In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
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dimanche 27 novembre 2016

Léon Bonvin - Chrysanthèmes (1863)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre et aquarelliste français Léon Bonvin (1834-1866), demi-frère de François.
Il est repéré par le peintre et critique d'art Frédéric Henriet, qui entre un jour par hasard dans le petit cabaret dont Bonvin a hérité de son père et dans lequel il vivote avec sa femme. Dans ses souvenirs, qu'il publie en 1891, le critique relate la découverte de ses fusains et de ses aquarelles.

Léon Bonvin - La ferme (1865)

Je ne me lassais pas de feuilleter le carton ; c'était tantôt un arbre découpé avec la précision d'une silhouette sur un ciel d'un bleu profond ; tantôt un chardon étudié avec la précision d'un botaniste ; tantôt une tendre fleurette émergeant, toute fraîche et odorante, de son lit de mousses et de graminées ; tantôt quelques objets de ménage empruntés au vulgaire mobilier du cabaret ; toujours des choses vues, longtemps regardées, prises dans l'étroit rayon de sa vie de tous les jours ; tout cela avait l'intimité d'une confidence ; on y sentait l'effort solitaire, concentré, d'une âme contemplative
On le retrouve pendu à une branche, un matin de février 1866 ; il avait 32 ans.

LP1

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dimanche 20 novembre 2016

Don McCullin - Finsbury Park, London (1961)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de l'anglais Don McCullin (b.1935).
Photography is the truth if it's being handled by a truthful person. The real truth of life is on the streets. Photograph the daily lives of people, and how they exist, and how they fight for space and time and pleasure.

DMC - Early morning, West Hartlepool
(1963)




Considéré comme l'un des plus grands photographes de guerre, il s'est aussi attaché à documenter la classe ouvrière, celle du nord de l'Angleterre, de West Hartlepool et de Bradford, ou encore les sans-abri de l'Est de Londres, la ville où il a grandi.
Ses réflexions sur son propre travail, sur sa pratique, révèlent la profondeur et la complexité des sentiments qui ont pu tirailler ce témoin de la souffrance humaine - le torturer même - dans l'exercice de son art.
I have been manipulated and I have in turn manipulated others, by recording their response to suffering and misery. So there is guilt in every direction: guilt because I don't practice religion, guilt because I was able to walk away, while this man was dying by starvation or being murdered by another man with a gun. And I am tired of guilt, tired of saying to myself: "I didn't kill that man on the photograph, I didn't starve that child". That's why I want to photograph landscapes and flowers. I am sentencing myself to peace.
Mais c'est lui aussi, qui raconte qu'un jour il a rencontré en Afrique une femme qui lui confie avoir voulu devenir médecin après avoir vu un de ses clichés; et il conclut cette anecdote en disant : "Voilà, c'est tout ce que je demande. Juste un médecin en Afrique."

samedi 19 novembre 2016

M.R. Hamilton - Tranchées aux coquelicots (1919)

Une image et des mots. Il y a cent ans jour pour jour s'achevait la sanglante bataille de la Somme, une des plus meurtrières de l'Histoire : plus d'un million de morts pour un gain d'une dizaine de kilomètres sans même que le front allemand ne soit percé.
L'image, c'est un tableau de la canadienne Mary Riter Hamilton (1867-1954), Trenches on the Somme with poppies.
Les mots, écrits un an auparavant, sont de Romain Rolland, extraits de Au dessus de la mêlée.

À ce jeu puéril et sanglant, où les partenaires changent de place tous les siècles, n'y aura-t-il jamais de fin, jusqu'à l'épuisement total de l'humanité ?
Ces guerres, je le sais, les chefs d'États qui en sont les auteurs criminels n'osent en accepter la responsabilité : chacun s'efforce sournoisement d'en rejeter la charge sur l'adversaire. Et les peuples qui suivent, dociles, se résignent en disant qu'une puissance plus grande que les hommes a tout conduit. On entend, une fois de plus, le refrain séculaire : " Fatalité de la guerre, plus forte que toute volonté ", - le vieux refrain des troupeaux, qui font de leur faiblesse un dieu, et qui l'adorent. Les hommes ont inventé le destin, afin de lui attribuer les désordres de l'univers, qu'ils ont pour devoir de gouverner. Point de fatalité ! La fatalité, c'est ce que nous voulons. Et c'est aussi, plus souvent, ce que nous ne voulons pas assez.  Qu'en ce moment, chacun de nous fasse son mea culpa ! Cette élite intellectuelle, ces Églises, ces partis ouvriers, n'ont pas voulu la guerre... Soit !... Qu'ont-ils fait pour l'empêcher ? Que font-ils pour l'atténuer ? Ils attisent l'incendie. Chacun y porte son fagot.

dimanche 13 novembre 2016

A.M. - Paysage du midi (1919)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'italien Amedeo Modigliani (1884-1920), figure majeure de la bohème montmartroise et de ce que faute de mieux on appelle l' École de Paris.
Peu studieux, Modigliani abandonne ses études à l'âge de 14 ans pour intégrer l'école des beaux-Arts de Livourne ; il y suit l'enseignement du peintre paysagiste Guglielmo Micheli, formé à l'école des Macchiaioli qui prônent la peinture sur le motif et s'opposent à l'académisme. Il découvre les grands courants artistiques, l'art toscan, la peinture de la Renaissance, et le préraphaélisme. Il passe ensuite un an à Florence en 1902, où il s'inscrit à l'École du nu de l'Académie des Beaux-Arts, dirigée par Giovanni Fattori, figure de proue des Macchiaioli.

A.M. - La route toscane (1898)
L'année suivante il fait de même à l'École du nu de l'Académie des Beaux-arts de Venise, où il reste trois ans. Déjà fasciné par les toscans du Trecento, il découvre les vénitiens qui leur succèdent, Le Tintoret, Titien, Véronèse..., mais aussi les impressionnistes, Cézanne, Toulouse-Lautrec, la période bleue de Picasso, Klimt, et les estampes d'Utamaro...
Modigliani arrive à Paris en 1906, où il mènera une vie de bohème marquée par la précarité et l'abus de drogue et d'alcool. Il peint presque uniquement des portraits et des nus, et sa production ne compte que quatre paysages : c'est cette part mineure de son oeuvre que je choisis de présenter aujourd'hui avec deux de ces tableaux.
À Montmartre et Montparnasse, il côtoie tous les artistes et écrivains de la bohème parisienne, ceux de la Ruche et ceux du Bateau-Lavoir, de Cendrars à Fernand Léger en passant par Radiguet et Foujita, mais ses amis les plus proches sont Utrillo et Soutine.
Rongé par l'alcool et la tuberculose, Modigliani meurt pauvre au seuil de la célébrité en 1920, à l'âge de 36 ans. Sa jeune compagne Jeanne Hébuterne, âgée de 22 ans seulement, mère de son enfant et enceinte du deuxième, se suicide deux jours après en se jetant par la fenêtre de l'appartement de ses parents qui l'avaient recueillie.

samedi 12 novembre 2016

photo Joël Saget/AFP

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Vu Paul Simon, au Royal Albert Hall de Londres, le 7 novembre avec mon fils. Et bien sûr, avant le concert, on s'est arrêtés pour manger un morceau au Garfunkel's de South Kensington. Obligé, non ? Après le concert on a discuté un bon moment aux abords du RAH avec Vincent Nguini, puis avec Mark Stewart que l'on a raccompagné à pied à son hôtel, en papotant tous les trois dans la rue quasi déserte. Souvenirs...

dimanche 6 novembre 2016

D. M. - Poster, Nakano (1990)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe japonais Daido Moriyama (b.1938). 
Il s'intéresse d'abord à la peinture, et ce n'est qu'en 1959, à l'âge de 21 ans, qu'il se tourne vers la photographie. En 1960 il devient à Osaka l'assistant de Takeji Iwamiya, étudie la photo de rue avec Seiryu Inoue, et devient l'année suivante l'assistant de Eiko Hosoe à Tokyo ; celui-ci est - avec Kikuji Kawada et Akira Sato -, l'un des co-fondateurs du collectif VIVO que Moriyama va donc rejoindre juste avant sa dissolution.
C'est une série sur la ville de Yokosuka, réalisée en 1965, qui va véritablement lancer sa carrière.

D. M. - Hunter serie (1972)
My photos are often out of focus, rough, streaky, warped, etc... For me, capturing what I feel with my body is more important than the technicalities of photography.

PF7

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samedi 5 novembre 2016

Une image et des mots. L'image, c'est cette couverture d'un épisode des aventures du Club des 5, de la très prolifique Enid Blyton. Ce groupe d'amis pré-adolescents à la morale exemplaire a accompagné toute mon enfance...
Et voici que j'apprends que depuis 2004 (ou 2006 je ne sais plus), l'oeuvre d'Enid Blyton - une oeuvre que des années 30 aux années 50 la BBC refuse de diffuser pour cause de "pauvreté littéraire" -  voit ses rééditions régulièrement "retravaillées" afin d'en expurger tout ce qui pour le jeune lecteur d'aujourd'hui pourrait paraître un peu trop compliqué. Exit par exemple le passé simple, au profit du passé composé... Mais aussi les phrases sont raccourcies, leur vocabulaire et leur syntaxe simplifiés.
Ainsi, ce qui il y a quelques décennies était  considéré, pour son indigence stylistique, comme de la mauvaise littérature enfantine, est aujourd'hui jugé d'une lecture trop difficile. Ça laisse rêveur...

Pour aller avec cette illustration, une célébration de l'amitié par Walt Whitman, extraite de Leaves of grass (1855)

In paths untrodden,
in the growths by margins of pond-waters,
[.....]
clear to me now standards not yet publish'd,
clear to me that my soul,
that the soul of the man I speak for rejoices in comrades...

[.....]
I proceed for all who are or have been young men,
to tell the secrets of my nights and days,
to celebrate the need of comrades.

***

Dans des sentiers  non frayés,
parmi les plantes qui poussent au bord des eaux stagnantes,
[.....]
claires sont pour moi aujourd'hui des valeurs non encore proclamées,
il est clair pour moi que mon âme,
que l'âme de l'homme au nom de qui je parle trouve sa joie en des camarades.
[.....]
J'entreprends, à l'intention de tous ceux qui sont
ou ont été de jeunes hommes,
de dire le secret de mes nuits et de mes jours,
de célébrer le besoin de camarades.