In girum imus nocte et consumimur igni

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samedi 2 février 2019

Une image et des mots. L'image, c'est cette carte dessinée en 1802 d'après ses observations par Alexandre de Humboldt, le premier à rapporter ce phénomène hydrographique si particulier qu'est le Casiquiare, un cours d'eau sinueux et parsemé de rapides qui relie les bassins des deux géants amazoniens, l'Orénoque et l'Amazone; il faut lire son Voyages dans l'Amérique équinoxiale, paru en deux petits volumes dans une collection de poche, chez La Découverte.

Les mots, extraits du Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations, sont du situationniste Raoul Vaneigem :

"Dans le monde unitaire, sous le regard immobile des dieux, l'aventure et le pèlerinage définissent le changement à l'intérieur de l'immuable. Il n'y a rien à découvrir, car le monde est donné de toute éternité, mais la révélation attend le pèlerin, le chevalier, l'errant à la croisée des chemins. En vérité la révélation est en chacun: parcourant le monde, on la cherche en soi, on la cherche au loin et elle jaillit soudain, source miraculeuse que la pureté d'un geste fait sourdre à l'endroit même où le chercheur disgracié n'aurait rien deviné... [.....] Sous le mouvement, trouver l'immuable; sous l'immuable, trouver le mouvement."

samedi 5 août 2017

Munch - Le cri
Une image et des mots. Une fois n'est pas coutume, l'image aujourd'hui  - Le cri - est une oeuvre connue, archi-connue même puisqu'elle fait sans doute partie des 10 voire des 5 tableaux les plus célèbres au monde. De plus, je dois dire que ce n'est pas l'oeuvre de Munch que je préfère, mais bon.....; on ne fait rien par hasard dit-on.
À noter que ce cri (décliné, entre 1893 et 1917,  en cinq versions: trois peintures, un pastel, et une lithographie) il ne semble pas que ce soit le personnage central du tableau qui le pousse (et qui serait le peintre lui-même..).
En effet, contrairement à la scène décrite dans le texte que j'ai choisi pour l'illustrer, ce cri viendrait d'ailleurs : ce serait celui - métaphorique ou hallucinatoire - d'un monde effrayant; et le personnage qui l'entend, horrifié, se bouche les oreilles.
Pour l'accompagner, voici un extrait du Traité de savoir-vivre à l'usage des jeunes générations (1967), de Raoul Vaneigem.

"Un homme emporté par une foule, visible de lui seul, hurle soudain pour briser l'envoûtement, se rappeler à lui, rentrer dans sa peau. Acquiescements tacites, sourires figés, paroles sans vie, veulerie et humiliation émiettés sur ses pas se ramassent, s'engouffrent en lui, l'expulsent de ses désirs et de ses rêves, volatilisent l'illusion d' "être ensemble". On se côtoie sans se rencontrer, l'isolement s'additionne et ne se totalise pas; le vide s'empare des hommes à mesure qu'ils s'accroissent en densité. La foule me traîne hors de moi, laissant s'installer dans ma présence vide des milliers de petits renoncements.
Partout les réclames lumineuses reproduisent dans un miroitement de néon la formule de Plotin: "Tous les êtres sont ensemble bien que chacun d'eux reste séparé". Il suffit pourtant d'étendre la main pour se toucher, et, par ce simple geste, tout devient proche et lointain, comme par sortilège
."