In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
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samedi 19 mai 2018

Picasso - Cabeza de toro (1943)
Une image et des mots. Cette oeuvre de Picasso, et ce qu'il en dit, illustrent pour moi l'essence même de l'inspiration.

"Un jour j'ai trouvé dans un tas de ferraille une vieille selle de vélo à côté d'un guidon rouillé. Immédiatement, les deux objets se sont associés dans mon imagination. L'idée de la tête de taureau m'est venue à l'esprit sans réfléchir. Je n'ai eu qu'à les souder.
[....] Peut-être aurais-je dû jeter la tête de taureau, la jeter dans un ruisseau, n'importe où, mais la jeter. Alors un ouvrier serait passé et l'aurait ramassée. Peut-être se serait-il rendu compte qu'avec cette tête de taureau il pouvait faire une selle et un guidon de vélo.
Et il l'aurait fait. Ça aurait été extraordinaire."

BH5

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dimanche 13 mai 2018

Tami Bone - Storm (2012)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés de Tami Bone (b.1957). Elle a grandi dans une petite ville du sud du Texas, dans un environnement marqué par les contes populaires, la religion et les paysages arides. Ce terreau imaginaire, mêlé aux souvenirs de son enfance, nourrit directement ses photographies, qu’elle qualifie elle-même de “réalités intérieures”. Le plus souvent en noir et blanc, elle met en scène des figures humaines, des animaux ou des objets dans des décors qui semblent flotter entre rêve et mémoire. Ses compositions, souvent théâtralisées, explorent l’enfance, la perte, le sacré, mais aussi le lien profond à la terre natale et aux mythologies personnelles.

T.B. - série Mythos (2012)
À propos de la série Mythos, d'où sont extraites ces photos, elle dit ceci : Ce travail est mon histoire. Les images sont parfois, mais pas toujours, la construction de plusieurs images. Chacune commence par des notes prises à propos d'un souvenir particulier ou d'une image de mon enfance...
Il y a une bonne part du travail de Tami Bone que je ne me sens pas la possibilité - ni l'envie - de partager ; ce que racontent la plupart de ses images m'est trop étranger, ou lui est trop personnel..; ce qui revient sans doute au même.
Mais j'aime les deux que voici, aussi bien d'un point de vue esthétique que sur un plan narratif ; j'y trouve l'espace dont j'ai besoin pour y créer "mon" histoire.
KD1

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dimanche 6 mai 2018

H.R.N. - Irises in the garden (1882)
Le vide-grenier du dimanche. Deux oeuvres de l'américain Henry Roderick Newman (1843-1917), associé à la tradition préraphaélite et particulièrement connu pour ses aquarelles détaillées représentant des paysages, des architectures et des scènes de la nature. Né à Easton, New York, il entreprend en 1860 des études de médecine pour suivre les pas de son père, mais les abandonne un an plus tard, à son décès et alors qu'il n'a que 18 ans, pour se consacrer à la peinture en autodidacte. Remarqué et encouragé par John Ruskin, le grand critique d’art britannique, Newman développe une peinture d’une minutie quasi scientifique, héritée de l’observation naturaliste : fleurs, plantes, arbres, paysages de montagne ou côtes rocheuses sont rendus avec une précision méticuleuse, tout en restant traversés d’un sens poétique très préraphaélite.
H.R.N. - The priest's garden
(1883)

Il partage avec les préraphaélites anglais le souci du détail, la quête de vérité dans la représentation de la nature et la fascination pour l’esthétique médiévale. En 1864, il devient membre de l'American Pre-Raphaelites.
Au printemps 1870, il se rend en France et suit brièvement les enseignements de Jean-Léon Gérôme, mais l'irruption de la guerre franco-prussienne le pousse en Italie, où il passera le reste de sa vie. C'est là, sur la côte toscane, qu'il a peint ce jardin de curé baigné de lumière, au bord du golfe éminemment romantique de La Spezia, ce golfe de la mer de Ligurie surnommé Golfe des Poètes. Shelley s'y est noyé.
BP2

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samedi 5 mai 2018

E. Schiaffino - Portrait de Margot (1890)
Une image et des mots. C'est à l'occasion d'un dîner de têtes au Musée des Beaux-Arts de Buenos Aires que j'ai découvert il y a de ça une vingtaine d'années la peinture de l'argentin Eduardo Schiaffino (1858-1935) ; il en avait été le directeur et y avait joué un rôle déterminant dans l'institutionnalisation de l'art dans son pays.
Élève de Puvis de Chavannes, il est maintenant presque oublié et c'est donc avec plaisir que je publie aujourd'hui ce Portrait de Margot (1890). Cet air de lassitude un peu agacée sur son joli visage, est-ce qu'il s'adresse à un amoureux trop peu audacieux qui lui dit des poèmes au lieu de la courtiser? Ou bien (effet Koulechov ?) est-ce juste une idée née à la lecture de ces quelques vers ? Ils sont d'un autre argentin, Julio Cortazar, extraits de Cinco últimos poemas para Cris.

Ahora escribo pájaros.
No los veo venir, no los elijo,
de golpe están ahí, son esto,
una bandada de palabras
posándose
una
a
una
en los alambres de la página,
chirriando, picoteando, lluvia de alas
y yo sin pan que darles, solamente
dejándolos venir. Tal vez
sea eso un árbol
o tal vez
el amor,
[.....]
No te voy a cansar con más poemas.
Digamos que te dije
nubes, tijera, barriletes, lápices,
y acaso alguna vez
te sonreíste.

***

Maintenant j'écris des oiseaux.
Je ne les vois pas venir, je ne les choisis pas,
d'un coup ils sont là, ils sont ceci,
une nuée de mots
se posant
un
par
un
sur les fils de fer de la page,
piaillant, picorant, pluie d'ailes
et moi sans pain à leur donner, les laissant
seulement venir. Peut-être
est-ce cela un arbre
ou peut-être
l'amour.
[.....]
Je ne vais pas te fatiguer avec d'autres poèmes.
Disons que je t'ai dit
nuages, ciseaux, cerfs-volants, crayons,
et peut-être qu'une fois
tu as souri.

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