentif sur l’Amérique et son sens de la narration. Le premier fait partie de son travail sur la Nation navajo, réalisé en 1948. McCombe y suit la vie quotidienne d’une famille navajo dans l’Arizona, documentant avec une grande empathie les gestes, les visages et les relations au sein d’une communauté confrontée à de profondes difficultés économiques et sociales. La jeune femme qu’il photographie incarne cette intimité, ce mélange de dignité et de fragilité que McCombe savait rendre palpable.
Le second portrait montre Clarence Hailey Long, cow‑boy texan photographié peu après dans son ranch. Cette image, qui sera pour l'agence publicitaire Leo Burnett l’inspiration directe de son légendaire « Marlboro Man », dépasse le simple portrait : en saisissant le mélange de solitude, de force et de quotidienneté qui caractérise la vie de ces hommes, Leonard McCombe inscrit son travail documentaire dans l’imaginaire collectif américain.
WN2

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dimanche 23 novembre 2025

David Park - The bus (1954)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'américain David Park (1911-1960), figure fondatrice de l’École de San Francisco, qui marque le renouveau de la figuration dans l’Amérique des années 1950.
Né à Boston, Park s’installe très jeune en Californie, où il enseigne à la California School of Fine Arts. Avec Richard Diebenkorn et Elmer Bischoff, il s’éloigne peu à peu de l’abstraction dominante pour retrouver le motif humain – un geste audacieux à une époque où triomphait l’expressionnisme abstrait.
« Je voulais peindre des images que je connais et qui me tiennent à cœur ».
D.P. - Boston street scene (1954)

Ses tableaux, souvent peints de mémoire, montrent des scènes simples : des enfants qui jouent, des musiciens, des amis réunis, des baigneuses. Les formes sont larges, les couleurs épaisses et chaudes : c'est un rapport direct au monde, sans artifice ni théorie. On y sent la présence du peintre – son attention à la lumière, à la matière, à la vie ordinaire.
C'est ce que j’aime dans ces œuvres - et que je retrouve aussi dans les tableaux de Dylan : cette tension entre la simplicité du sujet et la densité du geste : tout est proche et familier, mais la peinture dégage un grand sentiment de liberté. Dix ans plus tard, un autre vent de liberté soufflera sur la Californie ; mais chez Park, cette liberté est déjà là, silencieuse, inscrite dans la peinture même. Toutes les formes d'art sont au service du plus grand de tous les arts, disait Brecht : l'art de vivre.

samedi 22 novembre 2025

Diogo Battista - Black Beast (2020)
Une image et des mots. Panique, ils réclament sans savoir un paradis perdu, écrit Georges-Emmanuel Clancier dans Contre-Chants (2000).

Pour accompagner ce cliché du photographe portugais Diogo Battista, et comme pour prolonger le très court poème de G-E Clancier, en voici un autre, ou plutôt un extrait, tiré du recueil de Victor Hugo Les chansons des rues et des bois (1865)


Le cheval luttait ; ses prunelles,
Comme le glaive et l'yatagan,
Brillaient ; il secouait ses ailes
Avec des souffles d'ouragan.

Il voulait retourner au gouffre ;
Il reculait, prodigieux,
Ayant dans ses naseaux le soufre
Et l'âme du monde en ses yeux.

Il hennissait vers l'invisible ;
Il appelait l'ombre au secours ;
À ses appels le ciel terrible
Remuait des tonnerres sourds.
[.....]
Moi, sans quitter la plate-longe,
Sans le lâcher, je lui montrais
Le pré charmant, couleur de songe,
Où le vers rit sous l'antre frais.

Je lui montrais le champ, l'ombrage,
Les gazons par juin attiédis ;
Je lui montrais le pâturage
Que nous appelons paradis.
RW2

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dimanche 16 novembre 2025

Albert Rieger - Clair de lune

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre et photographe autrichien Albert Rieger (1834-1905), formé à l'Académie des Beaux-Arts de Venise.

A.R. - Traversée au clair de lune
J'avoue qu'une partie significative de son œuvre me laisse assez indifférent, notamment ses vues de Venise ou ses représentations orientalistes. En revanche, je suis sensible à ses saisissantes marines sur une mer du Nord souvent tourmentée, ainsi qu'à ses paysages alpins dont voici un bel exemple, avec ces deux scènes baignées de lune à l'atmosphère très romantique.

dimanche 9 novembre 2025

Peter Turnley
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Peter Turnley (b..1955), déjà présenté en août 2023. Je l’avais découvert sur Facebook, où il partage régulièrement son travail, entre reportages sur l’actualité internationale et moments de vie quotidienne à Paris, New York ou Cuba.

P.T. - La Tartine, Paris (2025)
Installé à Paris depuis 1978, il a couvert des conflits et des événements politiques et sociaux dans plus de quatre-vingts pays, tout en poursuivant des projets plus personnels, comme son journal visuel de la pandémie de Covid-19. Son dernier livre, Paris je t’aime – publié le mois dernier – compile cinquante ans de photographies de la capitale, qu’il connaît et aime profondément.
Il y conjugue la sensibilité du photographe de rue et la rigueur du photojournaliste. Je vois ce monde avec simplicité, disait un autre grand photographe - Saul Leiter -, c'est une source de joie infinie.

dimanche 2 novembre 2025

W.S. - I do not understand (2017)
Le vide-grenier du dimanche. Deux œuvres du peintre belge Walter Swennen (1946-2025).
Formé à Bruxelles en gravure, au fil d’une jeunesse aussi marquée par la poésie de la Beat Generation que par le happening, Swennen a choisi dans les années 1980 de se consacrer pleinement à la peinture.
Son travail aborde la peinture depuis l’intérieur : mots, signes, fragments d’objets, références à la bande dessinée ou à l’histoire de l’art sont détournés et réassemblés comme pour mieux montrer que, peindre, c’est toujours « peindre ».
W.S. - Bras d'honneur (2005)

Ni conceptuel ni expressionniste, Swennen refuse de s'enfermer dans un style. Ce qui l'intéresse, ce sont les rapports entre le mot et l'image, le sens et le non-sens, le figuratif et l'abstrait,........ le sérieux et l'humour.
Il s’agit moins de représenter que de laisser la peinture se faire, d’en éprouver sa logique propre : « Le comment détermine le quoi », disait-il - la manière de peindre prime sur le sujet.

samedi 1 novembre 2025

Anon.
Une image et des mots. "Entre les forts et les faibles c’est la loi qui protège et la liberté qui opprime", disait Lacordaire. Pour aller avec ce cliché dont je ne connais pas l'auteur, voici quelques lignes de Hugo, extraites des Misérables (1862) :

Tant qu'il existera, par le fait des lois et des moeurs, une damnation sociale créant artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d'une fatalité humaine la destinée qui est divine ; tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l'homme par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l'atrophie de l'enfant par la nuit, ne seront pas résolus ; tant que, ,dans certaines régions, l'asphyxie sociale sera possible ; en d'autres termes, et à un point de vue plus étendu encore, tant qu'il y aura sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être inutiles.

Bill Anton - So it begins Une image et des mots. L'illustration est de Bill Anton (b.1957), un peintre américain spécialisé dans la repr...