In girum imus nocte et consumimur igni

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samedi 20 novembre 2010

Charlotte Perriand (1937)
Une image et des mots. 
Un photomontage de l'architecte, designer et photographe française Charlotte Perriand (1903-1999), collaboratrice de Le Corbusier. Il fut réalisé pour l'Exposition internationale des arts et techniques de la vie moderne, qui s'est tenue à Paris en 1937. 
Les mots pour l'accompagner sont de l'historien Gérard Noiriel, extraits de son ouvrage Les ouvriers dans la société française, XIXe - XXe siècle (1986).

Ce sont les historiens marxistes qui ont le plus insisté sur la place tenue par le prolétariat au sein de la classe ouvrière du XIXe siècle. Pour Jürgen Kuczynski, c'est la machine qui définit le prolétariat. Étant donné la faiblesse de son salaire, le travailleur est dans l'incapacité d'acquérir des moyens de production que le développement des sciences et des techniques rend toujours plus onéreux, nécessitant la concentration de capitaux énormes. D'où une rupture essentielle avec l'Ancien Régime où l'ouvrier était en général propriétaire de ses outils.
"Sans disposer de rien d'autre que de sa capacité de travail, pour une production où sa propriété personnelle ne joue aucun rôle, l'ouvrier vit dans la dépendance du fonctionnement de la machine, laquelle est détenue non par lui, mais par le propriétaire de celle-ci."
[.....]
Nul mieux que Michelet n'a décrit l'enchainement au travail que doivent subir les ouvriers affectés aux métiers mécaniques. [.....] 
(À propos du travail dans les grandes filatures mécanisées du Nord). "Le travail solitaire du tisserand était bien moins pénible. Pourquoi ? c'est qu'il pouvait rêver. La machine ne comporte aucune rêverie, nulle distraction. Vous voudriez un moment ralentir le mouvement, sauf à le presser plus tard, vous ne le pourriez pas. L'infatigable chariot aux cent broches est à peine repoussé, qu'il revient à vous. Le tisserand à la main tisse vite ou lentement selon qu'il respire lentement ou vite ; il agit comme il vit ; le métier se conforme à l'homme. Là, au contraire, il faut bien que l'homme se conforme au métier, que l'être de sang et de chair, où la vie varie selon les heures, subisse l'invariabilité de cet être d'acier."