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R-J - Café des 4 vents (1950) |
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe René-Jacques (1908-2003). Né René Giton à Phnom Penh, René-Jacques découvre la France en 1917 lorsque sa famille s’installe à Royan, où il remporte à 19 ans un premier prix dans un concours de photographie amateur. Après des études secondaires au lycée Buffon à Paris, où il se passionne pour l’art photographique, il entame des études de droit. Cependant, sa vocation le pousse rapidement à se consacrer pleinement à la photographie, pour laquelle il adopte le pseudonyme René-Jacques.
Dès les années 1930, il s’impose comme un photographe polyvalent : reporter pour L’Intransigeant, illustrateur pour les éditions Grasset - chez qui il illustrera La mer est un pays secret, d'Édouard Peisson (1948) -, ou encore photographe industriel pour Renault.
En parallèle, il explore un Paris empreint de mystère et d’émotion, sur les traces de Francis Carco - de qui il va illustrer de 122 photographies l'ouvrage Envoûtement de Paris (1938) -, et Léon-Paul Fargue.
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René-Jacques Amoureux sur les quais, Paris (1945) |
Il travaille aussi comme photographe de plateau auprès de cinéastes comme Georg Wilhelm Pabst ou Jean Grémillon, notamment sur "Remorques" (1941). Sur ce tournage en particulier, René-Jacques tenait à sa totale liberté dans ses choix de cadrages et de sujets ; il souhaitait pouvoir immortaliser les moments hors caméra et réaliser des prises de vue personnelles. Jean Grémillon accepte ces conditions, et René-Jacques se rend à Brest pour documenter le tournage. Durant trois semaines, il produit près de 250 clichés sans tenir compte des directives du chef-opérateur. Ses photographies privilégient les ambiances et les scènes secondaires au détriment des portraits des deux vedettes, ce qui provoque l'agacement de Jean Gabin (une anecdote que j'ai plaisir à rapporter). Face à ces tensions, René-Jacques choisit de quitter le projet plutôt que de se conformer à des contraintes qu’il jugeait incompatibles avec sa démarche artistique.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il rejoint le groupe
Rectangle d’Emmanuel Sougez, puis en 1946, il cofonde le
Groupe des XV avec des figures majeures comme Robert Doisneau, Willy Ronis et Marcel Bovis, dont l'objectif était de faire reconnaître la photographie comme un art à part entière et de promouvoir le patrimoine photographique français. Conscient de la valeur de son travail, c'est d'ailleurs à ce titre qu'il fera en 1991 don de son oeuvre à l'État, un ensemble de plus de 20 000 tirages aujourd’hui conservé à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie.