In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
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dimanche 18 juillet 2010

Ralph Gibson - Christine (1974)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe américain Ralph Gibson (b.1939), remarquable pour son approche minimaliste et graphique de la photographie. Né à Los Angeles, Ralph Gibson étudie la photographie à l’Institut d’art de San Francisco avant de servir dans la marine américaine comme photographe. Il débute sa carrière comme assistant de Dorothea Lange, célèbre pour ses images de la Grande Dépression, puis travaille avec Robert Frank sur divers projets cinématographiques. Ces expériences influencent son regard, mais Gibson s’éloigne progressivement du documentaire pour développer un langage visuel plus subjectif et introspectif.
R.G. - Hand with a rose
(1960)

Dans les années 1970, il se distingue par des photographies en noir et blanc aux contrastes marqués, où le détail devient un élément narratif essentiel.
Il y joue, comme ci-dessus, avec le cadrage serré, la lumière tranchée et des compositions souvent fragmentaires, créant ainsi des images à la fois réalistes et mystérieuses.
Amateur de poésie et de musique - il a consacré une belle série à la guitare -, il fut aussi proche des poètes et écrivains Beat comme Ginsberg ou Kerouac que de l'univers d'un Borgès...
Le premier cliché fait partie de la belle série Infanta, le second de la série San Francisco, ville-berceau de la Beat Generation.
"Even though fixed in time, a photography evokes as much feeling as that which comes from music or dance. Whatever the mode - from the snapshot to the decisive moment to multi-media montage - the intent and purpose of photography is to render in visual terms feelings that often elude the ability of words to describe." 
DR1

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samedi 17 juillet 2010

Andrew Wyeth - Monday morning (1955)

Une image et des mots. Une oeuvre du peintre américain Andrew Wyeth, sur qui il faudra que je revienne ultérieurement (mais comment choisir?). Cette aquarelle, pour l'apparente trivialité de son sujet et la manière dont il est traité - un simple panier d'osier, et son ombre portée sur le sol et le mur ensoleillé -, est tout simplement un de mes tableaux préférés.
Pour l'accompagner, quelques lignes de Joyce, de son Portrait de l'artiste en jeune homme (1916).

Trois choses sont nécessaires à la beauté : intégralité, harmonie et éclat. Ces choses correspondent-elles aux phases de l'appréhension ? [.....] Regarde ce panier. [.....] Afin de voir ce panier, ton esprit le sépare d'abord de tout l'univers visible qui n'est pas ce panier. La première phase de l'appréhension est une ligne de démarcation tracée autour de l'objet à appréhender. Une image esthétique se présente à nous soit dans l'espace, soit dans le temps. [.....] Mais, temporelle ou spatiale, l'image esthétique est d'abord lumineusement perçue comme un tout bien délimité sur le fond sans mesure de l'espace ou du temps, qui n'est pas cette image. Tu l'appréhendes comme une chose une. Tu la vois comme un seul tout. Tu appréhendes son intégralité, voilà l' "integritas".
Après avoir senti que cette chose est une, tu sens maintenant que c'est une chose. Tu l'appréhendes complexe, multiple, divisible, séparable, composée de ses parties, résultat et somme de ces parties, harmonieuse. Voilà la "consonantia". [.....]
Lorsque tu as appréhendé le panier en question comme une chose une, lorsque tu l'as analysé selon sa forme, lorsque tu l'as appréhendé comme un objet, tu arrives à la seule synthèse logiquement et esthétiquement admissible : tu vois que ce panier est l'objet qu'il est, et pas un autre. L'éclat dont il parle c'est, en scolastique "quidditas", l'essence de l'objet.

VM1

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dimanche 11 juillet 2010

C. Drake - Mineur de charbon à Donetsk
(2006)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de la photographe américaine Carolyn Drake (b.1971).
Après des études en Histoire à la très prestigieuse Brown University de Rhode Island, elle travaille quelques années à New York dans le multimedia ; et ce n'est qu'à l'âge de 30 ans qu'elle vient à la photographie.

C.D. - Zhetisay Hotel, Kazakhstan
(2009)
En 2006 elle part s'installer en Ukraine, et l'année suivante à Istanbul où elle vit actuellement. Le second cliché fait partie de son projet Two rivers, sur lequel elle travaille depuis la capitale turque en voyageant dans les pays d'Asie centrale jadis membres de la défunte Union Soviétique. Carolyn Drake est membre de l'Agence Magnum.
BS1

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dimanche 4 juillet 2010

J.C. Leyendecker - Sleeping Uncle Sam (1924)
Le vide-grenier du dimanche. L’illustration occupe une place centrale dans la culture visuelle américaine du XXe siècle, bien au-delà du seul cadre artistique.
Dès les premières décennies du siècle, cette forme d’expression a su séduire aussi bien les élites urbaines que les lecteurs des kiosques populaires.
Des magazines prestigieux comme The Saturday Evening Post, Collier’s ou Life ont popularisé une illustration narrative et réaliste, incarnée par des figures emblématiques comme Norman Rockwell ou son précurseur et modèle, J.C. Leyendecker, dont les couvertures sont devenues de véritables icônes de l’imaginaire américain.
En parallèle, les pulp magazines, imprimés sur papier bon marché dès les années 1910, ont donné naissance à une imagerie plus populaire, exubérante et souvent transgressive. Les illustrateurs des pulps comme Earle K. Bergey ont façonné l’esthétique de genres entiers : science-fiction, fantastique, horreur, polar…
Une esthétique foisonnante, parfois outrée, mais formidablement inventive, qui continue aujourd'hui d’influencer la bande dessinée, le cinéma ou le jeu vidéo.
E.K. Bergey - Amourette
(1934)

Dans les années 1940, c’est l’essor des pin-ups : des images qui mêlent glamour, érotisme suggéré et patriotisme bon enfant, popularisées par des artistes comme Gil Elvgren ou Alberto Vargas. Pendant la Seconde Guerre mondiale, on les retrouvait partout : sur les murs des baraquements, dans les poches des soldats jusque sous le feu… un idéal de beauté, comme un souffle léger dans une époque marquée par l’angoisse et le chaos.
Les illustrateurs américains étaient, pour beaucoup, des artistes techniquement très accomplis. Ils avaient souvent été formés dans des écoles exigeantes comme la Pennsylvania Academy of the Fine Arts ou l’Art Students League de New York. Et pourtant, ils furent longtemps méprisés par le monde de l’art « officiel », parce qu’ils œuvraient dans la presse, la publicité ou la culture populaire – jugées trop commerciales, voire vulgaires. On les associait à un prétendu « mauvais goût bourgeois ». Mais leur influence fut immense : sur le cinéma hollywoodien, la bande dessinée, le design graphique, et même sur certains mouvements picturaux modernes qui ont fini par reconnaître leur puissance expressive.
Ce qui me plaît tant dans cette forme d’art, au-delà de sa dimension artistique, c’est sa valeur documentaire sur une époque et aussi sa capacité unique à raconter une histoire, à installer une atmosphère, à suggérer un contexte, parfois même à condenser tout un drame en une seule scène. Sous leur apparente simplicité, ces images sont souvent d’une incroyable richesse visuelle et émotionnelle. Au fil de ce blog, je reviendrai donc sur ces artistes, les illustrateurs, que j’apprécie particulièrement, qu’ils soient célèbres ou injustement oubliés. En attendant, voici pour cette première publication deux images emblématiques : la première, en ce 4 juillet, est signée J.C. Leyendecker, figure tutélaire du Saturday Evening Post, maître du style Art déco et de la composition élégante, dont l’influence sur Rockwell sera décisive ; la seconde est une couverture pulp de Earle K. Bergey, illustrateur iconique des magazines populaires des années 1940.
Deux visions très différentes de l’illustration américaine… mais toutes deux puissantes, marquantes, et profondément ancrées dans notre imaginaire collectif.



C.Ebbets - Lunch atop a skyscraper (1932) Une image et des mots. Pour aller avec ce cliché célébrissime, attribué à Charles Ebbets, voici q...