In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
eiπ + 1 = 0

samedi 29 mars 2025

John Brack - Collins St., 5 pm
Une image et des mots. Une oeuvre du peintre australien John Brack (1920-1999), membre du groupe des Antipodeans, déjà présenté en mars 2008.
Pour l'accompagner, un extrait de "Psychologie des foules" (1895), de Gustave le Bon (1841-1931).

Les civilisations n'ont été créées et guidées jusqu'ici que par une petite aristocratie intellectuelle, jamais par les foules. Les foules n'ont de puissance que pour détruire. Leur domination représente toujours une phase de barbarie. Une civilisation implique des règles fixes, une discipline, le passage de l'instinctif au rationnel, la prévoyance de l'avenir, un degré élevé de culture, conditions que les foules, abandonnées à elles-mêmes, se sont toujours montrées absolument incapables de réaliser.
Par leur puissance uniquement destructive, elles agissent comme ces microbes qui activent la dissolution des corps débilités ou des cadavres. Quand l'édifice d'une civilisation est vermoulu, ce sont toujours les foules qui en amènent l'écroulement. C'est alors qu’apparaît leur principal rôle, et que, pour un instant, la philosophie du nombre semble la seule philosophie de l'histoire.

jeudi 20 mars 2025

Anon. - Madrid (c.1960)
Une image et des mots. Un cliché dont j'ignore l'origine, parfois attribué à un certain Elton Boraya, dont je ne sais rien.

En elle-même toute idée est neutre, ou devrait l'être ; mais l'homme l'anime, y projette ses flammes et ses démences ; impure, transformée en croyance, elle s'insère dans le temps, prend figure d'événement : le passage de la logique à l'épilepsie est consommé... Ainsi naissent les idéologies, les doctrines, et les farces sanglantes.
Idolâtres par instinct, nous convertissons en inconditionné les objets de nos songes et de nos intérêts. L'histoire n'est qu'un défilé de faux Absolus, une succession de temples élevés à des prétextes, un avilissement de l'esprit devant l'Improbable. Lors même qu'il s'éloigne de la religion, l'homme y demeure assujetti ; s'épuisant à forger des simulacres de dieux, il les adopte ensuite fiévreusement : son besoin de fiction, de mythologie triomphe de l'évidence et du ridicule. Sa puissance d'adorer est responsable de tous ses crimes...
Emil Cioran, Précis de décomposition (1949)
JC1

ICI

dimanche 16 mars 2025

R. Rowland - Night shift (1984)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'artiste britannique Rob Rowland (b.1939), dont l'œuvre est profondément enracinée dans le patrimoine industriel et paysager du Royaume-Uni. Né et élevé dans les Midlands durant les années 1950 et 1960, il grandit dans un environnement marqué par les rues pavées, les réverbères à gaz, les canaux et les viaducs ferroviaires, autant d'éléments qui vont plus tard nourrir son imaginaire.
Dès son plus jeune âge, il aspire à travailler dans le domaine des arts visuels. Après avoir envisagé divers métiers – effets spéciaux, affiches de cinéma, art commercial – il intègre un atelier de restauration de tableaux avant de poursuivre sa formation au Gloucestershire College of Arts & Technology. Par la suite, il devient graphiste indépendant, puis rejoint le département artistique d'une brasserie nationale, où il conçoit et peint des enseignes traditionnelles de pubs.

R.R. - Stanier and Issigonis
C'est en 1985, à l'occasion des célébrations du 150ᵉ anniversaire du Great Western Railway, que Rowland découvre sa fascination pour la représentation des chemins de fer et, plus largement, pour le patrimoine industriel.
En 1991, il se consacre pleinement à sa carrière indépendante. Son champ d’intérêt s’étend alors aux paysages marins et aux scènes de la vie quotidienne, sous l’influence d’artistes victoriens et du début du XXᵉ siècle, comme John Singer Sargent, Lamorna Birch et Stanhope Forbes de l’école de Newlyn.

dimanche 9 mars 2025

A.M. - Vieux coeur de frêne
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe français Albert Monier (1915-1998), un de ceux dont l’œuvre a marqué l’histoire sans pour autant obtenir la reconnaissance qu’elle méritait de son vivant. Issu d’une famille modeste, il grandit entre l’Auvergne et la Normandie, où ses parents s’installent après la Première Guerre mondiale. Rien ne le destinait à la photographie qu'il découvre au contact de ses cousins agriculteurs. Il a alors une dizaine d’années et, déjà, un regard sensible sur l’art. Il s’essaie d'abord à l’aquarelle avant d’acquérir ses premiers appareils photo à l’âge de 18 ans et de se mettre à photographier son Auvergne natale, la rudesse des terres et la simplicité des hommes. Il n'y avait pas besoin de moi pour montrer les gens importants. J'ai fait le contraire, je me suis fait grandir avec des gens humbles.

A.M. - Prolongement
C'est ensuite le Maroc, où il perfectionne son art entre 1948 et 1950, en photographiant la vie quotidienne et les traditions locales avec une approche à la fois documentaire et poétique. Enfin, il s’installe à Paris, où il photographie les quais de Seine, les ruelles et les figures pittoresques, en cherchant toujours à révéler l’âme cachée des lieux et des gens, dans une capitale à la fois vivante et mélancolique.
Mais Monier comprend que la photographie peut être un art à la fois intime et universel, et il choisit de la diffuser à grande échelle par un médium inattendu : la carte postale; un moyen révolutionnaire de partager son regard avec le plus grand nombre. Ses clichés, d’une beauté saisissante et aux intitulés poétiques, tranchent avec l’imagerie stéréotypée des cartes classiques, et il va vendre plus de 80 millions de cartes postales à travers le monde, atteignant une popularité rare pour un photographe de son époque. Mais malgré son immense succès auprès du public, Albert Monier ne connaîtra jamais la reconnaissance du monde de la photographie, et lorsqu'il s’éteint en 1998 c'est dans une relative indifférence.

FC1 ICI