In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 12 mai 2024

D.G. - An honest day wages

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'illustrateur américain Danny Galieote. Formé à l'Art Center College of Design de Pasadena, ce natif de Burbank a commencé sa carrière comme animateur et artiste conceptuel chez Disney, où il a participé à des films emblématiques comme Le Roi Lion et Pocahontas.
Cette expérience a profondément influencé son style qui - combinant des lignes fluides, une composition rigoureuse, et une attention au détail qui évoque l'esthétique de l'animation traditionnelle -, reflète une profonde admiration pour la tradition figurative et le réalisme narratif. 

D. Galieote - The picnic
Les œuvres de Galieote, qui mêlent des influences du réalisme social, du régionalisme américain et de l’iconographie hollywoodienne, s’inspirent de l’esthétique de l’Amérique des années 1930 à 1950. Galieote y explore les thèmes de la vie quotidienne, des interactions humaines et des rituels sociaux, tout en leur insufflant une modernité subtile. Ses compositions, souvent empreintes de nostalgie, utilisent des palettes lumineuses et des contrastes nets, avec une maîtrise technique qui rappelle des artistes comme Edward Hopper ou Norman Rockwell. Les récits silencieux de Danny Galieote , où chaque détail, qu’il s’agisse d’une posture, d’un regard ou d’un objet, participe à la narration, sont avant tout un hommage à l'histoire culturelle américaine.

dimanche 5 mai 2024

W. Ronis - Belleville, Paris (1947)
Le vide-grenier du dimanche. En ce joli mois de mai, deux clichés du photographe français Willy Ronis (1910-2009), déjà présenté en septembre 2009. Grande figure de la photographie humaniste, Willy Ronis fait ses débuts dans la photographie à l'âge de 18 ans, d'abord en dilettante, puis à partir de juin 36 comme reporter-photographe indépendant. C'est un mois après, à l'occasion du défilé pour la victoire du Front Populaire rue Saint-Antoine, qu'il prend ce cliché d'une petite fille coiffée du bonnet phrygien ; c'était le 14 juillet 1936.
W.R. - Victoire du Front Populaire (1936)








Désormais, Willy Ronis ne cessera de documenter les mouvements sociaux et les petites luttes du quotidien, en posant toujours un regard digne et profond sur ses "frères humains" ; des vies difficiles, mais pleines d'espoir, de force et de ferveur. Il sera choisi par Edward Steichen (voir mars 2010) pour figurer dans sa grande exposition itinérante The Family of Man, montée en 1955 pour célébrer l'universalité de l'aventure humaine.

samedi 4 mai 2024

Zurbarán - Allégorie de la charité (détail)
(c.1655)
Une image et des mots. Un détail du tableau de Francisco de Zurbarán (1598-1664), l'Allégorie de la charité, que l'on peut admirer au Musée du Prado.

L'amour - nous y vivons, nous le respirons, nous le traversons. Sans cesse. Et pourtant nous n'y comprenons rien, ou presque, quand il surgit. Il naît et meurt en nous sans que nous le pressentions : nous ne l'apercevons que bien après son surgissement, et nous l'avons déjà tué depuis longtemps que nous le croyons toujours vivant. Il se déploie à travers nous, plus qu'en nous, comme sans nous. Sans cause, n'a-t-il donc aucune raison ? Nous concluons en effet qu'il n'obéit à aucune logique, pathos sans rigueur, délire sans borne, drogue de drame...
Il reste pourtant une autre voie : l'amour se dispense de toutes les logiques du monde, parce qu'il recèle et déploie de lui-même "... une raison merveilleuse et imprévue ..." (Rimbaud). L'amour suit une raison, mais la sienne, pas celle du monde. La sienne, absolument autre, paradoxale et invisible à ceux qui n'aiment pas. La penser et la dire, cela semble encore impossible. Du moins peut-on déjà en esquisser les prolégomènes : le mal, la liberté, l'éblouissement, la croisée des regards, la crise, l'absence. Et, dès ces préparations, l'amour impose déjà son autre nom - la charité.
Jean-Luc Marion, Prolégomènes à la charité (1986)
PS5

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dimanche 28 avril 2024

R-J - Café des 4 vents (1950)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe René-Jacques (1908-2003). Né René Giton à Phnom Penh, René-Jacques découvre la France en 1917 lorsque sa famille s’installe à Royan, où il remporte à 19 ans un premier prix dans un concours de photographie amateur. Après des études secondaires au lycée Buffon à Paris, où il se passionne pour l’art photographique, il entame des études de droit. Cependant, sa vocation le pousse rapidement à se consacrer pleinement à la photographie, pour laquelle il adopte le pseudonyme René-Jacques.
Dès les années 1930, il s’impose comme un photographe polyvalent : reporter pour L’Intransigeant, illustrateur pour les éditions Grasset - chez qui il illustrera La mer est un pays secret, d'Édouard Peisson (1948) -, ou encore photographe industriel pour Renault.
En parallèle, il explore un Paris empreint de mystère et d’émotion, sur les traces de Francis Carco - de qui il va illustrer de 122 photographies l'ouvrage Envoûtement de Paris (1938) -, et Léon-Paul Fargue.
René-Jacques
Amoureux sur les quais, Paris (1945)

Il travaille aussi comme photographe de plateau auprès de cinéastes comme Georg Wilhelm Pabst ou Jean Grémillon, notamment sur "Remorques" (1941). Sur ce tournage en particulier, René-Jacques tenait à sa totale liberté dans ses choix de cadrages et de sujets ; il souhaitait pouvoir immortaliser les moments hors caméra et réaliser des prises de vue personnelles. Jean Grémillon accepte ces conditions, et René-Jacques se rend à Brest pour documenter le tournage. Durant trois semaines, il produit près de 250 clichés sans tenir compte des directives du chef-opérateur. Ses photographies privilégient les ambiances et les scènes secondaires au détriment des portraits des deux vedettes, ce qui provoque l'agacement de Jean Gabin (une anecdote que j'ai plaisir à rapporter). Face à ces tensions, René-Jacques choisit de quitter le projet plutôt que de se conformer à des contraintes qu’il jugeait incompatibles avec sa démarche artistique.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il rejoint le groupe Rectangle d’Emmanuel Sougez, puis en 1946, il cofonde le Groupe des XV avec des figures majeures comme Robert Doisneau, Willy Ronis et Marcel Bovis, dont l'objectif était de faire reconnaître la photographie comme un art à part entière et de promouvoir le patrimoine photographique français. Conscient de la valeur de son travail, c'est d'ailleurs à ce titre qu'il fera en 1991 don de son oeuvre à l'État, un ensemble de plus de 20 000 tirages aujourd’hui conservé à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie.

MG2

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samedi 27 avril 2024

Antonio Ciseri - L'exilé (1870)
Une image et des mots. Ce tableau d'Antonio Ciseri (1821-1891) me fait penser à un poème de Leopardi, "L'infini", que l'on peut entendre ICI, dit par Vittorio Gassman, et dont voici une traduction;

"Toujours elle me fut chère cette colline solitaire,
et cette haie qui dérobe au regard
tant de pans de l'extrême horizon.
Mais demeurant assis et contemplant,
au-delà d'elle, dans ma pensée j'invente
des espaces illimités, des silences surhumains
et une quiétude profonde; où peu s'en faut
que le coeur ne s'épouvante
.
Et comme j'entends le vent
bruire dans ces feuillages, je vais comparant
ce silence infini à cette voix;
en moi reviennent l'éternel,
et les saisons mortes et la présente
qui vit, et sa sonorité.
Ainsi, dans cette immensité se noie ma pensée:
et le naufrage m'est doux dans cette mer
."

S. Ghadirian - Be colourful (2002) Le vide-grenier du dimanche. Par ses photographies - et particulièrement celles de la série Like everyda...