In girum imus nocte et consumimur igni

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samedi 2 décembre 2017

Andrea Star Reese - Jamaica & Zoe (2007)
Une image et des mots. Une photo tirée de The Urban Cave, une série documentaire entreprise en 2007 par la photographe américaine Andrea Star Reese, sur qui je reviendrai.

Pour accompagner ce cliché, quelques lignes de Julien Gracq, extraites de Liberté grande, publié chez Corti en 1946.
" ... c'est quand elle descend dans mes rêves par les cheminées calmes de décembre, s'assied près de mon lit et prend timidement ma main entre ses petits doigts pour le difficile passage à travers les paysages solennels de la nuit, et ses yeux transparents à toutes les comètes ouverts au-dessus de mes yeux jusqu'au matin."

samedi 25 juillet 2015

Carl Gustav Carus - Île de Rügen (1819)

Une image et des mots. L'image, c'est un tableau que j'aime énormément (commentaire évidemment superflu) du peintre romantique allemand Carl Gustav Carus (1789-1869) et dont le titre complet est Clair de lune près de l'île de Rügen.

Les mots sont un extrait du roman de Julien Gracq, Le rivage des Syrtes (1951) pour lequel il a refusé le prix Goncourt, et à propos duquel Antoine Blondin avait pu dire qu'il s'agissait là d'un "imprécis d'histoire et de géographie à l'usage des civilisations rêveuses".

Je rivais mes yeux à cette mer vide, où chaque vague, en glissant sans bruit comme une langue, semblait s'obstiner à creuser encore l'absence de toute trace, dans le geste toujours inachevé de l'effacement pur. J'attendais, sans me le dire, un signal qui puiserait dans cette attente démesurée la confirmation d'un prodige. Je rêvais d'une voile naissant du vide de la mer. 
Je cherchais un nom à cette voile désirée. Peut-être l'avais-je déjà trouvé.

samedi 17 août 2013

V. van Gogh - Champ de blé avec perdrix (1887)
Une image et des mots. Un tableau de van Gogh, dont le titre évoque parfois erronément une alouette, et des mots de Julien Gracq, extraits de Roof-garden, un des poèmes qui figurent dans le recueil Liberté grande (1946).

Avec le soir, les chaumes sont un reposoir où montent les fumées charmantes de la ville comme les corolles d'un bombardement de fête et de silence, et par les archères on voit le ciel écumer de nuages légers et les campagnes comme la poitrine d'une femme sous l'énorme chaleur.
[.....] et l'herbe folle au-dessus du fleuve frissonne sans cause comme l'épaule d'un cheval.

samedi 21 mars 2009

A. Vakhrameïev - Tatiana Trofimova (1915)
Une image et des mots.  J'ai d'abord découvert, et aimé, chez Alexandre Vakhrameïev (1874-1926), la peinture sociale saisie sur le motif.
Puis j'ai admiré la sensibilité de ses portraits, l'art avec lequel il peignait sur les visages les sentiments les plus subtils et les plus intimes.
Ainsi, avec ce beau portrait de Tatiana Trofimova absorbée dans une profonde rêverie - une "rêvasserie" dirait Théophile Gautier (Mademoiselle de Maupin) -, l'expression de son regard perdu dans le vague.
Les mots sont extraits du roman de Julien Gracq, Le rivage des Syrtes.

"Il y a dans notre vie des matins privilégiés où l'avertissement nous parvient, où dès l'éveil résonne pour nous, à travers une flânerie désoeuvrée qui se prolonge, une note plus grave, comme on s'attarde, le coeur brouillé, à manier un à un les objets familiers de sa chambre à l'instant d'un grand départ. Quelque chose comme une alerte lointaine se glisse jusqu'à nous dans ce vide clair du matin plus rempli de présages que les songes..."