In girum imus nocte et consumimur igni

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dimanche 23 février 2020

M. Stuart - All that life can afford (2002-15)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de l'anglais Matt Stuart, déjà présenté ici en mai 2018.
Sa série All that life can afford - qui en 2016 a fait l'objet en collaboration avec Geoff Dyer d'une belle publication - réunit une sélection de 80 clichés parmi les milliers qu'il a pris dans les rues de Londres entre 2002 et 2015.

Matt Stuart - Singapore (2016)




"J'aime photographier les personnes au naturel, quand elles n'ont pas conscience d'être observées. Les occasions sont rares d'observer les gens sans qu'ils ressentent le besoin de se mettre en scène. C'est le cas dans la rue. J'aime aussi capturer le comique, l'absurde, ou les coïncidences troublantes que je vois".
Je crois que ces deux clichés illustrent bien son propos, autant que l'intelligence et la finesse de son observation. Un homme prostré, seul, accablé par la peine, par la fatigue ou par l'ivresse, et qui tient flottant au-dessus de lui un ballon en forme de coeur, comme un symbole de l'amour que peut-être il demande au monde.
Une femme, dans la très répressive ville-état de Singapour, passe devant un panneau qui affiche Freedom to come and go, quand le cadrage espiègle du photographe la place au centre d'une roue comme un hamster dans sa cage.
NC5

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samedi 22 février 2020

Estampe de Hiroshige (période Edo)
Une image et des mots. Hiroshige (1797-1858) était un dessinateur, peintre et graveur japonais de l'époque Edo (1600-1867). Ses paysages, plein de poésie et d'une grande sensibilité, ont marqué les impressionnistes français.

- Comme les poissons se plaisent dans l'eau ! s'écria Soshi.
Son ami lui dit:
- Vous n'êtes pas poisson; comment savez-vous que les poissons se plaisent dans l'eau?
- Vous n'êtes pas moi-même! répliqua Soshi. Comment savez-vous que je ne sais pas que les poissons se plaisent dans l'eau?

Le livre du thé, 1906, Okakura Kakuzo.
(anecdote que l'on retrouve aussi, en d'autres mots, sous la plume de Simon Leys dans Le bonheur des petits poissons, publié en 2008 chez Lattès).

dimanche 16 février 2020

Bruce Davidson - Brooklyn Gang, Cathy (1959)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Bruce Davidson (b.1933), déjà présenté ici en juin 2013.
Les deux photographies sont extraites de sa série Brooklyn Gang, qu'il a consacrée en 1959-60 aux Jokers alors qu'il était âgé de 25 ans. 
"Cathy was beautiful like Brigitte Bardot. We used to call her the shaggy dog. When Cathy was like thirteen, fourteen years old, she was the hottest thing you ever saw in your life. Everybody turned their eyes looking at Cathy. We were glad to have her hanging out with us. She was beautiful. Then, some years ago, she put a shotgun in her mouth and blew her head off. It was very sad to see her die because she was so sad. She was always sad, always fixing her hair."

B. D. - Brooklyn Gang (1959-60)
Ces lignes sont un court extrait de l'interview d'un des membres de la bande, Bengie, réalisée en 1998 par Emily Haas et dont l'intégralité se trouve ICI. Cette interview figure à l'origine dans l'ouvrage publié par Bruce Davidson en 1998, Brooklyn Gang - Summer 1959, par lequel il nous fait partager la vie du gang des Jokers, pendant tout l'été caniculaire de 1959...
Ils étaient pauvres, ils étaient malheureux, ils étaient violents, ils étaient sexuels, ils étaient plein de vie. Tous les jours j'allais à Brooklyn, ils m'autorisaient à être au milieu d'eux et à sortir avec eux. Mais c'était avant que la drogue ne débarque dans leur vie. J'ai pu voir, de mes yeux, la réalité, à quel point les familles étaient pauvres dans cette partie de Brooklyn. Il n'y avait rien pour les classes ouvrières. Il y avait de l'alcoolisme, et plus tard, de la drogue. Ce n'est pas tant autour d'un "gang", car ce n'est qu'un mot. Mon travail se concentre sur une idée universelle, que tous les ados, et plus généralement toutes les personnes, peuvent connaître : le sentiment d'isolement, de dépression, de la vie elle-même. C'est ça, le sujet de mes photos.

dimanche 9 février 2020

Franz Kafka - Le penseur (1913)

Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de Franz Kafka (1883-1924). Elles font partie de ces dessins - il les appelait "gribouillages" -, qu'il a réalisés entre 1091 et 1907 et qui ont été exhumés l'an dernier des coffres d'une banque zurichoise.

Kafka - Sans titre

dimanche 2 février 2020

Diane Arbus
Blind couple in their bedroom, Queens, NY (1971)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de la photographe américaine Diane Nemerov (1923-1971), bien plus connue sous son pseudonyme Diane Arbus.

D.A. - J L. Borges in Central Park
NY  (1969)

BD5
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samedi 1 février 2020

Paul Henry - A Connemara village (1930s)
Une image et des mots. L'image, c'est ce tableau du peintre irlandais Paul Henry (1877-1958), Village du Connemara (c.1930).
Les mots, que l'on peut trouver sur YouTube portés par la voix de Liam Neelson, sont du poète irlandais Seamus Heaney (1939-2013), couronné par le Nobel de littérature en 1995.
Voici une traduction du premier de ces poèmes lus. 

Creuser (Digging).

Entre mon doigt et mon pouce
Le stylo trapu repose; comme un pistolet.
Sous ma fenêtre, le crissement net
De la bêche qui plonge dans le sol caillouteux:
Mon père qui creuse. Je le regarde.
Jusqu'à ce que ses reins tendus parmi les plates-bandes
Se courbent à terre, remontent vingt ans après
Se voûtent en rythme dans les sillons de pommes de terre
Où il creusait.
[...]
L'odeur froide de la terre remuée, le gargouillis
De la tourbe détrempée, les courtes entailles d'une lame
Au travers de racines vivantes s'éveillent dans ma tête.
Mais je n'ai pas de pelle pour suivre de tels hommes.
Entre mon doigt et mon pouce
Le stylo trapu repose.
Je creuserai avec.


Seamus Heaney

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