In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
eiπ + 1 = 0

dimanche 24 septembre 2017

E.S. - Roof, Yorkshire (1959)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe anglais Edwin Smith (1912-1971), architecte de formation, peintre à ses débuts, mais surtout l’un des grands photographes britanniques du XXᵉ siècle. Parfois surnommé « le dernier des romantiques », il a parcouru l’Angleterre (et au-delà) pour en fixer les paysages, les villages, les églises, les ateliers, les intérieurs modestes… Son œuvre, toute en noir et blanc, se situe à la croisée du documentaire et de la poésie.
E.S. - Clothes line, Glencaple, Scotland
(1954)

Rien de spectaculaire, pas de mise en scène : seulement un œil attentif aux lieux et aux gens.
Sa photographie n’était pas tant une recherche esthétique qu’un art de voir ; voir ce qui disparaît, ce qui reste, ce qui fait la texture d’un pays et la mémoire d’une époque. Photography is a way of telling what you feel about what you see, disait-il. It is about finding out what can happen in the frame. When you put four edges around some facts, you change those facts.
Cette phrase, qui lui est attribuée, dit bien sa compréhension de la nature transformatrice de la photographie : donner un cadre à une scène, c’est déjà redéfinir la perception qu’on en a, transformer de simples faits en une vision qui touche à l’artistique.

WN5
ICI

dimanche 17 septembre 2017

R.P. Bonington - Sunset in the Pays de Caux (1828)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre anglais Richard Parkes Bonington (1802-1828).
Formé aux Beaux-Arts de Paris, où il entre en 1820 dans l'atelier du peintre néoclassique Antoine-Jean Gros, Richard Parkes Bonington a eu une influence majeure sur toute une génération de peintres romantiques français en leur révélant la sensibilité propre à la peinture anglaise - celle de Constable, Lawrence ou Turner, un quart de siècle plus tôt.

R.P.B. - Near Rouen (1887)

Delacroix, qu'il rencontre à Paris en 1818 et qui deviendra son ami, lui rendait hommage en ces termes :  « Il n’a laissé qu’un nom, mais ce nom est entouré de tout ce qui peut séduire dans l’art. »
Richard Parkes Bonington n'avait que 26 ans lorsqu'il est mort en 1828, emporté par la tuberculose, et c'est cette année-là qu'il a peint ce magnifique Sunset in the Pays de Caux.
C'est un tableau que j'aime beaucoup ; pour les falaises baignées de lumière, pour les reflets dans les flaques, et dans le lointain les haveneaux sur les épaules des pêcheurs à pied...
LS1
ICI

samedi 16 septembre 2017

Ilya Pitalev - Pyongyang (2012)
Une image et des mots. L'image est un cliché du photographe russe Ilya Pitalev, pris à l'occasion du 100ème anniversaire de la naissance de Kim Il Sun, fondateur de la Corée du Nord et "Président éternel" du pays du matin frais. 
Pour l'accompagner, quelques mots de Goethe extraits de son Traité des couleurs (1810).

"Les couleurs agissent sur l'âme, elles peuvent y exciter des sensations, y éveiller des émotions, des idées qui nous reposent ou nous agitent et provoquent la tristesse ou la gaieté". 
Cette idée de la puissance des couleurs et de leur influence sur cette âme dont parle Goethe, on la retrouve aussi dans les Écrits de Kandinsky.
AB1

ICI

dimanche 10 septembre 2017

C. Dalsgaard - Convalescente (1863)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres du peintre danois Christen Dalsgaard (1824-1907). Né à Skive, il part en 1841 à Copenhague pour suivre les cours de l’Académie royale des beaux-arts. Trois ans plus tard, une conférence de Niels Laurits Høyen, critique et professeur d’art, sera décisive : Høyen exhorte les jeunes artistes à délaisser les thèmes étrangers - l’Italie était alors la destination obligée des peintres en quête d’inspiration - pour se tourner vers leur propre pays, son paysage, ses coutumes, ses visages.

C.D. - Chambre de pêcheur (1853)
Dalsgaard va entendre cet appel, et toute son œuvre portera la marque de cette orientation. Ses toiles, souvent centrées sur la vie rurale, les intérieurs modestes, les traditions populaires, s’inscrivent aussi dans un contexte historique troublé : les guerres germano-danoises de 1848-1850 et de 1864. 
Høyen y voyait une raison supplémentaire de renforcer une identité artistique nationale, quitte à s’isoler d’une scène internationale qui, plus tard, jugera cette peinture « rétrograde » (notamment à l’Exposition universelle de 1878 à Paris).On peut reprocher à Dalsgaard une certaine idéalisation du monde paysan. Mais c’est aussi ce qui ajoute à l’intérêt de son œuvre : il documente à sa manière les mutations du Danemark du XIXᵉ siècle - l’éducation, les tensions politiques, la lente transformation d’une société. Par cette fidélité à ce qu’il pensait être l’âme de son pays, il reste l’un des peintres emblématiques de l’art danois.
JM2

ICI

dimanche 3 septembre 2017

J. F. - Tivoli fashion shop (1973)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de la photographe documentaire américaine Jill Freedman (b.1939). Née à Pittsburgh, elle s’installe à New York dans les années 1960 et devient l’une des grandes figures de la photographie documentaire urbaine. loin des mondanités de la scène artistique, elle préférait passer son temps dans la rue, aux côtés de ceux qu’elle photographiait.
Après l'assassinat de Martin Luther King, elle accompagne le Poor People’s Campaign à Washington en 1968 ; ce sera son premier livre (Old News: Resurrection City).
Mais c’est surtout dans New York qu’elle bâtira son œuvre : les flics et les pompiers (Street CopsFirehouse), les sans-abri, les enfants qui jouent dans les terrains vagues, les marginaux, les laissés-pour-compte. Toujours au plus près, sans pathos, avec une empathie rude et directe.

J.F. - Resurrection City (1968)
« Je voulais raconter la vie des gens qu’on ne regarde pas, disait-elle, montrer leur dignité, leur humour, leur courage. » Ses images, en noir et blanc, mêlent la dureté du quotidien et une vraie chaleur humaine. 
Dans une époque où la photographie basculait vers l’art conceptuel, Jill Freedman est restée fidèle à une idée simple : la photographie comme témoignage et comme lien.
BH4

ICI

samedi 2 septembre 2017

Guayasamín - Manos de un mendigo
Une image et des mots. Une oeuvre du peintre équatorien Oswaldo Guayasamín (1919-1999).
Les mots sont encore de Roberto Juarroz, extraits  une nouvelle fois de Dixième poésie verticale.
La traduction (je me suis humblement permis une seule petite retouche) est de François-Michel Durazzo.

Hay horas que nos abren las manos
y dan vuelta como a un texto marchito
la lección fatigada que es el mundo.

La iniciativa no nos pertenece.
Las cosas se sueltan o se abren
como si hubiese ondas o corrientes o motivos
que recorren el tiempo y el espacio,
cambian las situaciones,
corrigen las sustancias,
desempolvan texturas
y hasta inventan quizá
nuevos modos del ser,
variaciones o escapes.

Y entre tantos procesos curiosamente ambiguos
no sólo se nos abren las manos
como maniobras fértiles,
sino que a veces también se posa algo sobre ellas,
como si viniera a descansar un instante del abismo.

***

Il est des heures qui nous ouvrent les mains
et retournent comme un texte fané
la leçon fatiguée qu'est le monde.

L'initiative ne nous appartient pas.
Les choses se déprennent ou s'ouvrent
comme s'il y avait des ondes, des courants ou des motifs,
qui parcourent le temps et l'espace,
changent les situations,
corrigent les substances,
dépoussièrent des textures
et peut-être même inventent
de nouvelles manières de l'être,
des variations ou des fuites.

Et parmi tant de processus curieusement ambigus
non seulement nos mains s'ouvrent
comme de fertiles manoeuvres,
mais parfois quelque chose se pose aussi sur elles,
comme pour se reposer un instant de l'abîme.

RW1
ICI

M.T. - Sasha Pivovarova (2006) Le vide-grenier. Deux clichés de Michael Thompson (b.1966), photographe américain réputé pour son travai...