In girum imus nocte et consumimur igni

In girum imus nocte et consumimur igni
eiπ + 1 = 0

samedi 4 mai 2024

Zurbarán - Allégorie de la charité (détail)
(c.1655)
Une image et des mots. Un détail du tableau de Francisco de Zurbarán (1598-1664), l'Allégorie de la charité, que l'on peut admirer au Musée du Prado.

L'amour - nous y vivons, nous le respirons, nous le traversons. Sans cesse. Et pourtant nous n'y comprenons rien, ou presque, quand il surgit. Il naît et meurt en nous sans que nous le pressentions : nous ne l'apercevons que bien après son surgissement, et nous l'avons déjà tué depuis longtemps que nous le croyons toujours vivant. Il se déploie à travers nous, plus qu'en nous, comme sans nous. Sans cause, n'a-t-il donc aucune raison ? Nous concluons en effet qu'il n'obéit à aucune logique, pathos sans rigueur, délire sans borne, drogue de drame...
Il reste pourtant une autre voie : l'amour se dispense de toutes les logiques du monde, parce qu'il recèle et déploie de lui-même "... une raison merveilleuse et imprévue ..." (Rimbaud). L'amour suit une raison, mais la sienne, pas celle du monde. La sienne, absolument autre, paradoxale et invisible à ceux qui n'aiment pas. La penser et la dire, cela semble encore impossible. Du moins peut-on déjà en esquisser les prolégomènes : le mal, la liberté, l'éblouissement, la croisée des regards, la crise, l'absence. Et, dès ces préparations, l'amour impose déjà son autre nom - la charité.
Jean-Luc Marion, Prolégomènes à la charité (1986)
PS5

ICI

dimanche 28 avril 2024

R-J - Café des 4 vents (1950)

Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe René-Jacques (1908-2003). Né René Giton à Phnom Penh, René-Jacques découvre la France en 1917 lorsque sa famille s’installe à Royan, où il remporte à 19 ans un premier prix dans un concours de photographie amateur. Après des études secondaires au lycée Buffon à Paris, où il se passionne pour l’art photographique, il entame des études de droit. Cependant, sa vocation le pousse rapidement à se consacrer pleinement à la photographie, pour laquelle il adopte le pseudonyme René-Jacques.
Dès les années 1930, il s’impose comme un photographe polyvalent : reporter pour L’Intransigeant, illustrateur pour les éditions Grasset - chez qui il illustrera La mer est un pays secret, d'Édouard Peisson (1948) -, ou encore photographe industriel pour Renault.
En parallèle, il explore un Paris empreint de mystère et d’émotion, sur les traces de Francis Carco - de qui il va illustrer de 122 photographies l'ouvrage Envoûtement de Paris (1938) -, et Léon-Paul Fargue.
René-Jacques
Amoureux sur les quais, Paris (1945)

Il travaille aussi comme photographe de plateau auprès de cinéastes comme Georg Wilhelm Pabst ou Jean Grémillon, notamment sur "Remorques" (1941). Sur ce tournage en particulier, René-Jacques tenait à sa totale liberté dans ses choix de cadrages et de sujets ; il souhaitait pouvoir immortaliser les moments hors caméra et réaliser des prises de vue personnelles. Jean Grémillon accepte ces conditions, et René-Jacques se rend à Brest pour documenter le tournage. Durant trois semaines, il produit près de 250 clichés sans tenir compte des directives du chef-opérateur. Ses photographies privilégient les ambiances et les scènes secondaires au détriment des portraits des deux vedettes, ce qui provoque l'agacement de Jean Gabin (une anecdote que j'ai plaisir à rapporter). Face à ces tensions, René-Jacques choisit de quitter le projet plutôt que de se conformer à des contraintes qu’il jugeait incompatibles avec sa démarche artistique.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, il rejoint le groupe Rectangle d’Emmanuel Sougez, puis en 1946, il cofonde le Groupe des XV avec des figures majeures comme Robert Doisneau, Willy Ronis et Marcel Bovis, dont l'objectif était de faire reconnaître la photographie comme un art à part entière et de promouvoir le patrimoine photographique français. Conscient de la valeur de son travail, c'est d'ailleurs à ce titre qu'il fera en 1991 don de son oeuvre à l'État, un ensemble de plus de 20 000 tirages aujourd’hui conservé à la Médiathèque du patrimoine et de la photographie.

MG2

ICI

samedi 27 avril 2024

Antonio Ciseri - L'exilé (1870)
Une image et des mots. Ce tableau d'Antonio Ciseri (1821-1891) me fait penser à un poème de Leopardi, "L'infini", que l'on peut entendre ICI, dit par Vittorio Gassman, et dont voici une traduction;

"Toujours elle me fut chère cette colline solitaire,
et cette haie qui dérobe au regard
tant de pans de l'extrême horizon.
Mais demeurant assis et contemplant,
au-delà d'elle, dans ma pensée j'invente
des espaces illimités, des silences surhumains
et une quiétude profonde; où peu s'en faut
que le coeur ne s'épouvante
.
Et comme j'entends le vent
bruire dans ces feuillages, je vais comparant
ce silence infini à cette voix;
en moi reviennent l'éternel,
et les saisons mortes et la présente
qui vit, et sa sonorité.
Ainsi, dans cette immensité se noie ma pensée:
et le naufrage m'est doux dans cette mer
."

dimanche 21 avril 2024

C.L. - Le clochard et sa femme, Rouen (1956)
Le vide-grenier du dimanche. Deux clichés du photographe français Christian Lemaire (b.1932). Ancien assistant de Jacques Rouchon, il est d'abord photographe de reportage dans les années 50, avant de travailler pour la presse et la publicité dans les années 60 et 70.

C.L. - Bd Haussmann par temps de pluie
(1958)
Son regard sensible sur la France des années 50 rappelle le travail d'Henri Cartier-Bresson et de Willy Ronis. La photographie, c'est l'art de montrer de quels instants éphémères la vie est faite, disait Proust.
TB1

ICI

C.Ebbets - Lunch atop a skyscraper (1932) Une image et des mots. Pour aller avec ce cliché célébrissime, attribué à Charles Ebbets, voici q...