In girum imus nocte et consumimur igni

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samedi 23 juillet 2016

E. Tudor-Hart - Hungry child, White Chapel
(1935)
Une image et des mots. L'image est de la photographe britannique Edith Tudor-Hart, les mots sont de l'égyptien Albert Cossery, extraits de son recueil de nouvelles Les hommes oubliés de Dieu (1927)

Cependant, la ville regorgeait d'une multitude d'êtres, qui n'avaient rien de commun avec ce désordre et ces lumières. Ils passaient près de toutes ces lumières comme des ombres peureuses. Ils regardaient toutes ces belles choses de la ville avec des yeux de bêtes qui ne comprennent pas. Ils transportaient avec eux leur quartier boueux et leur sale misère. Ils étaient visibles comme des plaies. On leur faisait la chasse, mais ils s'obstinaient à rester. Une raison suffisante et implacable les attirait dans cette enceinte magique : la faim. C'était une chose qu'ils comprenaient très bien. Ils étaient innombrables, autour des restaurants, de tous les endroits où l'on mange. Pour eux, manger était tout. Ils ne désiraient rien d'autre. Depuis des générations ils n'avaient pas eu d'autres désirs. C'était des corps ignobles et sans âme. La ville souffrait de les contenir ; la civilisation souffrirait de les voir. Ils ressemblaient à des remords ; des remords très anciens enracinés dans le sol. Mais, malgré tout, ils ne voulaient pas mourir. Mendier un morceau de pain à ceux qui leur avaient tout pris était encore pour eux une chance de vivre. Et on les appelait mendiants ou bien voleurs suivant leur insistance à vivre.

samedi 5 novembre 2011

Elisabeth W. Roberts - Sailing along the Nile
(1904)
Une image et des mots. "I can paint as well as any man", protestait Elizabeth Wentworth Roberts (1871-1927), native de Philadelphie, alors qu'elle étudiait la peinture à l'Académie Julian, à Paris, où hommes et femmes étaient séparés. Plus tard, elle partit à Florence pour y réaliser des copies d'oeuvres de Botticelli et étudier les techniques des grands maîtres. 
Cette toile, Sailing along the Nile (1904), exposée un temps au Art Institute de Chicago, me rappelle ces lignes de l'égyptien Albert Cossery...
Elles sont extraites de la nouvelle "Le facteur se venge", publiée en France chez Losfeld dans un court recueil intitulé Les hommes oubliés de Dieu.

"Sur le mur de la boutique blanchie à la chaux, une peinture populaire représentait une berge du Nil avec un voilier debout sur le fleuve, immobile comme s'il ne voulait plus se mouvoir, mais rester toujours ainsi, ayant peur du large et du vaste inconnu. Et il semblait que tout, quartier, êtres et choses, s'était figé comme ce voilier peint sur le mur, ne voulant plus comprendre qu'on puisse bouger; espérer d'autres buts que ceux déjà atteints; aller toujours plus loin sur la route... Et que c'était une folie."